Chapitre 12

11 3 1
                                    

L’homme de monsieur me prit avec lui et m’emmena dans la chambre froide. Quand il le fait habituellement, tout ce que je ressens, c’est de la colère ; mais aujourd’hui, c’est de la déception dont il m’a nourri. Les quelques minutes que j’eus passé dans cette chambre m’ont permis de réfléchir à quelque chose qui en valait la peine ; s’enfuir d’ici. Je sais, cela paraît impossible ; mais pour cet enfant que je portai, je devais bien avec des efforts et des sacrifices, transformer l’impossible en possible.

    Je ne pouvais pas croire que mon père, celui même qui m’avait quitté, qui m’avait vendu, qui m’avait abandonné dans le passé, soit revenu aujourd’hui hanter ma vie, me la détruire à nouveau, encore plus qu’elle ne l’est déjà. Je n’aurai jamais cru que, monsieur me voulait du mal à ce point ; inviter mon propre père, celui qui m’avait vendu à lui depuis quelques années, le ramener ici à la maison, sur le même toit que moi ; comment pourrai-je le supporter ? C’est inconcevable, je ne puis le concevoir.
    Un père, c’est celui qui élève, qui donne de l’amour à son enfant, qui l’éduque, qui le protège et même plus que ça. Le mien l’a été ; durant ces quelques années ou ma mère était avec nous, il me choyait ; bien qu’avec des retenu, il me montrait son amour. Mais au bout du compte, cet amour qu’il avait pour moi n’était qu’une façade ; dès que ma mère eut trépassée, il ne m’a plus jamais aimé. Aujourd’hui, je me dis que ma mère avait emportée avec elle dans sa tombe, les sentiments humains de mon père et son amour pour elle et moi. Les hommes sont-ils tous ainsi, avare et avide d’esprit ? Barbare et dépourvu de moralité ? Désinvolte et malin comme le diable ?  J’ai posé ces questions à une personne, elle se fait nommée Isabelle Dayanna ; celle-ci me dit qu’il y a un homme dans sa vie qui est très différent et même le contraire de toute mes questions, c’est mon Laurin.

Après ma punition, Anne me ramena dans ma chambre. J’étais gelé, je ne savais plus si mon sang circulait normalement ou pas ; tellement j’avais froid et je me demandai si mon bébé allait bien et si monsieur allait faire venir le docteur pour qu’il m’examine ; tout en espérant que ce soit Laurin.
    « Madame, vous saignez » me dit Anne. Cela ne m’étonna pas ; avec toute la quantité de froid que mon corps avait absorbé, je ne pouvais que saigner du nez. « Madame, si monsieur continue à vous traiter ainsi, j’ai bien peur que vous fassiez une fausse couche. S’il vous plait madame, dites-lui la vérité, dites-lui que vous attendez un enfant de lui et peut-être que ça l’adoucira » pendant qu’elle me disait cela, j’étais déjà perdu dans mes pensées. Si elle savait que cet enfant ne pouvait peut-être pas être de monsieur, je suis sûr qu’elle ne me demanderait pas de dire la vérité. « Ecoute, donne-moi plutôt mes pilules et cesse de parler s’il te plait, après ça, tu me feras quelque chose de chaud pour que je puisse récupérer, sinon je crois que je vais finir par mourir dans cette chambre » lui dis-je après être revenu sur terre.
    Avec cette histoire de chambre froide, j’avais fini pour un instant, par oublier que mon père était là ; je ne savais toujours comme je devais l’affronter.







Le lendemain matin à 5h, Anne me réveilla comme elle le fait toujours pour me donner mon bain et me vêtir ; ainsi, je pouvais descendre et petit déjeuner avec monsieur. Pour tout vous dire, je n’allais pas fort bien ; je me sentais très faible ; mais pour monsieur, cela n’avait aucune importance ; parce que ses règles sont des obligations à respecter et cela, même les morts de sa résidence le savaient.
    Quelques minutes après que Dorline et elle eurent fini de me préparer, quelqu’un frappa à ma porte. Serait-ce monsieur ? Pensais-je. Impossible, il ne rentre jamais dans mes appartements, à moins que ce ne soit...
    « Madame, votre père est à la porte ; me dit Dorline en entrant dans ma chambre.
  _Que me veut cet homme ? Je ne le connais pas.
  _Li Weiwei ! m’appela ainsi mon père.
  _Je ne porte plus ce nom depuis très longtemps.
  _Je sais ; me dit-il en chinois. Tu ne m’as toujours pas pardonné depuis toutes ces années ? J’ai voulu te donner une belle vie ; ton mari, ne prend-t-il pas soin de toi ? Rajouta-t-il.
  _Je n’ai pas à répondre à tes questions. Avec ta permission ! ».
    Je sortis de ma chambre pour rejoindre monsieur. Je ne sais guère ce qu’il s’était passé, mais avant de pouvoir atteindre la table à manger, je perdis connaissance.
    Quelques heures plus tard, je me réveillai dans une chambre qui était pour moi inconnu. Celle que je vis en premier en ouvrant les yeux était Anne ; de tout évidence, ça ne pouvait qu’être-elle.
   « Où suis-je ? Et...mon bébé...mon bébé va bien, n’est-ce pas ?
  _Gloire à Dieu ; car, vous auriez pu perdre l’enfant. Le docteur a dit que le froid que vous aviez consomme hier soir était nocif pour vous et le bébé.
  _Comment faire alors, pour protéger mon bébé ?
  _Madame, je vous suggère de le dire à monsieur.
  _Ne me fera-t-il pas avorter de mon enfant ? m’enquérant avec des larmes dans mes yeux qui n’attendaient qu’un clin, pour couler sur mes joues sans maquillage, que Anne avait surement ôtée pendant que je dormais. Elle me regarda silencieusement, avec un air abattu, elle soupira.
  _Je ne peux même pas décider de ma propre vie ni même de ce que je veux porter pour me coucher. Tout ce qu’il dit est un ordre que nous exécutons tous sans poser de question. N’en as-tu pas assez de cette vie archaïque ? Ne veux-tu pas toi aussi, te marier un jour et avoir une famille ? Tu n’as que 20ans Anne et tu es très belle.
  _Je veux bien, je veux bien me marier et avoir des enfants, une belle famille en qui je pourrais trouver joie. Mais hélas, je n’y peux rien ; tout comme vous, j’ai été vendu par mon père et acheté par monsieur votre mari. Comment puis-je demander une liberté ? Et surtout, comment puis-je rêver d’avoir une famille à moi seule ? C’est impossible.
  _Rien est impossible à celui qui croit ; ne lis-tu pas la bible ?
  _Non, monsieur ne le permet pas. Mais quand j’étais petite, un parent d’une amie m’avait appris à lire la bible et il y a certains passages qui m’ont apporté satisfaction.
  _Un jour viendra où nous serons libérés de cet homme malfaisant »


À suivre...

Vendu par mon pèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant