Chapitre 26 - Ramener celui qui s'est perdu

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Un bon moment déjà qu'il aurait dû se rendre dans ce refuge de tarés pour tout retourner. Pour une fois qu'il approuvait l'une des décisions de Mori...

Ils n'avaient pas atteint l'entrée de l'institut que l'odeur lui donnait déjà la nausée. Chuuya n'aimait pas les hôpitaux. Il se sentait toujours mal à l'aise en la présence de malades... en particulier ceux qui n'étaient pas bien dans leur tête. Il avait vu Dazai craquer trop souvent. Il avait trop souvent eu peur de le voir passer l'arme à gauche à force de souffrir à l'intérieur de lui. Pas étonnant qu'il ait atterri ici...

Le regard vide des pensionnaires qu'ils croisèrent dans les jardins ne fit qu'accentuer son malaise. Il pressa le pas, s'attirant une remontrance de la part de Hirotsu.

– C'est ça d'avoir des vieux os papi ! » rétorqua-t-il.

La présence de Mori semblait avoir déjà fait son effet, et nombre de médecins s'étaient réunis sous le porche de l'établissement pour les accueillir, sourire crispés aux lèvres. S'il en avait eu l'autorisation, Chuuya les aurait tous étripés. Les faiseurs de bonne santé, maîtres de la bienpensance. Au lieu de cela, il cracha par terre.

– Où est le directeur ? » se contenta de lâcher le boss de la Mafia portuaire, avec une déférence qui fit pâlir le reste du personnel.

– Il... il est dans son bureau... » marmonna une infirmière.

– Voyez-vous cela... Toi ! » lança-t-il en montrant du doigt un homme en blouse blanche et au crâne dégarni. « Emmène nous là-bas. »

Chuuya crut que le concerné allait tourner de l'oeil, et c'est d'un pas tremblant qu'il les fit traverser les couloirs puants au blanc tranchant et aux néons défectueux.

– Très éloigné pour un bureau de directeur, non ? » fit-il remarquer tout en constatant qu'ils marchaient depuis cinq bonnes minutes sans le moindre directeur en vue.

– Dozen-senpai a besoin de calme... vous comprenez ?

– Non.

Non. Et plus il resterait dans cet endroit, plus il aurait la nausée, et plus cela le rendrait agressif. Mori sembla saisir son malaise et lui lança un regard entendu qui le surprit de la part d'un homme qui n'avait jamais vécu que pour lui-même. Il fallait dire que tout dans cette situation tenait de l'exclusif.

Lorsqu'ils arrivèrent enfin devant la dite porte, sans doute la plus belle de tout le bâtiment avec ses panneaux en bois sculpté et son joli écriteau affichant en lettres d'or le nom de Tayama Dozen, il se fit un plaisir de l'enfoncer si violemment qu'elle se décrocha de ses gonds pour s'écraser en deux morceaux dans la pièce.

– Toc toc », ironisa Hirotsu.

– C'est pour un entretien », ajouta Mori avec son sourire le plus effrayant.

Derrière un bureau massif qui cachait pratiquement toute sa silhouette se tenait un petit homme tremblant, gros et gras, et aux cheveux luisants de gomina.

– Qu'... qui êtes-vous ? » bredouilla-t-il. « Qui vous a permis de rentrer dans cet établissement ? »

– Nous-mêmes », rétorqua Mori en s'avançant vers lui d'un pas félin pour se pencher vers son visage bouffi, les deux mains posées sur le bureau.

– Nous avons quelques questions au sujet de l'un de vos anciens pensionnaires.

***

La mort dans mes entrailles, celle qui joue avec mes os, les fibres de mes nerfs et le sang dans mes organes, je sais qu'elle était déjà présente dans la chair de la femme qui m'a portée. C'est ce qu'on m'a dit, et je sais que c'est vrai.

Bungou Stray Dogs - La Déchéance d'un hommeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant