Red flag. (1)

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Les yeux de Kamilia s'ouvrent lentement. Ses côtes lui font un mal de chien. Sa tête, c'est encore pire. Elle regarde autour d'elle et tout ce qu'elle voit, c'est qu'elle se trouve dans une chambre d'hôpital. Ses jambes sont dans des sortes de plâtres temporaires, en hauteur, une de ses mains est reliée à une perfusion et une bonne moitié de son corps est recouverte de bandages. 
— Kam ? Ça va ?
Kamilia tente comme elle peut d'y voir clair. La voix qu'elle vient d'entendre lui semble très familière puisqu'elle ressemble à celle d'Amy. Elle essaie d'ouvrir les yeux mais malheureusement, la douleur et la fatigue prennent le dessus et elle finit par les refermer. Elle les réouvre quelques temps plus tard, sans savoir si le temps écoulé ne compte que des minutes, des heures, des jours ou même des semaines.
— Ah, vous êtes réveillée. Ça tombe bien, dit une voix masculine à côté d'elle.
— Hmm, la demoiselle gémit de douleur.
— Doucement. Vos blessures sont loin d'être légères, conseille l'individu.
La vision de Kamilia devient de plus en plus nette et, toujours dans cette même chambre d'hôpital, se trouve assis un jeune homme qui ne lui est pas inconnu.
— Kayne ? C'est bien vous ? S'enthousiasme-t-elle.
— Ravi de vous voir réveillée. Ça a été dur de vous retrouver, avoue le chauffeur de Levi.
— De me retrouver ? J'ai dormi combien de temps ? S'affole la jeune femme.
— Ne vous en faites pas, vous n'avez dormi que quatre-vingt-sept heures. Amy vous a vu ouvrir les yeux au bout de vingt-quatre heures mais c'était bien trop tôt, explique l'homme.
— Comment vous m'avez retrouvé ? Qu'est ce qu'il s'est passé ?
À cette dernière question, Kayne ne répond pas. Il sourit seulement face à la jeunette et parle quelques secondes au téléphone. Après cela, il se lève et se dirige vers la porte de la chambre.
— Je vais informer les infirmières que vous êtes réveillée. Nous sommes tous de garde à tour de rôle devant votre chambre, criez si vous avez besoin d'aide, dit enfin le chauffeur en sortant de la chambre.
À nouveau, Kamilia se retrouve seule. Elle ne comprend pas pourquoi ni comment, encore moins ce qu'il s'est passé, mais elle est bien là, blessée et seule dans son lit d'hôpital. Cela dit, la solitude ne sera pas présente très longtemps car au bout de quelques minutes, la porte s'ouvre à nouveau et une infirmière entre.
— Mademoiselle Flynn ! Comment allez-vous ? Demande la vieille dame.
— J'ai connu mieux, réplique la jeune femme.
La petite dame s'approche d'elle et commence à changer ses bandages.
— Je suis désolée, je sais que c'est douloureux.
— Aïe, crie-t-elle pendant qu'on désinfecte ses blessures. Non, allez-y. Faut bien le faire de toute façon. Aïe. 
— Vous êtes courageuse. D'ailleurs, vos proches le sont aussi. J'ai surpris une petite brune entrer en douce alors que l'autorisation n'a été donnée qu'hier, avoue la vielle dame.
— C'est du Amy tout craché, avoue Kamilia en rigolant.
— Il y avait aussi ces trois hommes qui venaient chaque jour demander de vos nouvelles. On dirait que quelqu'un fait de l'effet à ces hommes.
— Ha ha ! Pas du tout ! L'un est mon meilleur ami, il est grand aux cheveux châtains assez clairs, l'autre est mon récent petit-ami, cheveux rasés à l'arrière et aux côtés, yeux gris et regard mystérieux, explique Kamilia. Mais attendez.. Comment était le troisième homme ?
— Oh, assez grand, cheveux longs avec la moitié attachée en chignon, yeux verts...
Le sang de Kamilia se glace en entendant ces mots. La description de l'infirmière semble correspondre au physique de quelqu'un qu'elle connait déjà. Un blanc s'installe et la petite dame le remarque. Elle essaie donc de changer de sujet.
— Votre petit-ami passe chaque jour. Il doit beaucoup tenir à vous.
— Oh, vous savez.. C'est normal après ce qu'il s'est passé, répond Kamilia.
— Quand même.. Tomber des escaliers et se casser autant de choses, il faut vraiment avoir la poisse. Je comprend qu'il ait eu la peur de sa vie.
Les mots que la vielle dame prononce semblent intriguer Kamilia. Sur le moment, elle ne dit rien mais elle comprend très vite que la version officielle est celle prononcée à l'instant par cette dernière.
— Et oui, c'est bien moi. Tomber des escaliers comme la fille maladroite que je suis, répond-elle en essayant de rester sérieuse.
Les bandages finissent d'être changés et la gentille petite dame s'apprête à sortir.
— Je vais prévenir vos amis, ils seront heureux de vous voir enfin réveillée, dit-elle en partant.
La porte se referme et Kamilia se retrouve à nouveau seule. Elle est seule face à de nouvelles questions. Un temps de réflexion s'impose : comment aborder le sujet ? Quels sujets aborder ou non ? Doit-elle demander à Amy ou à Levi directement ? Tout est en train de se mettre en place dans sa tête durant le peu de temps où elle reste seule. Cette solitude disparaît aussitôt lorsque la porte s'ouvre pour la énième fois de la journée.
— Putain, Kam.
La magnifique voix masculine et virile lui faisant de l'effet depuis maintenant des mois se fait entendre en même temps que le bruit de la porte se refermant.
— Salut Levi.
Le bel homme se rapproche d'elle à toute vitesse et la prend dans ses bras. Ce câlin fait énormément de bien à la jeune femme malgré la douleur physique qu'il engendre à cause de ses blessures.
— Comment tu vas ? Demande Levi.
— J'ai connu mieux, répond-elle en haussant les épaules.
Levi l'embrasse très doucement avant de s'éloigner pour s'assoir au plus près de son lit. Malheureusement pour lui, sa petite amie compte bien obtenir des réponses et commence d'ores et déjà à lancer des piques.
— Et puis, à quoi on s'attend quand quelqu'un tombe des escaliers..
Le visage du jeune homme devient pâle en constatant que l'information avait déjà été transmise à la demoiselle.
— De quoi est-ce que tu parles ? Demande-t-il l'air innocent.
— C'est la version officielle. Pourquoi ?
— Je n'ai pas le choix, dit-il fermement.
— Donc je me fais renverser par une putain de voiture et j'ai même pas le droit à la vérité ? S'énerve Kamilia.
— Kam, c'est pas ça. Tu dois te-
— Me reposer ? Demande-t-elle à son tour en lui coupant la parole. Sérieux Levi, on avait pas déjà passé ce cap d'éviter les sujets importants ? Je veux juste savoir ce qu'il m'est arrivé, c'est tout.
— On peut en parler quand tu rentreras ? Propose Levi d'un air coupable.
Kamilia hésite quelques secondes mais finit par se faire à l'idée : de toute façon, elle est coincée ici pour encore au moins une semaine alors autant ne rien tenter de découvrir maintenant.
— D'accord.
Finalement, malgré le fait d'être agacée par toute cette situation, la jeune femme tente d'oublier tout cela et de profiter de la présence de son petit-ami. La journée passe et il est temps pour ce dernier de s'en aller. À ce moment précis, Kamilia se sent coupable de ressentir ce qu'elle ressent : elle est soulagée d'être enfin seule. Pourtant, c'est la présence de son amoureux qui devrait la rassurer mais là, c'est totalement l'inverse.
Le premier soir après son réveil est horrible. Cauchemars, débuts de crises, bouffées de chaleur, douleurs abominables... Tout amène notre jeune blessée à passer une nuit épouvantable. Le lendemain matin à son réveil, elle ouvre ses yeux et c'est un rayon de soleil qui éclaire le visage d'un nouveau visiteur.
La jeunette s'étire, les yeux complètement cernés à cause de son incapacité de la veille à dormir, et voit en face d'elle la seule personne qui peut lui redonner le sourire.
— Coucou ma beauté.. Comment ça va ? Demande cette personne.
— Oh ! Jean ! S'enthousiasme Kamilia. Qu'est ce que t'attends ? Dans mes bras ! Maintenant !
Tous deux affichent un énorme sourire avant que Jean ne se lève pour câliner son amie. Des pleurs de joie se font entendre. Le soulagement en chacun d'eux se fait ressentir mais malgré ce moment intense, Kamilia peut ressentir la culpabilité qui règne dans la pièce. Elle s'éloigne donc lentement de son visiteur et décide de crever de suite l'abcès.
— Jean. Qu'est ce que tu as ?
— J'aurais jamais dû te laisser seule. Répond-il sans aucune hésitation.
— Hé ! S'ils ne m'avaient pas retrouvé et que tu étais resté avec moi, ça nous aurait mené à quoi ?
— Oui mais..
— Jean. Arrêtes. Tu n'avais pas d'autre choix. C'est cool qu'on m'ait trouvée et ramenée ici mais si on s'était tous les deux fait attrapés, comment on aurait fait ? Demande-t-elle pour rassurer son meilleur ami. Tandis que là, si vous ne me trouviez pas, tu aurais pu les aider. Alors arrêtes de te sentir coupable.
Encore les larmes aux yeux mais cette fois-ci, de tristesse, le jeune homme se reprend et accepte la réalité qui se trouve face à lui.
— Alors, qu'est ce qu'il s'est passé durant mon absence ? Questionne Kamilia, curieuse.
— Ben je vais commencer par le fait que Levi et Amy sont très distants depuis que tu es endormie, avoue-t-il.
— Distant ? Comment ça ? S'étonne la jeunette.
— Ils parlent beaucoup dans leur coin et dès que j'arrive, ils changent de sujet. Ils nous cachent des choses.
La demoiselle sait que son ami a raison mais elle ne veut pas inquiéter ce dernier, alors elle essaie de détourner le sujet pour ne pas qu'il ne se fasse de souci.
— Ils sont juste inquiets et sur leurs gardes. T'en fais pas, ça n'a rien à voir avec nous, ment-elle. Parlons de choses positives.
Trois bonnes heures passent où de longues conversations se font entendre dans la chambre d'hôpital. Il est maintenant treize heures et Jean doit être en cours pour quatorze heures alors il se lève et s'apprête à partir.
— Jean, tu peux me rendre un service ?
Le jeune homme hoche la tête en réponse à son amie.
— Mon carnet de notes était resté dans ton sac, tu peux me le laisser ?
— Attends, dit-il en fouillant. Celui-là ?
— Ah oui, super ! Merci !
— Je repasse demain ma beauté. Je t'aime très fort.
— Je t'aime aussi mon grand, répond-elle en le voyant partir.
La porte se ferme et Kamilia ouvre le carnet. Elle regarde une petite feuille qui y est glissée et réfléchit. Elle referme le carnet, puis le réouvre quelques secondes plus tard. Elle hésite mais se décide finalement à prendre son portable.
— Allô ? Entend-elle à l'autre bout du fil.
La demoiselle prend une grande inspiration et se décide enfin à parler.
— Bonjour.. Je suis bien chez Katherine Milers ?
— Oui, à qui ai-je l'honneur ?
— On m'a donné votre numéro après m'être fait agressée et on m'a dit que vous étiez la personne à qui parler.
— Vous voulez un rendez-vous ? Demande la dame.
— Oui, j'aimerai beaucoup, dit la jeune femme timidement. Cela dit, j'ai un petit souci. Je suis hospitalisée dans un état assez grave et je ne pourrais pas sortir avant une bonne semaine..
— Oh, la personne qui vous a donné mon numéro ne vous a-t-elle pas prévenu ? Questionne Katherine, étonnée.
— Prévenue ? Répète bêtement la jeunette.
— Mes premiers rendez-vous se font à domicile. Les patients ont souvent du mal à trouver un transport et quand ils en ont un, c'est le créneau adapté à celui-ci qui pose problème. Je peux donc me déplacer à un tarif réduit, explique la femme au téléphone.
Kamilia reste assez étonnée de cette façon de travailler et maintenant, elle ne sait plus quoi dire : elle n'a plus aucune raison de refuser, ni aucune excuse.
— Bon ben, hésite-t-elle encore. Je suppose que je n'ai plus le choix.
Elle entend la gentille dame à l'autre bout du fil rigoler très doucement et avant qu'elle n'ait le temps de comprendre pourquoi, cette dernière la reprend immédiatement dans ses paroles.
— Je sais, je ne vous laisse pas le choix, mais vous verrez : le premier pas, le plus difficile d'ailleurs, est le plus grand et le plus important. Alors qu'est ce que vous dîtes de demain après-midi ? J'ai un patient qui a eu un imprévu.
Un sourire se forme sur le visage de la jeune blessée qui se sent enfin rassurée. La simple entente de la voix de cette dame qui semble être d'une gentillesse et d'une bonté hors du commun lui a permis de se sentir plus en sécurité.
— Ca me va, elle dit finalement.
Après avoir accepté, Kamilia donne à Katherine les informations de base pour lui permettre de créer son dossier mais surtout, l'adresse de l'hôpital. Après quelques minutes de conversation téléphonique, les deux femmes coupent court à l'appel, vacant chacune à leurs occupations.

Jean !

QUOI??? CA VA??

Oui idiot. J'ai une bonne nouvelle.

???

La psy que m'avait conseillé le gars dans le bus, elle vient me voir demain.

Quoi ? Sérieux ? Genre une vrai psy ?

Oui idiot mdr. 

Ohhhhhhh.. Je suis tellement content pour toi ma beauté. Surtout dis-lui tout ce que tu as à dire et n'omet aucun détail, ok ?

Oui, promis.

Ainsi, la jeune femme dépose son portable et commence une de ses activités préférées dont elle a accès grave à son meilleur ami : l'écriture. Elle prend un grand cahier que lui avait laissé ce dernier et commence à écrire. Elle invente des petites histoires, d'action, d'horreur, d'amour et bien d'autres, ce qui lui permet de s'évader le temps de quelques instants où elle ne voit pas le temps passer. Elle écrit pendant des heures et ce qui la sort de sa concentration, c'est l'infirmier qui vient lui apporter le dîner.
— Bonsoir mademoiselle. Désolé de vous déranger, je vous apporte juste le repas.
— Oh non, aucun souci ! Répond-elle sans lever les yeux de son cahier. Posez-le sur le bureau, je mangerai plus tard, merci.
— Non, Kamilia. Tu devrais manger maintenant.
— Ne vous en faites pas, je vous assure que.. Attendez.. Comment vous connaissez mon prénom ?  marmonne-t-elle.
En levant les yeux, elle peut clairement reconnaître la personne se cachant sous la blouse et le masque chirurgical. C'est la personne qui hante ses pensées depuis maintenant un mois et en la voyant, elle est tétanisée.
— Bonsoir, Kamilia, redit l'individu en enlevant son masque. On a des choses à se dire, tu ne crois pas ?
Par réflexe, elle regarde son portable et songe à l'attraper en commençant à bouger la main dans sa direction mais le faux infirmier la dissuade de le faire très rapidement.
— Si j'étais toi, j'éviterais, conseille-t-il.
Bien que paniquée, Kamilia reste raisonnable et écoute le conseil de celui-ci. Elle ne sait même pas comment réagir alors elle décide de rester calme et de ne pas montrer qu'elle a peur. Levant la tête en direction de la personne ayant apporté son repas, elle la fixe droit dans les yeux et fait bien comprendre qu'elle n'a plus peur de la confrontation. Un tension règne dans la pièce et pour entrer dans le vif du sujet, la jeune femme commence la conversation.
— D'accord, pas de portable. Mais à une condition, demande-t-elle.
— Je t'écoute.
— Certes, je veux savoir ce que tu veux, mais il y a plus important, explique-t-elle.
— Là, tu m'intrigues.
Kamilia prend une grande inspiration en sachant très bien qu'elle va apprendre des choses que certaines personnes lui auraient caché, mais elle se lance.
— Je veux savoir tout ce qu'il t'est arrivé depuis cette nuit, Aaron.

You&Me ( Tome 1 ) : That's who I amOù les histoires vivent. Découvrez maintenant