Chapitre 17

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[ETHAN]

Je n'ai pas eu le temps de débarrasser la table, ni même retirer ne serait-ce qu'une assiette ou le restant d'un couvert. En réalité, je crois qu'Anna n'avait pas envie que je m'affaire à ça. Elle avait d'autres idées, d'autres envies, d'autres désirs, aussi. La porte venait à peine de se fermer qu'elle était déjà déshabillée sous mon regard, à se tortiller pour que je la prenne sur le champ. Et je dois dire que c'est une bonne manière de terminer cette soirée. Baiser pour assouvir ses désirs sans vraiment d'attache, pouvoir y mettre tous les ressentiments et toutes les peines qu'on accumule dans le corps pour se relâcher par la suite.

Alors je l'ai prise contre le bar de la cuisine, parce que c'est ici, que j'imaginais Anna, penchée sur ce meuble à sa place, il y a de cela quelques heures. C'est ici que je m'imaginais à pilonner la brune, à la faire s'excuser pour avoir joué avec moi ainsi. Et peut-être que c'est le vin qui parle, à cet instant, mais je suis énervé. Énervé qu'on ne soit pas allé aussi loin, énervé de ne pas pouvoir la punir d'avoir eu ce genre de comportement avec moi. Parce que j'en voulais plus, j'en voulais beaucoup plus. Alors c'est Ashley qui prend avec en prime, ma colère. Et même si ses cris m'agacent, ne m'encouragent pas tant que ça, je peux enfin libérer toute la colère que j'accumule en moi depuis ce début de soirée catastrophique. Alors je la prends d'abord sur ce bar et par la suite, dans la douche, une dernière fois avant qu'elle ne tombe de fatigue dans le lit. Et je pourrais presque me faire à cette vie, presque, si je n'avais pas Anna sans arrêt dans un coin de ma tête.

Lundi matin, retour au bureau. Le week-end a été long et malgré moi, je ne peux m'empêcher de doucement soupirer en m'infiltrant dans l'immeuble, un cadeau sous la main que j'ai parfaitement emballée et que j'espère, Anna appréciera. Ce n'est pas grand-chose mais je pense que l'attention est là. Après ce dîner, je n'ai pas arrêté de penser à elle, à la manière dont elle s'est comportée. Et ça a réveillé une chose en moi, une chose que je pensais perdue depuis longtemps : ma conscience. Avec un simple geste, elle a réussi à m'éveiller consciemment. Et ça, c'est dingue.

Lentement, je profite qu'elle ne soit pas encore arrivée pour déposer le petit paquet sur son bureau et je souris faiblement. J'espère que l'attention lui plaira, ce n'est pas grand-chose, un mug blanc, basique. Une petite inscription est lisible cependant à l'intérieur, au fond de la tasse :

Juste un café.

Comme un petit clin d'œil à notre phrase fétiche. Elle connaît la suite, pas besoin de lui redire.


[ANNA]

Je n'ai pas dormi de la nuit. Aaron lui s'est effondré de fatigue dans le lit à la seconde où il s'y est couché – mais moi j'ai tourné dans les draps, et j'ai pensé, pensé, pensé encore. Pensé mille heures. J'ai pensé à l'homme couché à côté de moi, et j'ai pensé à Ethan aussi – j'ai pensé au fait que ce n'était pas bien, moralement, de faire l'amour en pensant à autre chose qu'à son petit copain. Ce n'est pas honnête. Quelque part c'est un peu une façon de se tromper ; et c'est pour ça, la nuit blanche, je crois. Quand le jour se lève, j'ai l'impression d'avoir commis un adultère tout pareil que si c'était arrivé en vrai. Je l'ai trompé dans mes pensées. Peut-être me dirait-il que ce n'est pas si grave, les fantasmes ne se contrôlent pas, c'est comme les rêves – mais je crois qu'il serait surtout blessé, et je n'ai plus tant de rancœur contre lui quand il se réveille et qu'il sort du lit pour aller se doucher. Si je repense au vin à quatre dollars ça remonte un peu bien sûr – à part ça j'ai juste de la peine. Des remords aussi, de la culpabilité beaucoup, et finalement je m'extirpe des draps pour aller m'habiller en quatrième vitesse, prendre seulement un fruit dans la corbeille, et laisser un mot sur la table.

Une nuit à Paris - Tome 1 [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant