Noël, c'est fantassetique

16 décembre

Dire que Louane avait dormi ce jour-là serait mentir. Elle n'avait même pas osé fermer l'œil de la nuit, parce qu'elle craignait de voir le visage d'Eve apparaître dans son esprit, de sentir à nouveau son corps pressé contre le sien, de sentir les frissons qui l'avaient parcourue quand elle avait osé embrasser Eve.
La belle brune ne l'avait pas retenue. Et si elle regrettait ?

Les yeux d'Eve, plongés dans les siens alors que Louane essayait en vain de se retenir de l'embrasser.

Il n'y avait plus de retour en arrière possible, pas après cela. Et si Louane avait tout gâché entre elles, et si Eve ne partageait en rien ses sentiments, qu'elle s'était simplement sentie obligée de répondre à ce baiser parce que son amie avait l'air tellement vulnérable, tellement faible ?

Leurs poitrines, pressées l'une contre l'autre, les mains d'Eve dans ses cheveux.

Louane était terrifiée à l'idée d'avoir ruiné son amitié avec la personne qui comptait le plus pour elle. Ces pensées n'étaient même pas les pires à l'assaillir. Et si Auguste s'était tenu là, au coin de la rue, les avait observées s'embrasser de son regard pervers ?

La bouche d'Eve contre la sienne, leurs langues et leurs corps dansant sur la musique de leurs cœurs battant à l'unisson.

La jeune femme avait repoussé ces pensées toute la nuit, si bien qu'elle n'avait pas dormi, et le regrettait maintenant amèrement. Elle était effrayée à l'idée d'être seule avec Eve à nouveau, si bien qu'elle avait hésité à prendre le train suivant, afin d'arriver en retard et qu'il y ait déjà des clients et de l'activité dans le café. Pourtant, elle était maintenant seule dans la même pièce qu'Eve, à essayer à tout prix de l'éviter. Bien heureusement, la belle brune semblait être dans le même état d'esprit, elle semblait toujours s'enfuir vers le coin le plus éloigné de Louane.

D'un certain côté, cela blessait la jolie blonde, qui aurait voulu en parler, parce qu'elle voulait plus que tout autre au monde être en mesure d'embrasser Eve à nouveau. D'un autre, elle était soulagée. Elle ne voulait pas avoir à affronter les conséquences de ses actes de la veille. Son cœur et son cerveau se contredisaient depuis longtemps déjà, mais il lui semblait que ce n'était jamais aussi fort.

-Mon chou, c'est samedi et ça fait bien trop longtemps qu'on n'a pas organisé une soirée karaoké, lança Yohan sans prendre conscience du froid qui séparait les deux jeunes femmes lorsqu'il entra dans le café.

Eve se tourna vers lui et leva un sourcil surpris en entendant son meilleur ami déclarer cela. Elle n'avait cependant aucune envie de se battre avec lui, alors elle se contenta de hausser les épaules.

-Si tu veux, à condition que tu te charges de l'organisation, céda-t-elle.

Elle jeta un coup d'œil à Louane, mais la jolie blonde semblait toujours l'ignorer, comme elle le faisait depuis qu'elle était arrivée. Eve avait conscience que c'était une erreur, qu'elle n'aurait probablement jamais dû embrasser Louane, qui ne partageait bien évidemment absolument pas ses sentiments, mais elle ne pouvait pas s'empêcher d'être blessée par le comportement distant de la jeune femme. Par-dessus tout, elle était terrifiée à l'idée d'avoir gâché deux ans d'amitié parce que, quoi ? Le froid hivernal et l'ambiance de fête de Paris l'avait empêchée de refouler ses émotions comme elle en avait l'habitude ? Bon sang, ce qu'elle pouvait se sentir idiote...

-Alors, quoi de beau au paradis des casse-couilles qui n'aiment pas Noël ? demanda Yohan en se laissant tomber sur une banquette, à l'opposé du comptoir.

Visiblement, il n'était pas décidé à travailler... Eve jeta à nouveau un coup d'œil à Louane, qui semblait toujours autant déterminée à l'ignorer. C'était à peine si elle avait dit bonjour en entrant, alors la belle brune s'efforça d'arrêter de la regarder, de lui donner le moins d'attention possible. La dernière chose qu'elle souhaitait, c'était se ridiculiser encore plus devant la jolie blonde... Comme si le fait d'être amoureuse de quelqu'un aussi inaccessible que Louane n'était pas déjà suffisamment humiliant.