Chapitre 6

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Ma valise est dans le coffre, mes mains tremblent et une boule se forme dans ma poitrine. Le trajet est court, bien trop court. Mon admission a été prévue à neuf heure et il est huit heure cinquante et une. Ma mère se gare devant le bâtiment et se tourne vers moi alors que je garde la tête baissée.

Harry, donne leur une chance s'il te plait...

J'acquiesce alors que la boule dans ma poitrine remonte dans ma gorge m'empêchant de parler.  Nous étions en vacances dans les Alpes quand ils ont appelé pour nous informer qu'une place était disponible pour le trois janvier, ma mère s'est donc empressée de remplir mon dossier. Je me retrouve donc ici, trainant ma valise jusqu'à l'accueil. J'écoute vaguement l'échange entre ma mère et la secrétaire avant de rejoindre le bâtiment que cette dernière nous a indiqué. Dans l'ascenseur la tension est palpable. Ma mère est presque excitée, comme si en me laissant ici pour une durée indéterminée elle allé récupérer un nouveau Harry. J'ai presque envie de me moquer d'elle et de son aire naïf mais l'ouverture des portes m'en empêche. Mon angoisse reprend le dessus quand je reconnais le service et que la réalité me frappe. 

Après avoir encore rempli des papiers ma mère m'a enlacé en m'assurant qu'elle viendrait tous les jours pour me soutenir et que j'allais m'en sortir. Je ne comprend pas pourquoi elle ne fait que de répéter que je vais me sortir de quelque chose, toute cette situation je la mérite, je n'ai pas à m'en sortir. Je ne lui ai donc répondu que vaguement et je l'ai regardé me laisser là, au milieu de ce couloir avec ma valise. 

Les infirmière se sont alors approchées de moi récupérant mon téléphone avant de m'indiquer de les suivre vers ma future chambre. Elles m'ont expliqué le fonctionnement et le règlement avant de fouiller ma valise afin de vérifier que je n'avais apporter ni lames, ni médicaments. Je ne suis pas fou, je m'en doutais parfaitement, mes lames sont dans la poche de mon jean, je ne peux pas simplement arrêter comme ça, la douleur me soulage beaucoup trop. 

Lorsqu'elles sortent de ma chambre je me retrouve seul. Il n'y a rien à faire et on ne m'a pas encore présenté aux autres. Sans téléphone ni occupations je me permet de m'allonger sur mon petit lit. C'est un grand vide qui s'empare de moi et la peur que mes pensées prennent le dessus monte en moi. Pourquoi est ce que j'ai accepté, je ne veux pas m'en sortir et maintenant on m'annonce qu'on va me surveiller quotidiennement. L'angoisse me submerge et je me recroqueville dans le petit lit laissant les larmes couler. 

Je me suis endormi toute la matinée puisque ce sont des coups à la porte qui me réveillent. De mes yeux gonflés et de ma voix enrouées par les larmes je tente de répondre. L'infirmière du nom de Charlotte entre en souriant. 

Harry ? C'est l'heure du déjeuné. Pendant ces deux jours ou tu dois rester dans ta chambre tu vas manger avec nous dans la cuisine du service puis si l'avis du docteur Marie est bon tu pourras aller manger avec les autres au réfectoire. 

Elle marque une pause comme pour voire ma réaction mais je ne bouge pas comme tétanisé. Il faut que je fasse semblant pendant deux jours. Deux jours Harry. Je souffle avant de lui sourire comme pour lui dire qu'il n'y a aucun problème. 

Ok, dans ce cas rejoins nous dans quinze minutes dans la cuisine, en face de notre bureau.  

Elle repart en souriant mais si lentement que j'ai l'impression que je vais exploser de rage. Dès qu'elle ferme la porte je me lève brutalement et commence à faire les cent pas. Dans ma chambre je n'ai seulement qu'un lavabo, les toilettes et les douches sont communs. Comment vais-je me faire vomir ? Non, non, non, c'est un cauchemar. En plus, je suis sûr qu'ils vont vouloir que je mange un repas complet cuisiné dans de l'huile et salé. Non je ne peux pas. 

Je me retrouve ainsi devant un plateau composé d'une salade de tomate, de pommes de terre avec un steak haché, un yaourt et une tarte aux pommes. Je suis déjà là depuis dix minutes que je n'ai réussis à avaler qu'une tomate. 

Harry ? Tout va bien ? Tu n'aime pas les pommes de terre ? 

Non, non je n'aime pas les pommes de terre ou les tomates ou la viande ou le yaourt ou la tarte. Je n'aime rien. 

Euh je suis végétarien, est ce que je peux ne manger que les légumes ? 

Oh ok Harry, oui bien sur. On va le noter et le faire savoir, ne t'inquiète pas. 

Je souris en réponse avant d'essayer de reprendre une bouchée. S'il pourrait faire savoir que je ne mange rien ce serait davantage utile. Je replonge ma tête vers mon plateau. Je coupe encore et encore la nourriture en l'étalant dans l'assiette mais les infirmiers ne sont pas dupes. Je les entends discuter de sujets random comme pour me laisser de l'espace mais je vois parfaitement leurs regards concernés à répétition. 

Est ce que tu as des difficultés à t'alimenter Harry ? 

Ca y est, on y est. Trouve une excuse Harry, ne les laisse t'obliger à manger. 

Euh non non tout va bien c'est juste le stress d'arriver ici je n'ai pas très faim, je mangerais plus ce soir. 

Super, maintenant je vais être obligé de tout manger ce soir. De toute façon j'irai prendre ma douche et je pourrai utiliser les toilettes qui sont à côté pour y vomir. Espérons que je puisse attendre ce moment et non pas leur vomir dessus. 

Essaye quand même de finir ta salade ou de manger quelques pommes de terre. 

Je lève les yeux mais les rebaisse immédiatement afin qu'elle ne voit pas ma détresse. Je respire doucement et sans réfléchir je pique quelques pommes de terre avant de les avaler d'une traite. Je le regrette aussi tôt quand un haut le cœur me traverse, je serre alors du plus fort la fourchette pour ne pas tout recracher. Au bout de quelques secondes la sensation disparait mais le remord s'installe et les larmes me montent aux yeux. Par reflexe, je mord l'intérieur de ma joue, je vais finir par avoir une marque c'est pas possible. 

L'après-midi se fait encore plus longue avec la pensée d'avoir mangé. Je me tourne et me retourne dans mon lit me serrant le ventre le plus fort possible, cette sensation d'avoir quelque chose dans le ventre me gène et je ne sais pas quoi faire. Mes ongles s'enfoncent le long de mes avant bras et la douleur m'apaise. Ma tête se concentre enfin sur autre chose et j'ai le sentiment de respirer à nouveau. Me redressant contre le mur je plaque mes genoux à mon torse et continue de gratter les croûtes de mes plus récentes plaies. Lorsqu'il ne reste plus rien à ouvrir et que le sang coule délicatement le long de mon avant bras puis sur mes mains je laisse ma tête tomber en arrière me concentrant sur la douleur aigue qui m'apaise. 


On est malades.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant