Noël, c'est fantassetique

1er décembre

Ce matin-là, il faisait encore nuit lorsque Louane sortit de chez elle, laissant sa famille nombreuse pour sa journée de travail. À l'intérieur, ses quatre frères et sœurs et ses parents se préparaient déjà à décorer la maison toute entière pour Noël ; les principales discussions concernaient donc la couleur des boules et des guirlandes qu'ils souhaitaient accrocher sur le sapin. Ils imaginaient déjà où ils achèteraient de nouvelles décorations ainsi que les cadeaux, les endroits stratégiques où exposer tout cela... Pour une fois, Louane était bien heureuse de devoir partir aux aurores pour se rendre au travail.

Elle se dépêcha de rejoindre la gare du petit village en périphérie de Paris où elle habitait –toujours chez ses parents—, afin de prendre le seul train restant qui lui permettrait d'arriver à l'heure. Non pas que sa patronne soit sévère, Eve se fichait pas mal que la jeune femme arrive avec cinq minutes de retard, mais c'était elle-même que Louane ne voulait pas décevoir en étant constamment en retard. Elle mettait un point d'honneur à toujours être à l'heure.

Lorsqu'elle ressortit du train vingt minutes plus tard, Louane soupira en découvrant qu'il faisait toujours aussi nuit dehors. Ce qu'elle pouvait détester l'hiver, ses journées trop courtes et ses nuits trop longues ! À l'instar de sa famille, Paris tout entière semblait se préparer pour les fêtes de fin d'année, puisque les rues étaient déjà illuminées en ce premier jour de décembre. Louane soupira et approcha ses mains de son visage afin de les réchauffer de son souffle. Elle avait beau avoir grandi au Canada, elle n'était toujours pas capable de résister au froid de l'hiver. Eve, sa collègue et amie, se moquait d'ailleurs assez souvent d'elle à ce sujet, puisque la blonde arrivait toujours au travail avec les doigts et le visage rougis par l'air glacé et toute grelottante, et ce malgré les épaisses couches de vêtements qu'elle portait.

L'avantage à cette heure-ci était que peu de gens étaient déjà dehors, rares étaient les voitures sur les différents boulevards, et Louane adorait ça. Elle aimait cette ville, mais pas l'effervescence de la population et de véhicules dans celle-ci pendant la toute journée. Elle put donc profiter de l'air matinal sans être trop dérangée par l'odeur de gazole, ni le son des klaxons partout dans les rues, sur les avenues.

Le Fantassetique, le café où elle travaillait, se trouvait entre l'Opéra Garnier et le Louvre, et était donc plutôt facile d'accès pour Louane, elle pouvait s'y rendre à pied depuis la gare saint Lazare, où elle arrivait directement avec un seul train. Lorsqu'elle avait trouvé une offre d'emploi dans ce petit café deux ans plus tôt, elle s'était donc empressée de postuler et ne l'avait pas regretté un seul jour depuis. Seules Eve et elle y travaillaient à temps plein, bien que le frère et la meilleure amie de la patronne fassent tout de même des demi-journées, de façon à ce qu'ils soient toujours trois à travailler. Contrairement à la plupart des cafés en ville, l'ambiance était réellement détendue, et les prix pas exorbitants. Eve se plaisait à dire qu'il s'agissait de son petit coin de paradis, et qu'elle ne voulait pas que les gens se prennent la tête lorsqu'ils venaient. Elle possédait l'établissement et ne le louait pas, elle pouvait donc se permettre d'établir des prix assez bas sans que son niveau de vie n'en souffre. De plus, il y avait largement assez de clients pour payer son salaire, ainsi que celui de ses trois employés.

-Salut ! dit Louane en poussant la porte d'entrée du café.

Elle frissonna et retira sa veste et son bonnet, puis les lança machinalement sur l'un des tabourets installés près du comptoir.

-Salut ! Bien dormi ? demanda Eve sans arrêter sa tâche en cours.

La patronne tenait à ce que tout soit prêt pour l'ouverture, le matin était donc très certainement le moment de la journée où elle travaillait le plus dur. Depuis qu'elle la connaissait, Louane ne l'avait jamais vue s'en plaindre une seule fois, elle semblait heureuse avec la vie simple qu'elle menait et c'était une des choses que la jeune femme blonde appréciait chez elle.