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ɴᴏᴠᴇᴍʙʀᴇ 𝟷𝟾𝟿𝟽

Le voyage a été pénible, et, malgré tout ses efforts pour ignorer la fatigue, le corps de Gellert supporte mal le décalage horaire. Une discussion avec un vieux chapeau le sort des vapes un moment, mais dès qu'une cravate verte est nouée à son col il replonge. Cette journée est sans fin.

Il fait encore jour, impossible de savoir l'heure. Il a oublié de manger et le soleil semble éternel ici, bien que ce ne soit pas une belle journée. Le ciel est envahi de nuages lorsqu'il suit Phineas Black dans le parc. 

Tout s'enchaine trop vite pour lui sans pour autant que quoi que ce soit ne devienne intéressant. L'adulte parle à deux élèves de dernière année. Il ne comprend rien à leurs échange. L'accent britannique rend la tâche difficile, surtout avec son cerveau somnolent. 

À Durmstrang il n'était pas rare de trouver des accents atypiques. L'école regroupant une bonne partie de l'Europe du Nord, toute la Scandinavie comprise, on n'avait d'autre choix que de parler anglais pour se faire comprendre. Les rares élèves que côtoyaient Gellert savaient s'y prendre. Il était même difficile de deviner leurs origine tant la langue en vigueur avait remplacée leurs langue native après toute une scolarité de pratique. Cependant, certain∙es éprouvaient des difficultés, et, même en dernière année d'étude, iels s'exprimaient dans un anglais laborieux truffés de bribes de danois, suédois, de polonais ou d'ukrainien. Rien de grave, il suffisait d'un peu de concentration pour communiquer sans accrocs.

Mais aujourd'hui, Gellert est épuisé et a abandonné la concentration. 

« D'accord. Eu... Bienvenue, je suis Albus Dumbledore. »

Pas la moindre idée de ce sur quoi porte la conversation. Il n'a pas l'intention d'y participer et ne dit pas son nom en retour. Il observe tout de même le jeune homme.

On pourrait dire qu'ils se ressemblent à quelque égards : tout comme Gellert, Albus est gringalet et calme, leurs cheveux sont de la même longueur - alors même que la mode exige des hommes des cheveux courts - et un certain charisme se dégage de leur personnalité. 

En revanche, les mèches blanches de Gellert s'opposent aux cheveux foncés d'Albus, de même que le caractère froid du premier s'oppose à la bienveillance du second. 

Le nouveau venu décide que ce jeune homme est peut-être digne d'intérêt. Il ne lui parle pas mais tends l'oreille à la présentation qu'Albus lui fait du château. Le parc, la serre, la Grande Salle, les étages, la tour d'astronomie, la volière et enfin les cachots. 

« Les cours de potions ont lieu ici avec Mlle Necronomia, son bureau est juste à coté donc fais-toi discret si tu rentres après le couvre-feu. Le dortoir des Serpentard, le tien, est au bout du couloir. Je ne suis pas censé y entrer, tu sauras trouver ta chambrée ? »

Albus a improvisé un texte tout du long. Son stress parlait pour lui, il n'a cessé de déblatérer tout ce qu'il savait de l'école. L'inconnu est pourtant plus jeune que lui, il n'a pas de raison de le craindre ! Mais il y a dans son attitude quelque chose d'intimidant. Ce dernier n'a pas ouvert la bouche une seule fois. Albus s'est même demandé s'il comprenait quelque chose à ce qu'il racontait. Ses yeux disaient que oui, et c'était le cas. L'accent n'était plus un problème tant le guide de dernière minute avait la manie de construire un véritable cours d'Histoire de la Magie à chaque nouvel endroit. 

« Bon, je vais te laisser. Je... je suppose que c'est pas facile d'arriver dans un nouvel établissement où l'on ne connait personne alors, si jamais tu as besoin de quelque chose n'hésite pas, je suis là. Je juge jamais. Mais ne te sens pas obligé surtout, tu ne me dois rien... et... »

Voilà qu'il a perdu le fil de sa phrase. Il oublie parfois comme il peut être timide dans une situation inhabituelle. Ici, le jeune homme immobile comme une statue de cire le déstabilise. Il referme ses lèvres avant de bégayer d'avantage puis il reste face à l'inconnu un instant, peut-être trop long, avant qu'il ne se souvienne qu'il doit partir. Il détourne lentement les talons.

« Je m'appelle Gellert, en fait. Grindelwald. » annonce le nouveau avant que son camarade ne soit trop loin pour l'entendre. Celui-ci se retourne vers lui et répond par un sourire entendu que son interlocuteur ne peut s'empêcher de lui rendre. 

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Albus se faufile à pas de loups jusqu'à la salle commune des Gryffondor où il espère ne trouver personne. Sans qu'il ne sache pourquoi, il est chamboulé par la journée qu'il vient de vivre. Son coeur vibre d'adrénaline. À cause de la nuit, il sent de fausses présences derrière lui et court sur les derniers mètres. Le tableau se rabat dans son dos. Il se sent stupide en découvrant Elphias qui relève la tête de ses devoirs pour le dévisager. 

« T'étais avec une fille ? » 

Albus lève les yeux au ciel. C'est à peine s'il a tissé d'autre relations que leurs amitié depuis sa rentrée à Poudlard, alors une fille, n'y pensons pas ! 

Étrange, ce monde. On leurs prédit un mariage sans amour tandis qu'on leurs promet de la romance libre comme l'air, dans les livres. Les garçons connaissent les filles de loin, à travers ce que d'autres garçons leurs raconte. 

Quand Albus tend l'oreille, ils ne semblent parler que de ça : des filles. Rien sur ce que peut renfermer leurs monde. Rien à propos de leurs coutumes, de leurs pensés... Ils ne parlent que de leurs corps. L'un raconte celle qu'il a réussi à avoir avant le mariage, l'autre celles d'un cabaret moldu. Tantôt c'est leurs poignets, leur yeux, leurs silhouettes, tantôt c'est ce que cache leurs robes et Albus n'écoute plus.

 Aucun d'eux ne parle d'amour. Comment pourraient-ils aimer ce qu'ils ne connaissent pas ? Ils ont bien des mères et des soeurs, mais ils ne jouaient même pas avec leurs soeurs, petit, et leurs mères sont des mères avant d'être des femmes. 

Le jeune homme se demande bien, alors, comment il aurait put rejoindre une fille ce soir. Quand aurait-il eu le temps de trouver cet amour ? Il aime le lire dans les livres, mais retrouver une fille en secret c'est une fantaisie et rien d'autre. Même pas sûr qu'il le ferait, s'il le pouvait. Il ne peut pas tomber amoureux d'une personne avec qu'il ne connait pas, avec qui il n'a rien en commun ! 

Pourtant, c'est ce que font les autres garçons, n'est-ce pas ?

De nouveau, il envisage de poser la question à Elphias. De nouveau, il se ravise. 

« J'ai fait visiter l'école au nouveau. 

- Il est gentil ? 

- C'est un Serpentard. 

Qu'est-ce que ça change ? Merlin aussi était un Serpentard. C'est d'ailleurs lui qui devrait représenter cette maison au lieu de celui qui n'a rien accomplit d'autre que de prôner l'inégalité. 

Mais on ne refait pas le monde en le repensant. Cette maison s'appelle Serpentard et les Serpentard n'aiment pas les Gryffondor. 

- Oh. »

« Et Black, alors ? 

- Des trucs sur mes notes. Comme quoi je dois me reprendre. 

Très instructif. Discours qu'il doit resservir depuis qu'il est directeur. Discours qui ne fait rien d'autre que de la peine à celleux qui croient que leurs valeurs se résume en résultats scolaire. S'iels ont de mauvaises notes iels ne travaillent pas, dit-on, ça nous évite de chercher d'autre raisons. Mais Elphias travaille d'arrache-pied ! À quoi bon, alors ? 

- Oh » lâche Albus à son tour. 

smalltown boysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant