Chapitre 13

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[ANNA]

Je me suis endormie un peu après lui, ma main passée dans ses cheveux, mes doigts glissés entre ses mèches encore humides de nos étreintes brûlantes. Ensuite les heures ont glissé sur nous, elles sont passées sans qu'on ne voie rien, dans un sommeil lourd et paresseux qui nous a anesthésiés comme un cantique. Le problème c'est qu'au moment où j'ouvre les yeux, le soleil de Paris est beaucoup trop haut dans le ciel. C'était cinq heures du matin, notre réveil. C'était cinq heures, à cinq heures il ne fait pas encore jour – à cinq heures, merde, je souffle en me redressant soudain précipitamment pour tendre la main et attraper mon téléphone.

Il est midi.

On a raté le vol.

— Ethan, j'appelle alors, d'une voix un peu anxieuse.

Un vol de perdu, ce sont des centaines de dollars qui partent en fumée. Il n'y a pas de remboursement pour les gens qui font l'amour trop tard, qui se perdent en étreinte dans les chambres d'hôtel. On n'excuse pas l'amour déraisonné entre un patron et sa secrétaire, et je m'extirpe hors des draps en cherchant mes sous-vêtements avant de me souvenir qu'ils sont pitoyablement restés dans le petit salon de notre suite.

— Ethan, je répète donc, parce que je ne crois pas qu'il ait entendu.

D'un geste j'attrape mon téléphone pour regarder mes mails et voir si la compagnie n'a pas envoyé quelque chose, de mon autre main j'essaye d'enfiler une culotte, puis un jean, une jambe après l'autre en sautillant sur place et finalement le bouton que je ferme en lançant un regard en direction du lit. Il semblerait que l'information lui soit enfin arrivée parce qu'il se redresse, cherche son propre téléphone sur les draps que je trouve sur la commode et que je lui lance doucement pour qu'il l'attrape au vol.

— On a raté le vol. Il est midi.


[ETHAN]

Le temps est passé si vite. Bien trop.

Je n'ai même pas entendu mon réveil ce matin lorsque je dormais encore contre la poitrine d'Anna, peut-être même que je n'ai pas pensé à le mettre la veille et ça m'agace, lorsque je me redresse en sursaut du lit en cherchant mon téléphone pour vérifier. Un merci un peu sec m'échappe lorsqu'elle me le jette et je soupire en glissant ma main dans mes cheveux. Merde. Non. Il était en vibreur et il a sonné approximativement... une dizaine de fois.

On a carrément manqué notre vol, à dormir ainsi. Et pourtant, aucun regret ne me vient à cet instant. Parce que je n'ai pas dormi aussi bien depuis... eh bien, je ne m'en souviens même pas.

D'un regard, je tourne un instant la tête vers Anna et je glisse ma main contre mon propre visage en me grattant un instant mes joues râpeuses. Et le malaise vient, enfin. Il s'installe entre nous deux, créant ainsi un fossé.

— C'était censé être votre rôle. De me réveiller.

Je lui dis, à moitié taquin et plein de reproches alors que je me redresse en grognant un instant. Notre relation est revenue celle que nous avions hier, patron et assistante même si je suis encore nu dans son lit et qu'elle enfile sa chemise. Je détourne finalement le regard et je me redresse et, malgré moi, je suis froid. Parce que ça ne doit pas recommencer. Parce que c'était une erreur. Parce que je ne peux pas laisser une autre femme s'attacher à moi. Parce que je suis son patron.

— Regardez les autres vols disponibles, s'il vous plaît. Je vais aller préparer mes affaires.

Et je quitte la chambre sans un mot de plus en ramassant mes vêtements que j'ai balancé la veille en silence, les sourcils froncés alors qu'un goût amer remonte dans le fond de ma gorge. Mais je ne dois pas craquer. Une fois, rien qu'une fois. C'était ce qu'il nous fallait. À présent, retour à l'instant présent – retour à notre réalité.


Une nuit à Paris - Tome 1 [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant