La cohabitation devient complexe mais je suis reconnaissante de compter sur le calme et la bienveillance d'Alexandre. Je me suis installée dans la chambre d'amis, prétextant le besoin de dormir au calme sans les ronflements de papa, ni son réveil à l'aube pour se rendre au travail.
Il m'adresse peu la parole et je respecte son besoin de distance. En présence de Tiago, nous nous assurons que rien ne transparaisse. Mais, les enfants ont une sensibilité telle qu'il nous paraît important de ne pas attendre davantage pour tout clarifier auprès de lui.Ce soir, Alexandre s'affaire en cuisine pour finir de préparer le repas avec vélocité. Une omelette accompagnée d'une salade composée. Simple, mais efficace. Dommage d'attendre autant pour se saisir des obligations ménagères.
— Papa, tu as trouvé encore plein de trésors à Paris aujourd'hui ?
— Oui, on a même trouvé des morceaux de plusieurs trésors. Plein d'objets enfouis sous terre, qu'on va essayer de rassembler, comme un puzzle.
— On pourra aller les voir dans le musée ? Tu avais dit que ce sera dans un musée, hein ?
— Oui, c'est possible, mais pas tout de suite, et on ne sait pas encore dans quel musée ils seront conservés.
— Maman, on part quand au Portugal ?Les enfants ont l'art et la manière de changer de sujet à une vitesse fulgurante. Intuitivement, Tiago a bien compris qu'il fallait s'adresser à maman pour l'organisation du grand départ. Si jeune, si perspicace...
— Justement on avait l'intention d'en parler ce soir, je lui réponds.
— Tu sais, mon chéri, Nicolas a besoin que je reste à Paris pour continuer les recherches.Malgré mon départ, Alexandre me soutient en corroborant une raison professionnelle. Je ne peux pas lui retirer ses qualités. J'aurais tant souhaité que les choses se passent autrement.
— Tu vas rester ici et nous on part, c'est ça ?
— Oui, tu vas partir avec maman et tata Sabine.
— Chouette tata Sabine vient avec nous ! s'écrie-t-il avant que son visage ne s'assombrit. Mais, je vais être triste sans toi papa...Alexandre s'investit au quotidien depuis notre discussion. Mais ses efforts ne produisent pas l'effet espéré, comme si j'étais devenue hermétique à tout. Attendre la chute pour se relever me parait fou. Le plus simple aurait été de l'éviter, voire de s'accrocher aux parois et remonter doucement pour ne pas se fracasser au sol... Je chasse cette image inutile et je décide de voler au secours d'Alexandre.
— Tu te souviens des appels avec la caméra du téléphone quand j'étais à l'hôpital ?
— Ah oui, c'était drôle, on pouvait même faire des grimaces avec les oreilles de chien ! répond-il en référence à une des applications du smartphone.
— Exactement, et bien on pourra faire pareil avec papa, il nous racontera ses journées et nous aussi. C'est super, non ?
— Ouiii !
— Et je viendrai vous rendre visite en week-end, compléta Alexandre.
— Et quand t'auras ramassé tous les trésors, tu vas rester tous les jours avec nous, là-bas ?
— On verra tout cela le moment venu, ne t'inquiète pas.
— D'accord, papa.Je me réjouis d'avoir un enfant de cinq ans, sa perception de la situation aurait été tout autre à l'adolescence. Il n'est pas question que Tiago soit privé de son père. Nous nous étions préalablement mis d'accord sur ce point essentiel avec Alexandre qui ne s'imagine pas sans contact avec son fils. Les prix des billets d'avion sont accessibles, et la courte durée de vol pour aller jusqu'à Faro en Algarve, à proximité de Falésia lui permettra de s'y rendre régulièrement.
Eu égard à son jeune âge, nous avons choisi de sublimer les choses et ne pas lui parler de rupture, et puis finalement, je ne suis pas sûr qu'il en soit réellement une.
VOUS LISEZ
Les falaises ocre
Ficción GeneralQue feriez-vous si la maladie faisait irruption dans votre vie ? Delfine a trente ans, elle est infirmière, mariée à Alexandre et l'heureuse maman de Tiago, cinq ans. Elle apprend être atteinte d'un cancer, sa vie prend un tout autre virage. Elle co...