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ɴᴏᴠᴇᴍʙʀᴇ 𝟷𝟾𝟿𝟽

« Vous êtes renvoyé. »

Une vieille femme à la robe usée est assise sur un fauteuil écarlate orné de torsades d'ébène. Elle verse des larmes. À croire que c'est elle qu'on renvoie. À sa droite, le premier concerné se tient debout. Ses mains sont jointes le long de son corps, son visage est vide d'expression et quelque mèches rebelles lui tombent dans les yeux. - Yeux étonnants, d'ailleurs. L'un d'un blanc perçant, l'autre d'un brun classique. 

Face à elleux, séparés par un imposant bureau de bois vernis, se tiennent le directeur et sa pipe fumante. Il a d'épais sourcils qu'il fronce quand il regarde le garçon, puis qu'il hausse en passant à la femme. 

« La réputation de cette école est déjà mauvaise. Je n'ai besoin de personne pour la ternir d'avantage, Mr Grindelwald. 

- Gellert est un gentil garçon ! 

- Mr Grindelwald a été reprit pour magie noire à de nombreuses reprises. conteste le directeur. 

- Par Baba Yaga ! Gellert, est-ce que c'est vrai ? »

Le jeune homme ne répond pas. Il ne bouge même pas les yeux. 

« Que va-il faire de sa vie, s'il quitte l'école à seize ans et sans diplôme ? Nous n'avons pas un gallion ! 

- Votre petit-fils est un élève brillant, je suis certain qu'il peut exceller dans n'importe quelle profession. Réconforte à contre-coeur l'homme, mal alaise dès qu'il y a des larmes.

Les traits misérables de la veille femme s'effacent alors qu'elle se lève brutalement de la chaise. Si elle ne peut pas attendrir, elle essaye d'effrayer. 

- Facile à dire ! Je suis une femme âgée et pauvre qui élève seule un adolescent. Je n'ai ni l'argent ni l'énergie de nous obtenir un cadre de vie confortable pendant encore un an. Si vous le renvoyer par pur égoïsme - pour votre réputation -, ayez au moins la décence de nous proposer des alternatives ! »

Surpris par le changement de ton, l'homme abandonne un peu de son air suffisant pour soupirer :

« Avec ce qui reste de ses frais de scolarité, vous pouvez lui payer le train jusqu'en Angleterre, qu'il aille à Poudlard. 

- L'Angleterre ? s'insurge Mrs Grindelwald, C'est à l'autre bout du monde !

- Où vous voulez, s'exaspère le directeur, la France ou les États-Unis si vous préférez, n'importe quelle école qui voudra bien de lui. Mais vous n'avez pas le budget pour un trajet en bateau et je doute que les français∙es accueillent un mage noir »

Elle pourrait lui cracher au visage. À la place elle s'empare de la bourse qu'il lui tend puis du bras de son petit-fils. 

Elle ne le lâche pas avant qu'iels aient quitté l'école. Gellert n'accorde pas d'importance aux regards curieux de ses ancien∙es camarades face à l'étrange duo qui traverse les couloirs mais il s'exaspère d'être traité comme un enfant. En silence, iels transplannent jusqu'à leurs petite maison brinquebalante devant laquelle le jeune homme est gratifié d'une gifle.

« De la magie noire ! s'exclame Mrs Grindelwald pour introduire sa sérénade. Ton grand père doit se retourner dans sa tombe. Moi qui me disait hier encore que j'avais fait du bon travail avec toi, que tu étais un enfant intelligent, sage et en bonne santé... voilà que je découvre que tu es fou ! »

Inutile de lui rétorquer qu'il n'est pas fou, la veille femme s'est déjà engagée dans un monologue de jurons mêlant anglais et norvégien. Gellert en saisit la moitié, mais ne prend pas la peine de se concentrer dessus. Il se dirige vers sa chambre, une grosse couverture en prévision à la main, mais voilà qu'elle pointe un doigt fripé dans sa direction. 

smalltown boysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant