Chapitre 15

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Lorsqu'Allen ouvrit les yeux, il était claqué.

Il avait le dos qui le lançait, comme s'il avait dormi avec un poids au milieu des reins, et il transpirait comme un bœuf. Il grogna entre ses dents en se passant une main sur le front, qu'il trouva chaud. Il n'était pas malade à proprement parler, ce n'était pas ça, c'était comme... un cauchemar, un épuisement physique. Ou ce qui lui arrivait de temps en temps quand il ne dormait que quelques heures à force d'anxiété.

Kanda, assis au coin du lit à fixer dehors, comme fasciné par le paysage, se retourna. Il avait les cheveux détachés dans le dos, ils cascadaient jusqu'à ses reins, et il n'était vêtu que d'une serviette de bain. Il sembla désirable à Allen, naturellement, toutefois, il n'était pas d'humeur. Kanda le toisait avec une sorte de... mépris ?

Oui, c'était ça, son rictus le lui apprenait.

—Tu fais une gueule de déterré. C'était trop pour toi, hier ?

Putain. Il fallait encore que tout se rapporte à la ceinture, avec Kanda ? Agacé, et vaguement blessé qu'il ne se soit même pas aperçu de son mal-être alors que c'était en partie sa faute —enfin, Allen se savait dur sur le coup, mais c'était aussi parce qu'il était un démon beaucoup trop chiant —, il grinça des dents.

—Lâche-moi, Kanda.

—Ça va, je déconne. On t'a vendu des haricots qui voulaient pas cuire, Mo-ya-shi ?

—C'est Allen ! Et je suis pas de bon poil, ce matin, c'est tout.

Kanda soupira.

—Je t'ai laissé dormir, pourtant. Je voulais te réveiller à la première heure. Tu sais qu'il est presque midi ?

—Ah, c'est pour ça que j'ai faim.

Allen caressa son ventre, avec la désagréable impression ridicule d'être une femme enceinte. Il fallait bien remplir cet estomac. Kanda fronça les sourcils, agacé de sa désinvolture. En vérité, Allen mourrait d'envie de se lancer dans une joute verbale avec lui, il ne fallait pas croire le contraire.

Seulement, quand il avait faim, ça dominait tout le reste.

—Tu te bouges, alors ? le tança Kanda. Ou faudrait-il que je te bouge ?

—Sois un peu aimable, j'ai mal dormi, moi, si tu veux tout savoir ! Mais oui, allons manger.

—T'avais qu'à bien dormir.

Insensible, ce démon était d'une insensibilité écoeurante. Allen souffla par le nez ses pensées rageuses, et suivit Kanda dans la salle de bain, pour prendre une douche le temps que le démon s'habillait et reprenait sa forme humaine, l'engueulant allègrement pour ses commentaires déplacés.

Quand Kanda lui fit remarquer qu'avec l'eau qui coulait, il n'entendait pas ses invectives, Allen poussa un grognement, entre le glapissement outré et la colère montante.

Ils continuèrent à se chamailler "gentiment" dans le couloir, dans l'escalier, jusqu'à la réception, jusqu'à la partie restaurant de l'hôtel où ils commandèrent de quoi festoyer. Kanda grogna que la carte coûtait la peau du cul, au moins autant que la chambre.

Le maudit lui fit remarquer que vu que l'argent utilisé n'était pas le sien, ça ne changeait pas grand-chose pour eux. Cela parut agacé l'Asiatique, qui le fusilla méchamment du regard.

Comment allaient-ils s'entendre pendant plusieurs mois de quêtes inlassable ?

***

Ils se rendirent en ville. Allen avouait qu'il avait envie de visiter un peu la région ainsi que la ville d'Alūskne, où ils se trouvaient encore. Il voulait acheter du matériel de camping, Kanda n'ayant aucune représentation de ce qui se faisait à l'époque, il ne pouvait pas en voler pour lui — pour voler des choses, il fallait en avoir une idée conceptuelle concrète, ça, la magie noire et la blanche fonctionnaient pareil.

Le maudit était content de prendre l'air. Il avait chargé Kanda de prendre des provisions.

Finalement, ils avaient arrêté de s'engueuler, ils étaient redescendus en intensité colérique et se parlaient d'un ton plus ou moins agréable maintenant. Kanda n'était pas si casse pied quand il le voulait bien. Il n'était pas souvent disposé à faire des efforts, le maudit s'en rendait déjà compte en trois jours à ses côtés.

Dans le centre ville, de nombreuses boutiques jalonnaient l'allée qu'Allen remontait paisiblement, appréciant son manteau par la température fraîche de l'est Européen. Le ciel était un peu grisé, les rues toutes pavées, peu droites et pentues, et les bâtiments anciens créaient un cadre chaleureux qu'ils allaient pourtant quitter. Il s'approcha d'un marchand qui semblait avoir ce dont il avait besoin, pour sentir une main qui attrapa la sienne.

Allen se prépara à tomber nez à nez avec Kanda, s'il fut surpris de la douceur des membres, lorsqu'il constata le visage d'une fillette aux cheveux violets et courts. Elle portait une sorte de blazer rose pastel, une jupe de même couleur et des collants bariolés. Plutôt mignonne, elle lui souriait.

Il n'eut pas le temps de lui parler qu'elle lui tendit un objet rectangulaire en cuir... son portefeuille ! Merde !

—Vous avez fait tomber ça. Prenez-le.

—Merci beaucoup ! Vous me sauvez la mise.

L'adolescente sourit encore.

—Vous devez avoir la poche troué, ça m'est arrivé la dernière fois, dit-elle en tirant la langue, comme prise en faute, et j'ai jamais retrouvé le mien...

—Merci, vraiment...

Satisfaite, la jeune femme semblait vouloir faire la conversation.

—Vous n'êtes pas d'ici, je me trompe ? Ça fait plaisir de voir d'autres touristes anglophones !

Allen, ma foi peu opposé à l'idée de sociabiliser, consentit à sa sollicitude avec plaisir.

—Oui, je voyage avec... mon ami. Il est parti faire des courses. On explore un peu la région.

—Je vois ! Moi... je suis là pour affaires, mon oncle va peut-être me rejoindre.

Elle lui fit un clin d'œil, qu'Allen ne comprit pas. Il s'étonna brièvement qu'une fille si jeune fasse "des affaires", mais ça ne le regardait pas... Ses parents, sans doute. Elle lui adressa des salutations ainsi qu'un bon courage pour son exploration, et Allen put reprendre ses emplettes.

À suivre...

Note : J'espère que cette petite partie vous aura plu ! J'ai hâte d'écrire la suivante o//.

Un avis, ressenti quelconque ?

Merci d'avoir lu !

Ponzona ||  D. Gray ManOù les histoires vivent. Découvrez maintenant