HOPE

14.

Le retour du week-end se fit dans la difficulté pour quelques étudiants d'art, notamment pour trois d'entre eux. Oly n'avait pas fermé l'œil de la nuit, au début elle rumina sur la situation désastreuse de sa relation amoureuse, puis au fil des heures, ses tourments se tournèrent davantage vers la production de ses morceaux. La plateforme de streaming était devenue en si peu de temps, le défi le plus audacieux qu'Oly devait surmonter. Bien que, si l'étudiante écoutait un tant soit peu les conseils de sa mentor, la production de son album pouvait devenir une aubaine pour la mise en ligne de ses nouveaux morceaux.

Effectivement, il a été décidé par le conseil administratif que chaque artiste du label Hope devait pouvoir proposer cinq morceaux au minimum pour ouvrir un compte sur la plateforme. En respectant les délais annoncés, Oly pouvait profiter de la sortie de son album pour pouvoir y mettre la moitié de ses compositions sur la plateforme, voire, l'album entier. Hop, le tour serait joué avec brio pour elle.

Le matin était pour beaucoup de gens, synonyme de défi, Oly n'appréciait pas spécialement de devoir se réveiller à des heures aussi matinales. Pourtant, aujourd'hui, elle avait tout intérêt à s'armer de courage. Elle devait se rendre au studio pour enregistre le morceau avec Lady Leshurr, une artiste qu'elle estimait au plus haut point.

Arrivée sur les lieux, Oly fût impressionnée par l'enthousiasme de l'équipe qui les accompagnait sur le projet, elle en fût touchée. Peu de temps après l'arrivée de l'étudiante, Em apparaissait.

« Bien bonjour jeunes gens ! Je vous laisse trouver vos marques encore quelques minutes et nous débuterons la session ensuite ! Ça va Oly ? Tu as pu te reposer ?

— Heu... Ouai, ouai. J'crois. Hésita l'artiste en fronçant les sourcils, n'étant pas certaine qu'Em lui posait réellement la question.

— C'est quoi cette tête ? Redresses toi, personne ne chante aussi courbée. Lady Leshurr est-elle prête aussi ? Nous avons beaucoup de boulot, pas question de perdre davantage de temps ! Aussitôt annoncée, l'artiste londonienne entra en trombe dans le studio, le café à la main, des lunettes de soleil sur le visage... Em souffla à cette vue. La mentor était assez expérimentée dans les mauvaises expériences pour savoir que l'attitude de la londonienne sonnait comme une mauvaise nuit passée.

— Are you good Leshurr ? Questionna innocemment Oly, espérant recevoir un moindre mot de la part de sa collègue, elle ne reçut qu'un pouce en l'air peu convaincant.

— I'm good, we can start. I'm just... Gosh i'm going to throw up ! »

Lady courut en furie vers les premières sanitaires, laissant l'équipe bouche bée, les techniciens ne savaient plus où se mettre et Em hésita grandement à reporte la session. Malheureusement le planning n'était pas assez extensible pour accepter les écarts des artistes, Oly se sentait désolée pour la situation, bien qu'elle ne soit aucunement responsable des déboires de sa collègue.

« Em... On peut lui laisser un peu de temps ?

— Il y a deux solutions Oly, soit elle revient et elle chante sans salir le studio, soit je l'envoie tout de suite à l'infirmerie. Bien évidemment sans possibilité de replacer la session, en prime elle perdra son opportunité d'enregistrer car on a plus de créneau pour votre journée.

— Bordel... Il faut que j'aille la voir...

— T'as dix minutes. »

...

Contre toute attente, Oly parvint à rétablir – convenablement – l'état physique de Lady, elles rentrèrent dans le studio avec la peur au ventre. L'une pour son désastreux numéro de décuite, l'autre car elle s'inquiétait de ne pas être à la hauteur. Aux yeux d'Oly, le débit de parole de la londonienne était incontestablement fantasque, quand Lady se montrait au maximum de ses capacités vocales, peu d'artiste lui arrivait à la cheville. Finalement, Oly craignait de ne passer son temps qu'à admirer Lady au lieu de chanter ses propres parties.

Cette journée allait définitivement être un jour de défi pour tous dans le studio numéro « 5 ».

...

Les basses résonnaient contre les murs du studio, les ingénieurs son faisaient de leur possible pour que leur paie de fin de mois ne soie pas réduite par un énième excès de colère de la part de la patronne. Les deux artistes présentes dans le studio avaient enregistré le refrain de la fameuse collaboration, cependant, Oly ne parvenait pas à trouver le rythme adéquat pour les couplets. Lady Leshurr, bien que difficilement remise de sa soirée, n'avait peu, voire pas du tout de mal à débiter toutes les punchlines qu'elle avait sous le coude. Contrairement à elle, Oly peinait à s'inspirer, elle se trouvait ridiculement anecdotique dans le morceau, pourtant il s'agissait de son propre album...

« Stop ! Stop on arrête ! Vous là, faites une pause ! Que tout les ingés sortent ! Cria Em en claquant bruyamment dans ses mains fraîchement vernies d'un noir absolu.

— C'est parti... Ronchonna la marseillaise le visage dépité. Lady ne comprenait pas le français mais elle comprenait largement l'agacement de sa collègue. Écoutes Em, j'suis pas encore en train de pleurer alors évites moi un discours moralisateur.

— C'est pas ça. Il y a quelque chose qui cloche et tu le sais, outre ton rythme outrageusement pas bon, tu n'es pas dedans. Il te manque quoi ? Des basses ? Un tempo ? Dis moi et j'arrange le truc.

— Premièrement, si tu pouvais arrêter de faire ce truc avec ton crayon, pourquoi t'es aussi agitée ? C'est moi ou c'est toi qui chante ? Sans ça, l'éclairage me fait mal à la tête et le café n'est clairement pas un café ! Et-

— Doucement Mariah Carey, j'ai dit ce qu'il te manquait, pas un saut dans un univers alternatif. Mon dieu... Bon tu sais quoi ? On reprend tout. Arrête de boire du café, t'en as pas besoin. L'équipe ! On reprendre, maintenant ! »

Et finalement, Em n'avait écouté aucunes des doléances de son artiste, elle restait fidèle à elle-même en se résignant à perdre davantage de temps.

La session reprit, les deux artistes parvinrent à trouvé une cohésion dans leur musicalité, contre toute attente, ce fût la londonienne qui se mit en retrait dans sa puissance de voix pour laisser la place à la cadette. Lady adorait rapper pour faire profiter le monde de sa plume mais elle respectait encore plus de permettre à ses consœurs de partager leurs écrits.

La chanson parlait du vécu respectif des deux femmes, d'une manière bien personnelle, chacune parvenait à exprimer leur force, elle énonçait les moments difficiles qu'elle avait dû traverser dans leur enfance. D'aucun pourrait dire que le texte est largement prévisible, que la thématique bien qu'universel, pourrait empêcher le public d'y trouver une authenticité, pourtant, par le timbre de leur voix, leur intonation et leur honnêteté, Oly et Lady réussissaient haut la main à partager toute l'émotion qu'elle ressentait au fond d'elles.

L'enregistrement se termina par les applaudissements de l'équipe technique, tous se félicitèrent d'avoir tenu tout ce temps sans avoir pris le risque d'arracher la jugulaire de son voisin.

Lady prit Oly dans ses bras, la félicitant à répétition pour son talent et sa bienveillance, bien évidemment par des termes qu'Oly comprit approximativement mais au fond, ce qui comptait c'était qu'elle reçoive la reconnaissance d'une de ses artistes préférés. 

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Mon dieu ça fait combien de temps ?? J'en étais à oublier mon mot de passe Wattap carrément... 

Bientôt 2023, j'ai intérêt à revenir en force !