T4 - Le Monstre

Chapitre 26

La soirée avait été douchée par les révélations de Sandre à propos de la trahison du demi-elfe. Dao savait qu'elle avait prévu d'en parler, ils avaient même pris cette décision ensemble, mais il aurait préféré qu'elle choisisse un autre moment. Le lendemain aurait amplement suffi. Il le lui dit d'ailleurs au moment d'aller se coucher, une fois qu'ils furent à nouveau seuls ensemble et qu'ils se dirigeaient vers l'endroit qu'elle avait installé pour eux. Elle lui rétorqua que si elle avait attendu le dernier moment, Caleb se serait fait sauter à la gorge en arrivant le lendemain. Là ils avaient le temps de digérer l'information, de voir ce qu'ils voudraient en faire, et d'avoir un comportement à peu près sous contrôle quand le demi-elfe arriverait.

- Et puis, on aura tout le temps de faire la fête au coin du feu quand Aeron sera de retour.

A cette remarque, Dao s'arrêta et prit soudainement sa compagne dans ses bras pour la serrer silencieusement contre lui. Elle sembla surprise par ce mouvement mais s'adoucit très vite, le serrant très fort à son tour. Il commençait à devenir plutôt bon pour déchiffrer les réactions cryptiques de la voyageuse : elle se faisait un sang d'encre pour Aeron et ressentait de la culpabilité à l'idée de s'amuser alors qu'il était retenu prisonnier. Et son raisonnement vis-à-vis de Caleb était pertinent et pragmatique, comme toujours avec elle.
Il l'embrassa tendrement mais elle l'interrompit très vite.

- Attends, allons nous installer, j'ai trouvé un joli coin.

Elle le prit par la main et l'entraîna vers un arbre à l'écart du reste du campement. Un bel arbre aux branches tombantes, leur offrant une petite bulle d'intimité, sans les couper de la lumière des étoiles. La voyageuse avait également creusé une petite tranchée dans le sol, qu'elle avait agrémentée de couvertures et fourrures.

- Je sais pas si tu seras aussi frileux que dans les montagnes, mais j'ai préféré pas prendre de risque...

Le jeune elfe fut très touché par l'attention et ne put s'empêcher de sourire en se remémorant la période où ils dormaient comme ça tous les deux. Avant qu'ils ne soient ensemble. Il s'agenouilla près de la couche de fortune. La voyageuse y avait disposé quelques fleurs fraîches, donnant une touche magique et romantique à l'endroit. La très terre-à-terre Sandre n'était pas particulièrement portée sur les fleurs ou la présentation, aussi Dao fut-il ému par cette attention. Il les ramassa délicatement et inspira leur parfum subtil, un grand sourire sur son visage. Devant son silence, la voyageuse commençait à se sentir embarrassée.

- Il me semblait que t'aimais bien ce genre de choses. C'est trop ?
- Non Sandre, c'est parfait, merci pour votre attention. Cet endroit est magnifique !

Il se leva pour l'embrasser avec douceur. Il avait tellement de chance de l'avoir. Ils se couchèrent en se faisant face. Elle glissa l'une de ses jambes entre les siennes et posa une main dans le creux de son dos, l'attirant contre elle. Leurs visages s'approchant tout doucement, leurs lèvres se frôlant. Ils s'arrêtèrent un instant, au bord de ce baiser. Ils étaient tous les deux conscients qu'ils étaient en train de rejouer ce moment qu'ils avaient partagé dans les Laurussia, une éternité auparavant. Ce qui aurait été leur premier baiser si Dao n'avait pas paniqué.

Ils restèrent ainsi en suspens quelques secondes, savourant la sensation, se rappelant ce moment qui avait marqué leur histoire lorsqu'elle était encore naissante. Contemplant le chemin parcouru, ce chemin auquel ils n'auraient pas cru si on leur en avait parlé à l'époque. Dao mesurait à quel point ils avaient partagé beaucoup de choses, à quel point leur amour était fort, à quel point elle était devenue centrale dans sa vie.

Puis ils s'embrassèrent lentement, tout doucement, se déshabillèrent et firent l'amour. Sandre prit le contrôle et se montra très attentive au plaisir du jeune elfe, comme souvent, mais de manière particulièrement douce et affectueuse. Enveloppante, rassurante. Dao se sentit à nouveau ému par les efforts qu'elle faisait pour lui et se demanda si cela cachait quelque chose, avant de ne plus être capable de penser à cause du plaisir.