Chapitre 52 - Iris

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Quelques mois plus tard, je passais par le commissariat pour donner les derniers éléments de preuves que j'avais récoltés sur Élodie, ainsi que les indices m'ayant permis de retrouver Ethan,  qui seraient transmis au parquet pour l'instruction des crimes.

J'avais décidé de ne pas témoigner au tribunal. La remarque d'Ethan était encore bien vive à mon esprit et je n'avais vraiment pas envie de le croiser.

-Iris?

Je me retournai. En parlant du loup, sa mère  se trouvait à quelques mètres de là, près de sa voiture, sur le parking du commissariat.

J'hésitai à la rejoindre. Certes j'avais aidé à retrouver son fils mais il me tenait également pour pleinement responsable des atrocités qu'il avait subies.

Elle s'approcha d'elle-même. Je n'eus pas à faire de choix.

-Tu vas bien ?

Ses yeux gris soucieux m'examinèrent. Depuis l'enquête j'avais perdu quelques kilos dûs au stress et j'avais gagné en cernes. Je transportais désormais des valises sous mes yeux, le même poids que le bagage que je portais désormais.

Je ne savais pas comment me comporter, comment réagir à sa présence. Elle devait me détester. Je me détestais.

-Tu as de sacrés cernes.

Sa bouche s'étira en une tentative de sourire, mais en voyant mon épuisement ses efforts  retombèrent vite.

-Je voulais te dire... je voulais te dire merci. Un grand merci pour avoir sauvé notre fils. Honnêtement j'avais perdu tout espoir de le revoir, mais tu l'as sauvé. À temps.

Je lâchai un ricanement sarcastique

– « Sauvé ». Ce n'est pas ce qu'il dit...

Son visage se crispa comme si elle se remémorait la scène. Je tentais de cacher cette culpabilité tenace.

-Tu sais, tu ne le vois peut être pas, mais tu lui as sauvé la vie. Et pas qu'aujourd'hui.

Je relevai les yeux et plongeai mes yeux dans l'océan gris que sont les siens

-Tu as été là à ses côtés dans les pires moments. Tu as été la seule qui ai été vraiment présente lorsqu'il était au plus bas, la seule à le remotiver lorsqu'il menaçait de céder, de sombrer.
Il me l'a dit tu sais, qu'il avait vraiment de la chance de t'avoir dans sa vie.

Ses paroles me firent l'effet d'un baume sur mon coeur meurtri.

-Ce qu'il t'a dit... Il l'a dit sous le coup de la colère, il ne le pensait pas.

Il avait l'air sacrément convaincant pourtant, pensé-je

Je baissais les yeux à cette pensée.

-Il ne le voit peut être pas aujourd'hui, mais tu l'as retenu de tomber plus d'une fois.

Elle détourna les yeux, sembla hésiter, puis les plongea dans les miens :

-L'overdose de Zach lui a ouvert les yeux. Il s'en est beaucoup voulu ce jour-là. D'avoir vu la mort d'aussi près même si ce n'est pas la sienne, ça l'a beaucoup travaillé. Et il a réduit sa consommation de drogues après ça.
Tu as toujours été une épaule sur qui il pouvait se reposer, et je crois que dans le fond, tout ce dont il avait besoin c'était d'une amie qui ne le jugerait pas, alors merci.
Et même si vous avez pris des chemins différents aujourd'hui, même s'il ne le voit pas pour l'instant, tu lui as sauvé la vie. Et j'ai bon espoir que tu l'aies sauvé à temps. Je garde espoir. Il s'en rendra compte aussi, un jour. De la chance qu'il a eu de t'avoir dans sa vie.

Une larme roula sur ma joue, et je relevai mes yeux humides, pour replonger dans les siens.

Avec son pouce, elle sécha la larme.

-Merci, chuchoté-je

Elle sourit, d'un sourire sincère et plein de compassion. Puis s'en alla, retourna vers sa voiture.

Bzzzzzt. Bzzzzt. Bzzzzt.

Mon téléphone vibra dans ma poche. Je décrochai

-Allô ?

-Iris ? C'est moi le copain d'Aicha Je ... Je crois qu'elle perd les eaux je l'emmène à l'hôpital. Viens vite s'il te plaît !

-J'arrive.

Je raccroche, le téléphone à la main et m'excusai :

-Désolée, je dois y aller c'est urgent.

Je me dirigeais vers ma voiture et démarrais en trombe.

Arrivée à l'hôpital, je me présentai à l'accueil et courus vers le couloir qu'elle m'indiquait. La mère et la sœur d'Aicha étaient là, elles aussi.

-Que s'est-il passé ?

-Je n'en sais rien, on était en train de s'embrouiller avec maman, et elle a poussé un cri. Ensuite, elle a perdu les eaux et m'a  dit d'appeler son copain.

-Vous attendez depuis longtemps ?

-Une demi-heure, environ. Je crois que le médecin est déjà dans la salle. Ils s'occupent d'elle.

-Quelqu'un est avec elle ? m'affolé-je à l'idée de la savoir seule à endurer cette épreuve

-Son copain.

Malgré la peur qui transparaissait dans sa voix, une pointe de fierté détonnait.
Depuis plusieurs semaines son ex tentait de regagner la confiance d'Aicha et de devenir un véritable soutien pour elle  malgré les nombreuses barrières qu'elle avait érigé après son départ.

Je souris disrètement. Certes il était partit lorsqu'il avait appris son état. Mais il était revenu et faisait tout son possible pour être présent pour le bébé et pour la future mère de son enfant.

J'étais contente qu'ils fassent front dans cette situation. Je sentais que son retour apaisait Aicha. Elle ne se sentait plus seule.

Soudain, la porte verte s'ouvrit et un médecin sortit en trombe s'essuyant le sang de ses mains sur un torchon.

-Madame Aicha a accouché. C'est une fille. Et son compagnon a très bien gérer la situation, sourit-il.
Si vous saviez le nombre de jeunes papas qui s'évanouissent alors que c'est leur femme qui fait tout le travail, s'esclaffa-t-il.
Je dois y aller. Vous pourrez la voir dès que son compagnon sera sortit de la salle.

Je poussais un soupir de soulagement.

Le médecin avait laissé la porte entre-ouverte et j'y jetai un œil. Ce que j'y vis me fit sourire.

Aicha était là, en robe d'hôpital, tenant son nouveau-né coiffé d'un bonnet rose sur la tête dans ses bras. Son copain se tenait près d'elle, lui tenant le bras, et la regardant avec un mélange de passion et de fierté, un regard doux, qui en disait long sur les sentiments qu'il éprouvait pour elle. Ils étaient dans leurs bulles. Et je sus qu'il ferait un bon père, et un bon compagnon pour Aicha.

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Singulier - [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant