Le brouhaha et les rires puérils de nos conversations nocturnes frappent encore mes oreilles en ruines. Ils cognent contre ma tête, ronflent, remuent, grognent. Je me souviens encore, quand je leur racontais ma vie. Ca les faisait marrer, et parfois, quand je me livrais trop, me risquant, sous le poids de la tristesse, à quelques confidences morbides, je sentais leur désapprobation m'écraser.
Avec eux, savoir comment secomporter, ce qu'on pouvait faire, ce qu'il ne fallait pas dire, pour avoirleur sympathie, gagner leur confiance, éviter leurs jugements, c'étaitcompliqué. Moi, ça me fatiguait. Leurs manières. Leur ton doucereux. Leursemblant de bienveillance. Leur tolérance étalée aux yeux de tous. Leurs leçonsde morale. Etais-je à la hauteur ? Digne de leur perfection ? Un faux pas,c'était comme si la terre s'ouvrait, m'engloutissait. Alors j'avais envie demourir.