ACTE II - 9

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Des choses incompréhensibles, il en existe des milliers. Souvent, avec une mécanique bien huilée s'apparentant à une masturbation cérébrale prenante, l'esprit arrive à démêler les nœuds de l'intrigue pour s'exercer à lisser impartialement les fils qui composent la toile du temps.

Bien entendu, il est difficile de rester neutre dans ce genre d'analyse, tant l'influence de l'expérience, des certitudes et des convictions jouent un rôle majeur, c'est un fait. Mais malgré cela, le chercheur parvient à établir des hypothèses, un protocole expérimental pour en tirer une théorie appuyée par une démonstration rigoureuse et répétable de manière universelle, pour que le monde sache enfin ce qu'il se cache derrière les secrets les plus fascinants de l'univers.

Pour quelconque scientifique légitime, il est indispensable que la grande encyclopédie du savoir s'étoffe des réalités mystérieuses en vicinité des éléments qui ne le sont plus, sous un désir affolant d'essentialisme, si celui-ci aurait même un sens, si le sujet même de cette recherche ait un quelconque intérêt. Dans le cas de celui qui ne posséderait pas la méthode cartésienne, ces questions ne se posent pas. Le sens est purement logique, l'intérêt, peu importe sa nature, est probablement peu raisonnable, tant l'attente place l'espoir d'obtenir une réponse conforme dans une situation précaire.

Le pire, c'est de faire la découverte alors même que l'hypothèse de départ ne s'était pas formulée au préalable.

Au départ, Ian était parti sur l'idée que cette enquête se résoudrait toute seule. Non pas qu'il y voyait des évidences, mais le fait est qu'il était aisé de remonter au propriétaire d'une arme qui avait servi au crime, et pour celui-ci, son identité n'était pas à vérifier.

Le problème était qu'il restait insaisissable, et Ian avait très vite compris que l'autre ne tentait même pas de les semer, bien au contraire.

Bien au contraire, il le guidait. Par ces lettres sanglantes dessinées au couteau, signées de son prénom qui dorénavant, provoquait en Ian un agacement insoutenable.

Ses mains restaient de plomb sur son volant depuis leur départ du commissariat, accompagné de toute une brigade d'intervention dont les feux paraissaient incendier les rues sur son passage.

Il était 25h07. La pluie criblait la voiture à l'arrêt où, dans l'habitacle, une atmosphère glaciale et chargée de soufre semblait flotter.

Ian jeta un œil sur sa gauche, où Billy semblait elle aussi à cran. « Vivement qu'on soit rentré, fit Ian pour la faire réagir, j'ai une de ses faims.

— On vous offre le verre lieutenant. » répliqua l'officier Neilton sur la banquette arrière.

Ian vérifia son état. Échec.

La voiture repartit à vive allure après libération du passage. « N'y pense pas ! Pour qu'ensuite tu me dises que je te dois un service ? »

La plume de l'indifférence semblait lui chatouiller ses oreilles de sourde. « Juré celui-là il sera gratuit.

— On verra ça. »

Il n'aimait pas quand Billy faisait cela. Ian aurait préféré qu'ils se prennent la tête toute la journée sur des sujets auxquels ils étaient totalement opposés, surtout lorsqu'il s'agissait de l'enquête.

Billy se redressa sur son siège. Ian leva les sourcils.

Elle avait l'air absente. Ian hésita un moment. « On l'arrête, ensuite on verra pour sa condamnation. Chaque chose en son temps, d'accord ?

— Difficile de dire qu'il était seul à agir » marmonna-t-elle enfin sans se tourner.

Ian soupira d'exaspération. « Au moins cette fois-ci, il ne nous échappera pas, dit-il pour nuancer la situation.

Les InnommablesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant