Epilogue

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An 847

Lily sait désormais reconnaître chaque silence, chacun différent des autres.

Le silence des matinées de départ en expéditions sont différents de ceux des jours normaux, où l’aube n’est ni fraîche, ni colorée, ni accueillante. Ces matin-là, elle a appris à les connaître par cœur. L’air est embaumé de tension, chaque respiration retenue, chaque geste mesuré et anxieux. Aucune voix ne s’élève, sinon celle des cliquetis des équipements tridimensionnels. Celle de ce matin ne faisait pas exception.

Mais au lieu de rester à l’écart, Lily fait désormais partie de ceux qui se préparent. Son rôle demeure le même : rester à l’hôpital, et réparer les dégâts autant qu’elle le peut lors du retour du bataillon. Mais au cours des derniers mois, la jeune femme a étoffé l’ampleur de ses fonctions.

Lily a été l’instructrice de six agents médicaux spécialisés. Ces 6 soldats forment une équipe à part, responsables des soins lors des expéditions, hors des murs. Ces six soldats ont été formés par ses soins à la prise en charge des blessures traumatiques en dehors des murs, pour limiter les dommages le plus possible lors des expéditions. Ils sont sa voix et ses mains là où elle ne peut pas se rendre.

Cela restera à jamais son but : tout faire pour réduire les pertes, tout essayer pour sauver ne serait-ce qu’une vie de plus.

Elle le doit à ses parents, à Sarah, à Simon, et à tous ceux qu’elle considère comme sa nouvelle famille. Les morts des premiers instants n’ont jamais quitté son cœur, et elle les gardera près d’elle, jusqu’à la fin, comme les témoins de tout ce qu’elle peut encore accomplir.

Après avoir donné les dernières instructions à sa petite unité, Lily grimpa dans une des charrette lorsque le bataillon fut prêt à partir, comme à son habitude. Et le silence fut remplacé par le bruit des sabots contre le pavé et le grincement des roues des charrettes.

Passé les portes de Trost, l’odeur du pain frais finit d’éveiller ses sens. Et comme toutes les fois depuis le sacrifice d’il y a un an, elle se dit que ce pain-là n’aura peut-être pas besoin d’être volé.

Arrivé devant l’hôpital, le bataillon s’arrêta pour une courte halte. Lily et son unité s’occupèrent de charger du matériel médical à bord des charrettes. Tout comme le coût du pain avait baissé, l’hôpital était désormais capable de fournir un peu de matériel, ceci sous la demande insistante et répétée de l’infirmière, qui n’avait pas eu tant de mal que ça à se faire entendre, comme toujours.

Ces petits pas, bien que certains pourraient les qualifier d’inutiles, étaient importants. Même si Lily n’avait chargé ce matin que quelques bandages et instruments supplémentaires, peut-être ceux-ci pourraient sauver ne serait-ce qu’une vie de plus. 

Après avoir terminé et souhaité bonne chance à son unité, Lily se dirigea vers le haut du bataillon pour dire au revoir à Hanji, Moblit, Abel, Keiji, Nifa…
L’angoisse des départs ne l’a jamais quitté, pas une seule fois. Mais la confiance qu’elle voue à ses amis, elle, n’a fait que grandir. Elle sait qu’ils sont capable de regarder la mort en face et de la défier, chaque expédition après l’autre.

En traçant son chemin hors du cortège de soldats, sa main effleura celle du plus silencieux de tous. Un geste que personne ne remarqua. Un geste suffisant, pour transmettre à celui qui le reçut tout son soutien.

Lily sait désormais reconnaître chaque silence, chacun différent des autres.

Elle sait reconnaître tous ceux de celui que sa main vient d’effleurer. Elle sait reconnaître en un souffle sa colère, sa détermination, son inquiétude, ses remords.

Elle saurait reconnaître ses pas et le timbre de sa voix n’importe où, tout comme il saurait reconnaître les siens. Elle le connaît par cœur, ses habitudes comme ses exceptions, lorsqu’un rire ou un sourire, rares et précieux, s’invitent sur son visage blême et dur.

Elle connaît sa force comme la vulnérabilité qu’il ne montre jamais à personne, pas même à lui-même : elle la retrouve tard la nuit, emmêlée dans les draps et subtile sous ses caresses.
Elle sait tout de lui, tout comme il sait tout d’elle. Ils savent qu’aujourd’hui de grands mots et un aurevoir ne sont d’aucune utilité.

Car tant que l’un attend l’autre, même séparés par les murs et la mort, ils peuvent espérer trouver des jours meilleurs.

Nocturne (Livaï x OC)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant