Chapitre 4 - Rancune et boîte à musique

24 1 44
                                    

Cher lecteur, quelques mots avant que tu ne commences ce chapitre. Cette fiction est la republication d'une histoire que j'ai commencée en 2018 et qui est actuellement toujours en cours d'écriture. La plupart des chapitres sont publiés sur une autre plateforme, mais compte tenu de la fréquentation en forte décroissance de cette dernière, en particulier par le public francophone, j'ai décidé de me tourner vers Wattpad. C'est aussi l'occasion pour moi de relire et corriger des écrits qui datent de quelques années maintenant.

En te souhaitant une bonne lecture.

***

La lumière tamisée du bureau redouble celle du soleil couchant, et se reflète sur les boiseries avec un certain panache. Ça sent le luxe, l'argent, le pouvoir fait pour intimider. Mieux. Écraser.

Face à la vitre qui domine toute la ville, et montrant ainsi qui en est le réel patron, Ougai Mori les attend. Son manteau noir crée comme une aura ténébreuse autour de lui, et quand il se tourne, le soleil couchant nimbe sa silhouette d'or. Aucun doute qu'il aime la mise en scène.

La fille sourit en son fort intérieur et tente de garder sa contenance. Avec une lenteur calculée, la silhouette de Taneda Santouka la dépasse et s'approche de Mori pour lui serrer la main. C'est désormais lui qui est auréolé de lumière, mais l'effet n'est pas le même. Sa carrure est trop massive, pas assez élancée.

Les deux hommes s'accordent d'un hochement de tête et se dirigent vers deux fauteuils pendant que leurs gardes respectifs se tiennent derrière eux.

La fille n'a pas peur. Elle n'a pas peur puisqu'elle n'est pas seule, puisqu'elle sent son arme de service contre sa cuisse et tous ses sens prêts à la protéger. Voilà bien longtemps qu'elle n'a plus peur et que son estomac ne se tord plus avant chaque ordre de mission.

C'est ce qu'elle se répète en réalisant que le simple fait de se le dire prouve qu'elle a tort. La rencontre d'aujourd'hui n'est pas anodine, elle est même déterminante, et elle sait que le moindre faux pas pourrait tous les conduire au désastre. Elle n'a pas peur, non, mais elle est inquiète.

C'est en réalisant cela qu'elle croise son regard. Il a la même couleur que les boiseries au soleil couchant, mais il n'y a aucune chaleur dans l'unique iris qui la fixe sans ciller. Contrairement aux autres hommes en noir, il se tient en retrait et se fond presque dans l'ombre qui envahit le bureau à mesure que la nuit s'étend sur la ville. Ce n'est pas la première fois qu'elle le voit, elle le sait. Sur presque chaque scène de crime, chaque affaire liée à la mafia, elle peut reconnaître sa signature. Celle d'un être trempé dans l'acier, sans la moindre compassion, la moindre hésitation, pour qui tuer est une seconde nature.

Osamu Dazai. Le fléau de la mafia portuaire.

Même ses semblables l'ont surnommé « le démon », et le fait est que son œil fixe, aux derniers rayons du crépuscule, semblerait presque rouge. Les bandages qui enserrent son visage de poupin ne font qu'accentuer l'étrangeté et le malaise qu'il dégage. Comme s'il portait un masque.

La fille sait qu'au moindre signe de Mori, il n'hésitera pas à presser sur la gâchette. Parce que ce n'est pas un homme qui se tient en face d'elle, mais une machine.

La première fois que j'ai vu Osamu Dazai, je n'ai pas su quoi penser. Je me suis seulement dit que si le mal avait un visage, ce serait probablement le sien. Parce que mis à part les bandages qui en dissimulaient la moitié, il n'avait aucune imperfection.

Osamu Dazai avait les traits d'une rare finesse, l'œil vif et le sourire facile. Mais derrière la façade qu'il affichait, je voyais quelque chose de froid, de noir, très noir. Aux limites de l'inhumain.

Bungou Stray Dogs - La Déchéance d'un hommeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant