Chapitre 8

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[ANNA]

Il est donc minuit quand on se retrouve dans la suite qui a été réservée pour nous. Deux chambres séparées mais qui appartiennent à la même suite, il y a un salon aussi, un balcon, un minibar et c'est définitivement plus luxueux que tout ce que j'ai vécu et vu dans ma vie. Pas de ces chambres où l'on entend les voisins coucher ensemble ou bien se hurler dessus, et où l'on voit des petites bêtes courir sur le matelas à la nuit tombée. Sauf que voilà : il est minuit – minuit trente maintenant le temps de signer les papiers, prendre la clef de la chambre et s'installer, et j'ai l'impression qu'il est treize heures. C'est à cause du décalage horaire. On a pourtant une journée entière qui nous attend demain et qui sera longue et éprouvante, mais pour l'instant je ne ressens pas une seule once de fatigue courir dans mes veines, et je m'assois donc sur le petit canapé du salon en ouvrant mon sac pour en sortir ma trousse de toilette et la nuisette que je vais porter cette nuit.

Ethan a pris possession de sa chambre, lui, je crois. On a tous les deux notre propre salle de bain et je vois la porte laissée entrouverte, comme une habitude prise au bureau quand on laisse la porte de nos deux bureaux entrebâillée. J'y passe donc ma tête et je le cherche dans la pièce, esquissant un sourire quand nos regards se croisent. Il a eu la même idée que moi, je crois. Lui aussi tient ses vêtements dans la main, il doit se dire comme moi que l'eau chaude fera peut-être venir le sommeil, qu'une douche appellera la fatigue d'un voyage qui a quand même été éreintant. Je souris donc, et je jette un bref regard à sa chambre tout aussi belle que la mienne avant de reporter mon attention sur lui.

— À demain, alors ?


[ETHAN]

Ma valise maintenant déposée sur le sol, je pense à directement étendre mon linge, pour éviter d'avoir des plis sur mes chemises. Pas que je suis maniaque mais j'aime avoir des vêtements propres et sans plis. Peut-être un peu, alors. Et puis, je n'ai pas envie de faire appel à la blanchisserie de l'hôtel, mes vêtements sont déjà parfaitement pliés et repassés. Pas besoin de main en plus dessus. J'ai pensé à ranger correctement celle-ci pour éviter les plis.

En remarquant qu'Anna passe la tête à travers ma porte entrouverte, je ne peux m'empêcher de doucement sourire. Elle a l'air toute intimidée et je me demande bien ce qu'elle a dans la tête, à cet instant.
Mon regard se plonge ainsi dans le sien et pendant un instant, le temps s'arrête de tourner. À chaque fois qu'on se regarde droit dans les yeux, à chaque fois qu'on ose se poser et observer le regard de l'autre.

— Dormez bien, Anna. Debout à sept heures, demain.

Puis, je me redresse et j'attrape mon pyjama, pour me donner un effet de contenance, pour ne pas montrer que je suis perturbé par sa présence, aussi proche de moi. Certes, on ne dort pas dans la même chambre mais elle sera dans celle à côté de la mienne. Et ça me fait un petit pincement, au bas de mon ventre. Un jogging et un tee-shirt à la main, j'arpente un instant mon regard à la recherche de ma trousse de toilette, que je sais pas très loin de moi. Là, juste sous ma paire de chaussures. Mon pyjama, il fera l'affaire. Certes, il rivalise clairement avec mon look plutôt classique que je porte en général. Pourtant, je m'en fiche. J'aime être à l'aise, le fait de pouvoir bouger librement. Et puis, je n'apprécie pas de dormir presque nu. Les draps sur ma peau me donnent la sensation de m'arracher la peau. Et puis, je pense toujours à tout. Et si un feu venait à se déclencher, hein ? Est-ce que je penserais à me rhabiller ? Sûrement pas. La honte. J'en vois déjà les gros titres.


[ANNA]

Mais évidemment que le sommeil ne vient pas. Évidemment qu'une fois dans mes draps, après avoir pris une douche brûlante et après m'être délaissée du poids de l'angoisse de cette longue journée, je n'arrive pas à dormir. Pour mon esprit c'est comme si l'après-midi commençait tout juste. Alors je passe un temps infiniment long à simplement aller d'application en application, dans le noir, sur mon téléphone qui illumine un pan de mon visage. Rien de bien intéressant, rien de constructif non plus, et lorsque je réalise qu'il est trois heures du matin, je coupe le téléphone pour le reposer sur la table de nuit.

Une nuit à Paris - Tome 1 [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant