Chapitre 5

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Je viens de rentrer de la capitale. Ma mère est venue me chercher à la gare et c'est comme si toutes mes angoisses s'étaient ré-emplifiées. Cette micro bulle que j'avais créé chez ma mamie s'est maintenant percée et l'envie de me faire du mal me démange. De plus que ma mère m'emmène au lycée pour que je récupère les cours de la semaine. Je ne voix pas l'intérêt sachant que je ne vais pas être là pendant trois mois. Tant que ma mère pense faire le meilleur pour moi, je ferais ce qu'elle me demande. 

Salut Li, je vais passer au lycée récupérer des cours, est ce que tu seras toujours là ? Je sors de la gare, je devrais être là dans 15 min . 

Hey mon pote, tu m'as trop manqué ! J'ai pas osé de déranger pendant ta semaine chez ta famille, j'espère que ça t'as fait du bien. Par contre je te préviens, Elliot n'a pas arrêté de parler de toi et il a su je ne sais comment que tu allé aller à la clinique à côté du lycée. Je suis désolé... Et en plus on a finit plus tôt aujourd'hui parce le devoir de Mme Tivoli a été reporté donc non je ne serais pas là...

C'est pas possible, c'est un cauchemar. Non. Je fonce droit dans la gueule du loup et je n'ai rien pour me défendre. 

Euh dis maman, t'es sur que je dois aller récupérer mes cours chez les CPE ? On ne pourrais pas directement rentrer à la maison ? Je suis fatigué du voyage... 

Ecoute Harry, on ne sait pas encore quand est ce que tu vas rentrer dans la clinique alors je préfère que tu ne prenne pas du retard sur tes cours pour rien. Ca ne te prendra que quelques minutes d'aller les chercher et en plus c'est sur notre chemin, fais un petit effort. 

Je ne répond pas, ça ne sert à rien. Dès que ma mère, comme mon père d'ailleurs, prend un décision, elle ne revient pas dessus et ce n'est plus négociable. Mon ventre se serre et les larmes me montent aux yeux. Je me mord la joue par reflexe en attendant patiemment. 

Je monte les escaliers, la tête toujours baissée. Toutefois, les derniers lycéens me repèrent et j'entends leurs murmures  me concernant. 

Tu sais qu'il va être interné dans cet institut pour les anorexiques ? Apparemment il aurait essayé de se suicider...

Je soupir et accélère, je ne suis même pas encore parti dans cette clinique que le lycée entier fait son propre diagnostic de ce qui cloche chez moi. Je m'étais pourtant dis que le lycée était un nouveau départ, un endroit où je pourrais enfin me faire des amis pour la vie et trouver un certain bonheur mais c'est tout l'inverse.  C'est vraiment la preuve que c'est moi qui aie un problème sinon pourquoi tout ces gens qui ne me connaissent pas me traiteraient comme ca ? Je devrais peut être réessayer, une bonne fois pour toute.

Je suis coupée de mes pensées par la CPE qui m'aperçoit et m'oblige à rentrer dans son bureau. Elle insiste sur le fait qu'il n'y a aucun problème à ce que j'aille dans cette clinique. Je m'arrête d'écouter à ce moment là, je ne veux pas de sa pitié. Elle est au courant, tant mieux pour elle mais qu'elle ne croit pas qu'elle est devenue ma meilleure amie. C'est comme si les gens croyait qu'ils peuvent sauver tout le monde parce qu'ils connaissent telle personne qui a vécu tel traumatisme. C'est super mais moi je n'ai besoin de personne, je m'en sors très bien par moi même. Enervé, je récupère mes papiers de cours et sors du bâtiment en vitesse. Je suis fatigué et énervé, mes larmes me démangent et je ne pense qu'à me soulager. Ma mère le sent et ne dis pas un mot sur le trajet du retour. 

Je suis dans la salle de bain, je m'y suis réfugié avec le prétexte de prendre un bain. Je pensais simplement me couper et laisser l'eau chaude me détendre mais lorsque je suis rentré dans la pièce la balance m'a appelée. Je ne me suis pas pesé pendant toute la semaine où j'étais chez ma mamie. Ca ne m'arrive plus de ne pas me peser au moins une fois par jour. J'ai peur, je suis même terrorisé. J'ai mangé au moins un repas par jour chez elle et je n'osais pas vomir de peur qu'elle ne m'entende. Je ne veux pas reprendre du poids, j'ai déjà assez du mal à supporter le fait d'en perdre si lentement. Je pose alors mes affaires sur le comptoir où se trouvent les lavabos avant de me déshabiller lentement. C'est un moment délicat, mes yeux se posent sur mon corps et je n'ai plus seulement la sensation d'être gros mais je le vois. Cette vision me dégoûte et je ferme les yeux laissant les larmes couler, personne ne peut me voire. Je prend une grande respiration et pose mes deux pieds sur la balance. Je ne regarde pas tout de suite, je fixe le porte serviette devant moi priant pour que le chiffre est baissé. Quand le bip finale se fait retentir j'ai le sentiment que quelqu'un est prêt à me tuer. 

51,278 kg. 

Le soulagement, le bonheur. Je souris en descendant de la balance. J'ai perdu presque 1 kilos. Je vais peut être réussir à atteindre mon objectif finalement. C'est comme une bulle d'oxygène, un pensement qui vient apaiser mon cœur à tel point que j'entre directement sous la douche au lieu de m'assoir pour me couper. 

Toutefois, la réalité me frappe bien vite car quand je sors de la salle de bain je n'ai que le temps de m'habiller avant que ma mère m'appelle pour diner. Elle sait que je n'ai pas manger dans le train et elle m'oblige à manger au moins une fois par jour. Je n'en ai pas envie, non, pas après avoir vu que j'avais réussis à perdre un peu de moi, enfin sur la balance... 

Quand j'arrive en bas, emmitouflé dans mon pyjama qui me réchauffe à peine, mon père est dans le salon un verre à la main. Sa journée a dû être longue et en plus, je suis là avec mon insécurité. Je suis tellement mal à l'aise de lui rajouter ce poids en plus. J'aimerais tellement repartir en montagne avec lui, regarder des vieux films et juste pouvoir retrouver notre complicité. Ma déception me brise et je préfère me diriger vers mes chiens que d'affronter la scène. Leur douceur me permet de me recomposer avant de partir m'assoir à table. 

Je tourne ma cuillère dans mon bol de soupe, j'ai mis une série policière pour occuper le repas et éviter une potentielle conversation gênante. Je vois néanmoins parfaitement les coups de regard que me lance ma mère à chaque fin de phrase des personnages. Lorsque j'ai voulu commencer à perdre du poids, je me forçais à manger devant elle puis j'allais vomir mais quand à un repas j'ai répété ce processus et que je suis redescendu des toilettes je l'ai vu pleurer, j'ai cru mourir de la peine que je lui créait. Aujourd'hui elle sait et ne dit rien, elle essaye de faire des plats les plus soft possible afin que je puisse manger un peu. Au moins à la clinique dans leur réfectoire, je pourrais manger comme bon me semble et je n'aurais plus à supporter ces regards et les soupirs de mon père. 

On est malades.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant