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ᴅéᴄᴇᴍʙʀᴇ 𝟷𝟾𝟿𝟽

« Un mois ! » clame un garçon du dortoir moins d'une minute après avoir ouvert les yeux.

L'un des santons de bois endormi sur sa table de chevet se réveille en sursaut et donne un coup de coude à deux autres, ils font un pas en direction de la crèche et s'arrêtent pour reprendre leurs position initiale avec l'impression d'avoir fait un très long voyage. Ils ne reprendront pas leurs chemin avant le lendemain matin. 

Depuis le temps, chaque membre de la chambré sait ce que cela signifie : premier jour de décembre. À Noël, les trois personnages s'installeront dans la crèche avec les autres santons et fêteront la naissance de Jesus. Pour elleux, comme pour beaucoup, ce sera un soir de fête. 

Pas pour Albus. Les Noëls chez les Dumbledore, ce sont les deux frères qui essuient les larmes de leurs mère. Celle-ci évoque les lointaines célébrations de Yule dont personne n'est assez âgé∙e pour se souvenir, quand iels étaient une famille comme les autres. Ariana fond en larmes à ce moment là, parce que tout le monde pense que si elle ne parle pas c'est qu'elle ne comprends pas. Alors qu'elle comprends très bien que tout le monde la pense fautive. 

Albus se redresse. Comme toujours il va essayer de faire durer le temps qui filera malgré tout jusqu'à son retour à Godric's Hollow. À partir de ce moment, ce sera interminable. 

Nous sommes jeudi, se souvient Albus. Jour de repos, pour ne rien arranger. Il doit trouver quelque chose à faire s'il ne veut pas passer sa journée à se tordre la tête à propos de sa famille. Ces deux semaines de vacances vont être les vraies semaines de travail. Il les passera enfermé dans sa maison à essayer d'ignorer Aberforth, Ariana et sa mère. Pour couronner le tout, Elphias sera trop occupé pour le voir et dans une petite ville comme Godric's Hollow, se faire de nouveaux amis n'est pas une option. 

Il se dirige vers la bibliothèque d'un air absent. C'est un refuge pour beaucoup et une plaie pour d'autre. Albus s'y sent chez lui, au point qu'il a déjà imaginé devenir bibliothécaire dans une grande ville comme Londres ou Oxford - même s'il n'y est jamais allé, on lui a dit que c'était grandiose. 

Elphias, par contre, n'est pas amis avec les livres. Oh, il lit volontiers de la littérature sorcière, les aventures de Sherlock Holmes ou les romans de H.G. Wells que Albus lui prête. Mais il ne serait pas du genre à s'enfermer dans une pièce croulant sous les livres pour faire des années de recherches sans une très bonne raison. Il préfère faire obtenir le savoir par lui-même pendant un tour du monde. S'il pouvait.

Albus s'installe face à lui et jette un coup d'oeil aux parchemins et manuels étalés sur la table. Il doit être là depuis l'ouverture, on pourrait presque voir de la fumé lui sortir par les oreilles à cause de la migraine. 

« Je comprends pas ! tranche-t-il, en colère. J'essaye d'avoir un résultat juste, mais cette foutue distance est fausse que je divise, soustrait, additionne ou multiplie ! Comment c'est possible que je suive l'exemple du calcul à la lettre mais que ça donne un résultat faux !? 

De l'astronomie. Ici, une histoire de distance entre les étoiles avec l'aide d'une échelle... Le genre d'exercice qui fait regretter les premières années à Poudlard, ou l'astronomie se résumait à comprendre si la position des étoiles conférait plus de magie ou non. Même s'il doit faire lever les yeux au ciel les grands astronomes. 

Albus se penche sur le parchemin et mets un moment à repérer le problème parmi tout les chiffres rayés de taches d'encre noire. 

« Tu n'as pas utilisé le bon théorème... Et tu n'as pas convertit en années lumières. »

Albus en est encore à se demander comment son ami a put calculer un théorème de Pythagore sans le moindre angle droit quand Elphias laisse tomber sa tête dans ses bras. 

« Bon, ça suffit, recopie mon exercice et prends une pause. Je reviens. »

Joignant le geste à la parole, il se lève, dépasse la cession Arts magiques, Magie Amoureuse et Histoire de la Magie pour se saisir de l'ouvrage qui l'intéresse : L'Ombre de Thanatos. Il porte le livre les doigts contre la tranche, de façon à qu'on ne puisse pas lire le titre en argent de la couverture. Non pas que le livre soit interdit, mais son sujet n'est pas anodin. La magie qui entoure la mort est un sujet fascinant, mais trop sombre pour être abordé. 

Il s'apprête à rejoindre son ami quand il croise un regard connu. Œil sombre, œil clair. 

Grindelwald est assis, accoudé à l'une des immenses fenêtres. Il autorise l'autre garçon à venir le voir d'une inclinaison du menton.  Albus garde Elphias dans un coin de sa tête, alors il reste seulement débout devant la table où le jeune homme est installé. 

« Qu'est-ce que tu lis ?

Gellert baisse la tête vers sa veille édition des Contes de Beddle de Barde, les pages jaunies, cornées et annotées. Il relit le conte des trois frères à le connaitre par coeur pour trouver un indice qui lui aurait échappé ou pour ne pas oublier son objectif à chaque fois qu'il est lassé de ses recherches. Il lève le livre en l'air, certain que Dumbledore le reconnaitra. Celui-ci hoche en effet la tête. 

- Et toi ?

Il se mord les lèvres pour peser le pour et le contre, puis finit par tendre l'ouvrage à l'autre garçon. 

Sous le titre, la gravure d'une divinité sombre et ailée qui plonge dans un abyme précède un sous-titre explicatif. La quatrième de couverture est vide d'écriture, seul demeure la représentation d'un crâne qui se brise et se reconstitue. 

- Intriguant. » Commente Gellert. 

Quelque chose en lui le pousse à croire qu'il a besoin de Dumbledore dans son plan. Il ne saurait dire pourquoi, lui, plus que les autres, à quelque chose qui donne envie de le connaitre et de passer des journées à ses cotés... Il est rare que Gellert ressente cela, il est plutôt solitaire en règle générale. 

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« Tu fais quoi ? »

Comme prédit, les jours défilent à une allure hallucinante. Albus serait bien incapable de dire ce qu'il a fait aujourd'hui qu'il fait déjà nuit noire. Il dessine sur son lit, chose rare car il n'a pas de qualité particulière en la question. Mais une image s'est imposée dans sa tête et il a besoin de la coucher sur papier. 

Elle ne ressemble pas tout à fait à ce à quoi elle devrait, aussi il rabat le parchemin contre lui pour qu'Elphias ne voit rien de ce qu'elle représente. 

Trop tard, son ami lui retire des mains, curieux. 

Les traits incarnent un homme ailé, corps criblé de flèches. Albus anticipe toutes sortes de réactions. Ce dessin est trop lugubre, mal fait... et trahi des années d'observation du corps masculin. 

« C'est... beau. réagit seulement Elphias en remettant le croquis à son ami. C'est qui ?

- C'est supposé être Thanatos. Je lis là dessus, en ce moment. 

- Thanatos ?

- L'incarnation de la mort. Chez les grecs. »

Elphias hoche la tête, la première année d'Histoire de la Magie lui reviens. La Grèce antique y occupait une grande place. D'une très ancienne et grande sorcière - Circé - jusqu'au aux noms des constellations. 

« Il m'a fait penser à... ce gars que tu m'as présenté l'autre jour. »

Albus écarquille les yeux et observe son dessin. Il y a en effet des similarités. La longueur des cheveux, un oeil perçant, une certaine froideur dans le visage, une silhouette semblable. Il n'a pourtant eu aucune intention de le reproduire... C'est comme si c'était les lignes qu'il représentait instinctivement. Il ne pense pas à lui tant que ça, n'est-ce pas ? 

L'heure du couvre-feu doit être arrivée car leurs camarades débarquent avant même qu'Albus n'ait le temps de dissimuler sa honte sous son matelas. 

« Tu caches quoi, des trucs érotiques ? 

- C'est une lettre de son père, abruti. » couvre Elphias, alors que son ami reste allongé sur son lit. Paralysé. 

smalltown boysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant