𝟏𝟒 - 𝐏𝐥𝐚𝐲 𝐦𝐲 𝐠𝐚𝐦𝐞.

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𝐂𝐚𝐥𝐝𝐞𝐧.

C'est probablement la poignée de main la plus libératrice de toute ma vie, mais je n'ai aucune envie de m'attarder là-dessus pour l'instant. J'ai tellement réfléchi depuis mon retour en ville que je ne serais pas étonné que ma tête explose sans prévenir, étalant mes idées les plus intimes à la vue de tous. Carly aurait une idée – encore – plus précise de ce que je pense de la nouvelle recrue, ce qui ne serait pas pour nous aider. Mais elle comprendrait peut-être enfin qu'il n'y a pas de « Carly et Calden ».

Putain ! Il faut que je la garde bien au fond de mon pantalon cette fois !

En tout cas, nos paumes jointes me retirent un poids qui n'avait fait que s'alourdir ces derniers jours.

J'avais peur qu'elle refuse de participer à notre sortie. Et puisque je suis un type courageux qui a de la témérité à revendre, j'ai naturellement désigné Miley pour se charger d'inviter l'américaine, et de s'assurer qu'elle ne nous fasse pas faux bond au dernier moment. Mais elle est là. Et si elle brille par sa relative discrétion, personne ne peut louper sa présence. Ce qui n'est pas non plus pour aider mon corps à garder son self-control. Je n'ai pas vraiment de genre de femmes spécifique mais normalement, je les choisis assurées, félines, spontanées et extraverties. Ou plutôt : elles me choisissent et n'ont plus qu'à venir me cueillir, après, éventuellement, un mini jeu de séduction du chat et de la souris, sans que les rôles ne soient clairement définis. Des femmes qui savent ce qu'elles veulent et l'assument ouvertement. C'est généralement le pied au lit vu qu'elles n'y vont pas par quatre chemins. Heaven n'est pas ce genre de filles. Elle a l'air d'avoir son petit caractère – ou alors j'ai l'incroyable (mal)chance d'être le détonateur de son irritation – et pas la drague dans le sang. Ni avec moi, ni avec personne d'ailleurs.

Non, je ne la surveille pas.

Heaven est naturelle, joyeuse mais discrète, lumineuse, organisée alors que pourtant, elle envahit tout, comme si elle était capable d'être à plusieurs endroits à la fois, encore là même quand elle a déjà repris le guidon de sa bicyclette après ses services. Son audace devrait être rangée dans la colonne de ses défauts. Devrait, car mon deuxième cerveau en a décidé autrement. La fille aux longs cheveux châtains soyeux qu'on a envie d'enrouler autour de son poignet a un superpouvoir : celui de me prendre la tête pour un million de raisons. Et là, pendant qu'on se jauge dans une poignée de secondes un peu trop longues pour que ce soit normal, comme pour savoir où cette trêve va nous mener, elle et moi, je me retrouve en apnée dans l'éclat doré de l'auréole entourant ses iris noisette. Sans se parler, je crois qu'on se pose les mêmes questions, et je ne sais plus vraiment si j'ai envie qu'on ait les mêmes motivations, tout à coup.

J'ouvre la bouche quand elle reprend sa main, confuse, nos regards toujours accrochés, le monde extérieur à dix mille miles de mon esprit dépravé. Son odeur de fleur de Tiaré et de coco, avec quelques notes subtiles d'orange, captive mes narines. Il me faut une seconde de plus pour que mes neurones se reconnectent à ma langue.

— Je vais t'expliquer les règles, viens.

Elle acquiesce en hochant la tête mais au lieu de me suivre vers le terrain, je la vois tourner les talons pour rejoindre sa serviette et s'agenouiller. Elle ouvre un grand sac cabas en toile sur lequel deux pandas de dos regardent un coucher de soleil, et en tire un chouchou rose. Avec rapidité et dextérité, elle tresse ses cheveux depuis le haut de son crâne, ajoutant des mèches au fur et à mesure. Mes yeux sont captivés par ses gestes experts. Mon frère se marre doucement derrière moi et fait exploser ma bulle avec une tape solide sur l'épaule.

— Pour le bar, hum ?
— La ferme, Riley. Va voir ailleurs si j'y suis et fous-moi la paix avec ça.
— Tu parles, je saurai surtout où te trouver maintenant, continue-t-il à se foutre de moi à voix basse pour que je sois le seul à l'entendre. Mais fais gaffe à Carly, Calden.
— Je gère je t'ai dit, grommelé-je sans le confronter, tu radotes, ça doit être ton âge. On a discuté, elle sait qu'au Quiet, elle a intérêt à se tenir à carreaux. Et tu te fais des idées.
— On n'est pas au Quiet ici, et mes idées vont très bien, merci.

Falling For Heaven | En pause jusqu'à novembre 2024Où les histoires vivent. Découvrez maintenant