Singulier - [Terminé]

Chapitre 51 - Ethan

Je m'assieds sur le canapé et resentis un vide en moi. Mes larmes montèrent directement à mes yeux, c'était comme ça depuis quelques jours. Je ne me sentais plus en sécurité, nulle part. Plus d' une semaine qu'on m'avait « sauvé » de cet endroit, et je me sentais toujours mort à l'intérieur. Des flashbacks revenaient par moment, bien que la plupart du temps j'étais sous tranquillisant pour ne plus penser.

J'envie ceux qui font des cauchemars, parce que les leurs s'arrêtent à leur réveil. Le mien me poursuit nuit et jour. Je vais pas m'en sortir, réalisé-je

Le sang, l'immonde odeur du sexe, résultant des viols que j'avais subit me hantaient nuit et jour.

-J'en peux plus, murmuré-je Je vais pas pouvoir tenir.

Mes larmes roulaient silencieusement sur mes joues, mon regard vide fixant le mur de la télévision.

-Je suis là, mon bébé, je suis là...

La voix de ma mère se cassa à ces mots tandis qu'elle m'entoura de ses bras.

-Je suis désolée de ne pas t'avoir protégé. Je suis tellement désolée...

Elle craqua. Comme moi. Je regardais le sol, de mon regard mort, et sentis ses larmes couler sur mon épaule. À cet instant, on était deux âmes brisées par la vie, l'une revenant des enfers, l'autre tentant de la sortir de là, de la réparer. Mais c'est impossible de recoller des morceaux brisés.

-Ça va aller, je te le jure. Je te le promets.

Mes larmes redoublèrent. « ça va aller ». C'était ce que me disait mon bourreau lorsqu'il descendait dans le sous-sol pour me faire mordre la poussière. Mon cœur saignait. Ils avaient gagné, il avait gagné: j'avais baissé les bras. Ils m'avaient tout prix : mon honneur, ma fierté, mon innocence. J'avais baigné dans l'horreur pendant trop de temps. C'en était terminé pour moi.

***

Je mis la clé dans la porte pour rentrer chez moi. Ma mère ouvrit avant que je n'ai le temps de rentrer.

-T'étais où ? Je me suis inquiétée, tu aurais pu me prévenir que tu rentrais plus tard.

-Je suis resté à la sortie du lycée avec des amis.

-Des amis ?

Une note d'espoir perça dans sa voix.

-Des amis.

Je rentrais, posais mon manteau et pris un chocolat chaud avant de m'assoier sur le canapé

-Racontes, ils sont dans ta classe ?  Ils sont gentils ?

-Une fille et un garçon de ma classe. Ils sont sympas. Ils m'ont proposé un ciné ce week-end.

-Mais c'est génial Ethan !

Elle me prit dans ses bras. Puis devint silencieuse. Quelque chose la tracassait

-Qu'est-ce qu'il y a ?

Elle se mordit la lèvre.

-Tu sais, je ne voulais pas t'en parler avant, mais ... peut-être que tu devrais aller voir Iris.

Mon visage se rembrunit à l 'évocation de son prénom. J'eus l'impression qu'on m'envoya un uppercut dans le ventre à ces mots.

-Tu sais, c'est grâce à elle qu'on t'a retrouvé, et elle était vraiment au fond du trou quand ... enfin tu sais quoi, l'épisode de la voiture.

-Je suis pas au fond du trou peut-être, moi ?

Ses yeux s'écarquillèrent, elle se reprit :

-Je sais, je suis désolée ce n'est pas ce que je voulais dire. Simplement... je me demandais pourquoi tu ne l'avais pas recontactée

-C'est trop dur, maman. Chaque fois que je pense à elle. Ça me rappelle l'enfer que j'ai vécu. Je veux pas vivre ça. Plus jamais. Ça me fait trop mal de penser à elle

-Je comprends. Parles-moi de tes nouveaux amis, alors.

Le soir dans mon lit, j'étais en train de réfléchir. Je pensais à la blonde, mon ancienne meilleure amie,  la seule personne qui m'avait soutenue et ne m'avait jamais abandnnée, malgré toutes les horreurs que je lui avais dites. Tout ce qu'elle voulait en contrepartie c'était un ami. Mais je ne pouvais pas. Je ne pouvais plus. Elle m'avait vu au plus bas, témoin des traumatismes qu'on m'avait fait subir, dans un état pathétique. Si je la revoyais, j'étais sûre qu'elle ne me verrait que comme ça,  la pauvre victime, battue et violée par son ex-copine, et je ne pouvais pas le tolérer. Je ne pouvais pas le supporter, il fallait que je passe à autre chose, que je l'oublie, elle et tous les autres. J'avais besoin de me créer une nouvelle identité.