ACTE II - 19

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Tonnerre. Diffuse lumière. Air de cambuse. Céruse derrière les paupières. Barrières abstruses. Obtuse litière, et pierres confuses.

Le bruit. Le bruit ne s'arrête pas. Il résonne par-delà le bois humide et se profuse dans le noir. A l'intérieur, le sang boue, le muscle le presse, l'épiderme se gratte. Les draps pétrole se tordent de douleur, et alors que le labyrinthe se resserre, les sols se retournent et s'en vont. De ces murs transpire des nappes de sucre, pustules meringuées, verrues fruitées, pus caramélisés, et brûlures glacées. Les poutres sont de pâtes brisées, le plancher de miel, et tandis que les jointures sont de crème, l'unique porte est de cacao craquant.

Dans la nougatine, les vapeurs d'éthanol du rhum raisin, la pistache et la vanille, baignent les corps insatiables et consommés. Les tissus s'enserrent, de mélange de cheveux et de mains, de cuisses et de pieds, de doigts et de poitrines, de sexes et de sexes, jusqu'à ne former qu'un.

Les flammes s'agglutinent, les architectures se plient, alors que l'espace devint singularité, le temps vain se vitrifie. Esprit extatique, exsangue d'excitantes exhumations ne s'expliquent plus, dorénavant libre à vie, dans la mort, à jamais.

Il ne s'agissait pas de cela, car cela ne concernait que de ceci, de cette bête qui sans répit dévore et boit, glouton morbide, malsain et cannibale hors pair. De cette chose sans nom qui soumet les pauvres, ceux qui n'ont rien et qui ne sont rien, le savoir est infinitésimal, si incomplet que même son observation n'est pas directe.

Parmi les poussières et les nuages de gaz cosmique, quelque part dans le calme absolu et ténébreux, les constellations veilles.

Imgw'fhree.

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Wayne se massa le crâne de shampoing sous l'eau brûlante, les songes aussi brumeux que sa salle de bain où on ne voyait qu'à peine. Le savon s'écoulait le long de son corps nu, et tandis qu'il y prenait plaisir, ses muscles se relâchaient lentement.

Suite à cette longue discussion que ses amis ont eu en son absence et dont il avait entendu des bribes, Ian et Billy ont fini par quitter son appartement aux alentours des dix heures, laissant derrière eux une atmosphère qui s'apparenta à de la poudre à canon en suspension, tant les nouvelles l'avaient ébranlé. Mais finalement, et pour une raison qu'il ignorait, la sérénité l'habitait, comme si toute la négativité dont il faisait preuve jusqu'ici avait été anéantie par de simples révélations.

D'une manière affligeante, souvent la vérité est une chose bien connue. Elle n'est que la confirmation des présupposés que l'on ne peut que renier par principe, et si par principe l'acceptation des torts est une option — ce qui est rarement le cas — alors les principes ne sont pas fiables.

Les principes sont de la vertu ce que les promesses sont spécifiquement de la patience. Ils sont annoncés avec de grandes ambitions, accompagnés de grands mots qui ne veulent strictement rien dire car, de toute manière, ils ne dépendent que du temps. Rien ne prouve que la contradiction s'y était cachée, rien ne prouve que ceux-ci ne sont pas présents. De principe, c'est avant tout être un menteur de vraisemblance et ainsi, convenir aux virtuelles lois vertueuses qui n'ont aucun fondement.

Il n'y a pas de noir ou de blanc, ni de bien ou de mal, ni de laideur ou de beauté, ni d'opposition ou de contradiction, ni d'antagonistes ou de protagonistes, et ni d'optimistes ou de pessimistes. Peu importe le paradigme idiot et aveugle, les constats sont les mêmes. Noir et blanc font gris — bien et mal font force — laideur et beauté font individualité — opposition et contradiction font action— antagonistes et protagonistes font synthèse— optimistes et pessimistes font prudence. La dualité n'est qu'un concept de principe, et sans elle la vertu ne peut exister. La confiance n'est qu'un concept de promission, et sans elle la patience ne peut exister.

Les InnommablesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant