Chapitre 17

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Personne n'est idiot. La relation entre la Gardienne des Savoirs et la Reine n'est peut-être pas d'ordre amoureux mais elle existe assurément. Quelque chose a intrigué la Reine chez la jeune novice Inquisiteur et cette dernière a dès le départ montré trop de dévotion pour que cela ne paraisse pas suspect. Mais quand à savoir ce que c'est ... peut-être faudrait-il aller chercher dans un passé fort bien enterré ?

Une chape de plomb semblait s'être abattue sur la pièce. Yuzu respirait à peine, toute son attention focalisée sur le renégat en face. La scène la ramena dans une maison en ruine au milieu d'Inquisiteurs qui criaient tandis que les protections de la maison craquaient. Là encore, Matelson et elle se dévisagèrent longuement, cherchant à tirer on ne sait quoi de l'expression de l'autre. Mais cette fois-ci, ce ne fut pas le cri de Jessica qui vint briser la confrontation. La voix grinçante et quelque peu railleuse de Matelson rompit la chape d'un seul coup.

- J'ai été déçu, vous savez.

Yuzu cligna à peine des yeux.

- À quel propos ?

- Vous.

- Vraiment ?

- Et bien oui. Vous ne dégagez absolument aucune puissance magique, Gardienne. Que votre don soit redoutable, oui. Vous en imposez plus en vision qu'en réalité. Mais le reste ... Quand vos talents sont vantés à travers tous les clans du Double Monde, quand votre magie est décrite comme d'une puissance remarquable ... avouez que c'est décevant de ne rien percevoir.

Yuzu croisa négligemment ses mains derrière son dos.

- Somme toute, il s'agit d'une déception à l'égard de votre propre incompétence que de mes capacités.

Un rire désagréable jaillit de la bouche du sorcier. Il secoua la tête.

- Pas de ça entre nous s'il vous plaît Gardienne. Nous ne sommes pas à la cour ou au Consiliarerum. Quel besoin avez-vous de faire précéder notre combat physique d'une joute verbale ?

- Vous êtes celui qui a commencé, répliqua Yuzu entre ses dents.

Un sourire plein de dents répondit son agacement.

- Je me demandais si vous cachiez tellement bien votre puissance qu'au final elle vous aurait échappé. Peut-être que le tour de passe passe réside ici ? Dans votre capacité à faire croire à une magie qui n'existe pas.

Yuzu ne répondit que d'un haussement d'épaules. Matelson aurait de toute façon bientôt toutes les réponses à ses questions, quel était donc l'intérêt de lui répondre verbalement, comme l'avait-il lui-même souligné ? Elle se tourna légèrement pour faire quelques pas le long du bureau, s'éloignant ainsi un peu du renégat.

- Vous avez sous-estimé Jessica.

Un haussement de sourcils.

- La parrii ? demanda Matelson d'un ton incrédule.

- Jessica, corrigea Yuzu. Je ne vous en voudrai pas, après tout, moi aussi je ne l'avais pas pris en compte à sa juste valeur au départ. Mais moi, contrairement à vous, je ne l'avais jamais rencontré en personne.

- Les parrii sont inutiles, répondit Matelson en articulant exagérément et en haussant le ton. Leur seule utilité réside dans la magie supplémentaire qu'ils offrent au clan quand leur lien aux ancêtres est forgé. Ils ne sont guère mieux que des esclaves et le Consiliarerum devrait cesser son hypocrisie et le reconnaître, cracha-t-il d'un ton plein de mépris. Nous ne sommes pas humains !

Yuzu soupira déjà lassée du débat.

- La question de l'humanité ne se pose pas. Quant au statut des parrii, tous les clans ne sont pas les mêmes. Et tout le monde ne partage pas vos vues.

Le Rouge de la MortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant