Chapitre 6

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            Les jours suivants, impossible de parler seul à seule avec Valentin pour lui soumettre notre requête. C'est à peine si j'ai réussi à le croiser entre nos cours respectifs, ses responsabilités de Président et mes propres entrainements à Eos. La frustration montant, je dévale les escaliers du dortoir tandis que la fine silhouette blonde de mon ami s'efface dans le hall d'entrée. Dehors, aucune trace de lui. Je soupire de mécontentement : où peut-il bien être parti aussi vite ? Une infime partie de moi, suspicieuse envers tout le monde ou presque depuis la découverte de la lettre d'Octavius, instille le doute. Et s'il disparaissait pour renseigner nos ennemis ? Mais je chasse ses pensées de mon esprit. En tant que Président, Valentin est souvent sollicité, surtout par les temps qui courent, ses absences n'ont rien de très surprenant. Cela dit, il doit courir drôlement vite notre Président pour ne plus être visible sur le sentier qui mène à l'Ecole... Cette incertitude permanente, voir dans le moindre comportement un peu étrange de nos amis le signe d'une trahison, et la méfiance envers ceux que j'aime s'avèrent une véritable torture. « Sans preuve, nulle culpabilité », c'est ce que nous avions convenu avec Adam et je m'y tiendrai. Si je me mets à voir le mal en chacun de mes amis, je ne donne pas cher de ma santé mentale. Alors j'enfouis mes sombres interrogations dans un coin de ma tête pour étudier plus attentivement mes possibilités.

Je peux tenter de rattraper Valentin sur le sentier ; sous réserve qu'il ait bien emprunté ce chemin et ne soit pas parti s'affairer ailleurs. Essayer de le coincer à la sortie d'un cours s'annonce aussi difficile, je ne connais pas son emploi du temps. Reste à croiser les doigts et espérer tomber sur lui sur un coup du hasard... Quel plan merveilleux !

— Je connais ce regard... et en général, il n'annonce rien de bon.

Deux mains se posent sur mes épaules tandis qu'un flot d'étudiants quitte le cottage pour vaquer à leurs occupations journalières. Sans même un coup d'œil, je reconnais le ton badin de mon coéquipier. Je lui marmonne un vague « salut », mais il balaie mes politesses d'un geste de la main.

— Qu'est-ce que tu mijotes ?

— Pour le moment, rien.

Au même moment, une immense silhouette aux cheveux sombres et bouclés s'encadre dans l'embrasure de la porte. Mathias nous salue d'un hochement de tête sans nous accorder davantage de considération, mais, à ma hauteur, il glisse un supposé discret :

— Plus vite j'ai l'info, plus vite je peux commencer...

Je chasse son rappel à l'ordre d'un geste de la main. Pas besoin de me mettre la pression, j'ai bien conscience que les résultats ne sont pas au rendez-vous alors que chaque jour nous est compté. Aujourd'hui, j'attrape Valentin une bonne fois pour toutes, en espérant que la chance soit de mon côté.

L'italien ne se formalise pas de ma réaction et reprend tranquillement sa route. En revanche, le sourcil narquois d'Adam ne laisse aucun doute sur le fait qu'il a entendu le commentaire du geek.

— Tu disais... ? « rien », il me semble ? relance-t-il.

Je soupire, vaincue, quand une idée me traverse l'esprit.

— Tu connais l'emploi du temps de Valentin ?

Si ma question le surprend, il n'en laisse rien paraître, habitué à mes changements de sujets somme toute assez brutaux.

— Qu'est-ce que tu veux savoir... ? me demande-t-il suspicieux.

Résignée, je lui fais signe de prendre la route du Patio pour le petit-déjeuner, prête à lui faire part du plan de Mathias et du rôle que Valentin doit y tenir.

L'Ecole des Neuf Muses (T2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant