• Chapitre 27 •

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Un homme coupe le gazon tandis qu'un autre taille une haie. À quelques pas, un jardinier s'occupe des fleurs. Tout un petit monde s'affaire déjà dans les jardins de la propriété pendant que je les regarde attentivement depuis la fenêtre de la salle du piano. Je voulais rendre visite en urgence au docteur Harris après ce qu'il s'est passé hier soir. Mais le majordome m'a donné rendez-vous pour des cours de piano avec Felix. Monsieur Lee a eu l'idée de si bon matin alors que je venais à peine de me lever. À quelle heure est-ce que son réveil sonne ?

Les rideaux sont ouverts, noyant la salle de la lumière du jour. Je ne me voyais pas l'attendre seule dans l'obscurité de cette pièce lugubre qui me rappelle encore de vagues souvenirs de cet homme. Il ne cesse de hanter mon esprit et mes nuits. J'ai rêvé de lui après cet épisode. Il me poursuivait dans tout le manoir. J'étais incapable de trouver la sortie et quand il m'a trouvée, je me suis réveillée aux coups de portes provoqués par monsieur le majordome. Ce dernier est parti depuis quelques minutes. Je l'avais supplié de rester le temps que son employeur arrive.

      — Tu as ouvert les fenêtres.

Sa voix, comparable à celle d'un chanteur adulé par ses fans, se faufile jusqu'à se poser dans ma nuque. Une chair de poule se propage dans mon dos, me ramenant dans cette impression familière. Bras croisés, je pivote lentement puis pose mon regard sur lui. Vêtu d'une chemise à carreaux bleus et par-dessus, d'un gilet noir, il s'avance dans ma direction dans ses chaussures laquées. Mes pensées se focalisent tout de suite sur ses cheveux aussi mauves que la lavande. Pour une raison que j'ignore, le poids sur ma poitrine s'allège.

      — Felix. Oui !, je réponds par la suite. Je trouvais que la pièce avait besoin d'un peu d'air...

Il observe le paysage par-delà les hautes vitres. Un fin sourire se dessine sur ses lèvres avant de retrouver un peu de sérieux et de m'intimer de le suivre jusqu'au piano à queue. Il s'assoit en toute élégance puis se rend compte que je suis toujours debout. Mon corps refuse de bouger. Il n'était pas au sous-sol et pourtant, mon subconscient n'arrête pas de crier au danger.

      — Un problème, Erika ?

Je reprends mon souffle qui avait fini par être indiscernable. Il faut que je me ressaisisse. Il doit y avoir une explication plausible. Ce manoir, ses résidants et son propriétaire doivent certainement me dissimuler quelque chose que j'ai du mal à comprendre. Si je ne trouve pas ce que c'est au plus vite, j'ai peur que ma santé mentale en subisse les conséquences.

      — Non. Je réfléchissais au morceau que je veux t'apprendre aujourd'hui, j'ajoute en prenant place à ses côtés, tout en laissant une distance raisonnable entre nous.

      — Mais je n'ai pas encore assimilé le morceau de la dernière fois...

      — C'était juste pour t'apprendre quelques bases. Aujourd'hui, je vais t'enseigner à jouer une comptine qu'on joue souvent pour les enfants. Ce sera plus facile.

Il acquiesce sans objecter. Je lui montre les notes une première fois puis lui demande de rejouer à l'aide de sa mémoire. Ensuite, durant une bonne demi-heure, nous apprenons chaque accord pas à pas. Malgré ses difficultés à distinguer les notes, il comprend rapidement grâce à sa détermination vigoureuse. Au bout d'une heure, il réussit à jouer le morceau lentement que ses lèvres se redressent en un sourire lumineux.

Interdite face à la joie dans ses traits, je ne manifeste aucun geste de peur de voir disparaître cette lueur magnifique. Felix est d'une beauté époustouflante semblable à un ange tombé du ciel. Cette facette est si pure qu'il est impensable que cet inconnu au même visage soit lui. Impossible. C'est forcément quelqu'un d'autre. Comment pourrait-il changer la couleur de ses cheveux aussi vite ? Porte-t-il une perruque ?

Son regard plonge dans le mien. Je sursaute avant de me focaliser sur les touches blanches qui sont d'une propreté impeccable.

      — Qu'est-ce que tu as ? me demande-t-il soudainement.

      — Rien du tout.

      — Cesse de me fixer comme ça. Ça me dérange...

Je me fais des idées. Ce sont ses véritables cheveux. De toute façon, comment aurait-il rejoint sa voiture aussi vite ? En plus, son assistante était là.

      — Peux-tu arrêter ?

Je sursaute. Mince... je l'ai encore fixé.

      — Désolée... Est-ce que je peux toucher...?

Son front se plisse tandis qu'il fait barrière de son visage avec son bras. Ma question doit être complètement saugrenue et inconvenante.

      — Je parlais de tes cheveux...

      — Pourquoi veux-tu les toucher ? s'exclame-t-il avec une surprise non dissimulée, mêlée à de la méfiance curieuse.

      — J'aimerais avoir la même coloration, je prétexte.

Il me fixe durant quelques secondes puis refuse. Je ne suis pas étonnée. Qui accepterait franchement ce genre de demande ? En réalité, je ne savais pas trop comment réagir que c'est sorti tout seul de mes lèvres.

Retournant dans son apprentissage, il continue à poursuivre les accords. Je reste concentrée bien que mon esprit se pose mille et une questions. Mais je n'ai pas le temps de respirer qu'il se rapproche de moi, attrape ma main et la glisse dans ses cheveux. Paralysée par son geste, je n'arrive plus à énoncer un mot.

      — Contente ? Maintenant, peux-tu arrêter de me fixer comme si j'étais quelqu'un d'autre ? Cela en devient indécen...

Mes doigts plongent derrière sa tête, le faisant taire. Ses cheveux sont soyeux malgré la coloration. Il a sûrement dû les teindre il y a peu de temps. L'effet gris de son violet s'est légèrement assombri. En tout cas, ce sont bien des vrais. J'ai beau les tirer un peu, ils ne bougent pas. Qu'est-ce que je suis idiote de penser qu'il porterait une perruque ! Il faudrait que je retire ma main, mais son regard, posé sur moi, me déstabilise.

      — Je... je suis désolée, je parviens finalement à murmurer avant de baisser mon bras.

Mais Felix ramène mes doigts dans ses cheveux. Sa main est chaude contre la mienne. Notre respiration ne fait plus qu'un. Je suis envoûtée par ses iris infiniment sombres. Cependant, un raclement de gorge résonne au seuil de la porte arrachant nos deux corps de cette attraction étrange. Je tourne mon regard sur le tabouret tandis que Felix se lève immédiatement comme s'il avait eu peur d'attraper la peste.

      — Veuillez m'excuser de vous interrompre...

      — Nous ne faisions rien, cingle-t-il d'une vive voix.

Mes joues s'enflamment alors que le majordome nous observe d'une neutralité impressionnante. Malgré la colère de mon patient, je remarque ses oreilles rouges alors que mon cœur bat la chamade. Que vient-il de se passer ?






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Bonsoir ! J'espère que vous avez passé une bonne journée !

Premièrement, je tiens à vous remercier. Nous sommes à 700 VUES !!!! 🫢

J'ai l'impression de me répéter mais j'imagine que deux semaines, c'est long. Ma journée est belle et je suis vraiment très heureuse d'être là. Honnêtement, je n'imaginais pas vraiment que des personnes liraient mon histoire. Donc, merci beaucoup ! ❤️

Aujourd'hui, le chapitre est un peu plus long. Il était important que je marque chaque détail. Erika n'a pas fini d'en voir de toutes les couleurs dans ce manoir. Il est difficile de comprendre chaque émotion, chaque fait quand la raison est le maître-mot de nos vies.

J'espère que cela vous a plu et que vous continuerez à lire ! Merci de votre attention !

L'ombre de FelixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant