Chapitre 23 - Steven - La lumière dans la nuit

74 16 91
                                    


Je rentrai des cours, et m'effondrai sur le canapé, épuisé. Il était dix-huit heures. Allez, plus que quatre heures à tenir, pensé-je.

-Vas chercher ta sœur,  m'ordonna ma mère. Je parie que tu l'as encore oublié je me trompe ?

-Mais maman on avait dit que c'était à ton tour de la chercher aujourd'hui. J'ai bac blanc demain tu te souviens ?

Son regard acéré me fit ravaler mes paroles. 

-Oh, peu importe le bac, on sait tous les deux que tu ne l'auras pas de toute façon, répondit-elle froidement.

Je pris mes clefs et repartis en direction de l'école primaire de ma sœur. La surveillante me regarda d'une façon douce avec une pointe de pitié  qui me fit détourner les yeux. Elle me voyait tous les jours à la grille, je n'étais pas son père mais j'en tenais le rôle. Ma sœur attendait, serrant contre elle son doudou, et chercha des yeux maman, une expression d'espoir sur son visage. Elle ne s'était pas encore faite à l'idée qu'elle ne viendrait plus.

-Tu m'avais oublié ? Me demanda ma sœur.

La peine dans sa voix me fendit le cœur. Je ne pouvais pas lui dire que maman devait la chercher aujourd'hui. Lui avouer qu'elle la négligeait lui aurait brisé le cœur. Je ne l'aurais pas supporté.

Je m'agenouillais.

-Non, non bien sûr que non, voyons. Mes cours se sont finis plus tard aujourd'hui c'est pour ça. Désolé d'être venu en retard. 

Je pris son sac à dos rose et lui pris la main. Je savais pertinemment que je n'aurais pas le temps de réviser pour l'examen. J'allais rater mon bac de toute façon, c'est ce qu'elle disait. 


Je m'allongeai sur mon lit, mes écouteurs dans les oreilles. Enfin. Je pouvais laisser libre cours à mes pensées. Je repensai à ma journée et un sourire naquit sur mes lèvres. J'avais bien rigolé avec mes potes. Je me tapai une barre devant twitter.

Quelques minutes après, pourtant, la musique changea. Une larme, puis deux coulèrent sur mes joues. J'avais redouté et attendu ce moment toute la journée. Il n'y avait que le soir où je montrais mes émotions, où je m'autorisais à être faible. La nuit restait le pire moment, mon armure se fissurait laissait entrevoir mes douleurs et mes peines.  La souffrance revenait, accentuée par un atroce sentiment de solitude.

Je passais mes journées à rire, et à faire rire les gens, mais mes soirées à pleurer. Ils ne voyaient pas ma solitude derrière le masque, ils ne me connaissaient pas vraiment dans le fond, y compris mes amis les plus proches.  Sauf peut-être Iris, elle me manquait ces derniers temps, nous étions  ensemble en cours mais notre relation avait changé, elle était devenue empreinte de timidité. Je voulais que cela redevienne comme avant mais je ne savais pas comment y parvenir.

C'était mon mécanisme de défense, mon moyen de me protéger. Ils pensaient tous que ma vie se résumait à une éternelle fête, une soirée prolongée. Dans leurs tête, et dans celle de mes amis, j'étais  Steven drôle, heureux, qui ne se souciait de rien et était toujours là pour remonter le morale des autres. Mais personne ne savait ce qu'il se cachait derrière ce masque. Les nuits entières et terrifiantes que je passais, réveillé jusqu'à trois heures du matin pour éloigner ces démons du passé.  Au fond,  j'étais seul et  j'aimerais juste que quelqu'un vienne m'aider.

Je n'avais pas le choix : rire me permettait de tenir. C'était tellement la merde ici, la violence psychologique me broyait de l'intérieur. Mes parents s'étaient ligués contre moi depuis ma maladie,  j'étais une tare, l'erreur dans le programme de leur vie, et ils me le faisaient payer. 

Singulier - [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant