• Chapitre 29 •

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Malgré mon effort pour apaiser l'atmosphère, l'air dans l'habitacle est très pesante que respirer en devient difficile. Je n'ose même pas glisser un regard vers Felix, trop occupé à répondre à des SMS urgents. Son téléphone était éteint il y a encore une heure alors que je lui donnais une leçon de piano.

Mais je tente de faire abstraction de tout ça en focalisant mon attention sur les grilles dorées qui longent un long jardin magnifique qui protège des fleurs aux couleurs séduisantes. Quand mes poumons goûtent enfin à l'oxygène, je reste muette face à la demeure des Lee. Elle est très belle.

Bien que plus petite que le manoir où je réside temporairement, le vieux couple n'est pas effrayé par l'extravagance. La façade n'a rien d'exceptionnelle, mais la subtilité de sa richesse est dans ses détails. Chaque pierre finement posée crie les billets verts, accompagnée de moulures et de sculptures soigneusement réalisées. Le bouquet final est la grande porte qui accueille une multitude de roses dorées et d'une tête énorme de guépard en or massif. C'est un joli exemple de comment dépenser son excès d'argent.

Est-ce même possible d'être dans l'excès ? Financièrement, je vais bien mais c'est parce que je fais attention à mes achats et à mes besoins. Je ne me souviens même pas d'un jour où j'ai consacré à avoir des vacances dans un lieu loin de mon quotidien.

Aurais-je été heureuse si ma famille ne manquait de rien ? La seule poutre de cette demeure aurait réglé toutes les dettes de mes parents. Peut-être qu'avec ce simple morceau de bois, je n'aurais pas quitté ma famille. Je n'aurais pas eu à trouver un job pour régler leurs soucis. Je n'aurais pas accepté ce stupide marché...

      — Oh mon Dieu ! Felix, s'exclame la voix fluette de madame Lee.

Un mois s'est écoulé depuis ma rencontre avec cette famille. Le temps court rapidement. Je ne pensais pas rester autant de semaines chez un patient qui ne devrait même plus être suivi. En-tout-cas, ils ont l'air ravi de voir leur fils. Des rides se creusent de manière plus marquée dans le coin des yeux de la belle femme. Même le père, qui avait ouvert la porte, les sourcils froncés, a le front plissé. Enfin, son sourire est réservé face à l'éclat de sa femme.

      — Nous sommes heureux de te...

La quarantenaire est interrompue par un fracas cristallin comme si quelqu'un venait de faire tomber du verre. L'accident est coloré par une voix doucereuse et reconnaissable entre toutes.

      — Anna, avez-vous encore changé la vaisselle de place ? Car je ne trouve pas d'assiette. Lewis en a fait tomber une ! s'écrie Sam, l'artiste des tableaux.

Immédiatement, Felix rebrousse chemin mais sa mère rattrape son bras.

      — Attends !

      — Je refuse. Vous m'avez caché les avoir invités.

      — Ce sont tes amis ! s'étonne-t-elle.

      — Tu ne cesses de les ignorer alors qu'ils veulent seulement se rapprocher de toi, ajoute son père.

      — Vous ne comprenez pas, murmure leur fils, en secouant de la tête.

      — Alors, explique-nous ce qu'est le problème, clame la quarantenaire qui est très perplexe face à son comportement.

Le regard de mon patient s'adoucit devant la détresse de sa mère. Mais au même moment, une personne s'invite à la conversation, effaçant toute émotion sur le doux visage de l'entrepreneur.

      — Vous prenez beaucoup de temps à revenir, s'exclame un Sam intrigué avant de poser ses yeux sur Felix. L'invité d'honneur est arrivé, ajoute-t-il de vive voix, les bras ouverts dont ses mains sont occupées par des morceaux d'assiettes brisées.

L'ombre de FelixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant