Chapitre 21

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La dissolution du convoi fut sobre et rapide. Il était clair que tout le monde n'attendait que ça, mais que personne n'avait osé initier le mouvement. Sandre était tout de même déçue, elle pensait qu'il y aurait un peu plus de monde qui resterait pour aider à retrouver Aeron. Il était pourtant très apprécié de tout le monde, avait rendu énormément de services et avait été déterminant dans le rapprochement effectif entre tous ces peuples. Sans lui, les délégations ne se seraient pas autant mélangées et entendues. Cela aurait des répercussions positives à long terme pour tout le monde. Et c'était sans compter tous ceux qui avaient succombé à son charme ou tout simplement apprécié sa compagnie. Mais tout cela ne pesait apparemment pas grand-chose dans l'esprit de ces gens épuisés et effrayés qui voulaient rentrer chez eux. Il était vrai que ce périple avait bien duré. Mais la voyageuse avait pensé que son ami aurait tout de même un peu plus d'importance que ça à leurs yeux.

Ainsi donc, en plus de Sandre et Dao, restèrent les deux autres Laurussis, Rhya qui avait été relevée de son statut de garde, mais aussi Amuri, une prêtresse du Katien, et deux Timanes, Olari et Kararan. Autant pour les Timanes, la voyageuse comprenait leur présence car elles s'étaient profondément liées avec Aeron pendant le voyage, autant pour Amuri elle n'était pas sûre de saisir ses motivations. Peut-être une amante ? Ou peut-être simplement l'envie de prolonger l'aventure. Au vu de l'ambiance austère générale dans la délégation du Katien, la voyageuse pouvait imaginer le besoin de vouloir s'en éloigner. Et puis, elle s'entendait bien avec Dao.

Damara avait clairement hésité aussi à rester, mais n'était pas très à l'aise avec cette idée. La chasseuse voulait rester libre de toute attache, et s'éterniser à Lochkov pour être avec Sandre allait à l'encontre de cette idée. Cette dernière comprenait très bien et coupa d'ailleurs court au dilemme de son amie, en lui confiant une lettre qu'elle devrait remettre à Sunda au plus vite. Elle l'avait faite écrire par Dao, et résumait les résultats de ses investigations sur les dieux, leurs marques et l'art occulte qu'utilisait Ioni. Elle avait joint une poignée de ces talismans en papier qui jonchaient le sol après l'affrontement. Damara prit le petit paquet, un air reconnaissant sur le visage, puis les deux femmes se firent leurs adieux avec une étreinte franche et vigoureuse qu'elles évitèrent cependant d'éterniser.

Tout le monde avait des gens dont il était difficile de se séparer. Pour Sandre, en plus de Damara, il y avait ses anciens compagnons tithoniens. Ceux avec qui elle n'avait passé qu'une semaine, mais avec qui des liens de camaraderie très forts s'étaient forgés. Certains étaient déjà partis, tombés au combat ou ayant rejoint Kimmer dans l'armée de mercenaires. Mais avec ceux qui étaient encore là, la voyageuse échangea des au-revoir sincères, emprunts du désir réel de se revoir. La complicité avec ces soldats allait lui manquer.

Mais la séparation la plus difficile fut celle de Telych et Qetilid. Il y avait quelque chose de physiquement douloureux à regarder ces deux-là s'arracher l'un à l'autre. Ils n'en n'avaient pas envie. Ils étaient serrés l'un contre l'autre, se murmurant des choses à voix basse. Probablement des promesses de se retrouver le plus vite possible. L'engagement de la chamane à retrouver Aeron était indiscutable, et son compagnon voulut rester près d'elle. Malheureusement la délégation olénéquie ne l'accepta pas. Qetilid était certes libre de faire ce qu'il voulait, mais il avait des obligations et responsabilités auprès de sa nation d'adoption, et ses représentants ne se gênèrent pas de les lui rappeler. Ils firent tout ce qu'ils purent pour retenir leur précieux djinn. Sandre ne comprenait pas pourquoi ce dernier ne les avait pas envoyés se faire voir. Bon sang, s'il s'absentait quelques temps, ce ne serait pas la fin du monde. Tandis que là, en faisait pression sur le djinn pour qu'il reste avec les siens, les Olénéquis risquaient de créer une grosse rancœur chez lui. Mais ça n'était pas ses affaires et Sandre se contenta de saluer chaleureusement Jiangshan, la remerciant encore pour son aide précieuse.

T4 - Le MonstreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant