4-Ève

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Cette conversation m'a épuisé. La peur du contact, cette proximité incendiaire qui était déstabilisante, déroutante. Son parfum flottant encore dans l'air, me collant à la peau. Une note boisée et chaude qui procure une sensation de confort. La douceur de sa peau quand nos mains sont entrées en contact. Tout chez lui respire la tentation, le désir et j'ai peur de succomber. La dernière fois que j'ai ressenti ça, l'enfer a remplacé la lumière, la peine a remplacé la joie et me voilà aujourd'hui à plusieurs kilomètres de mon ancienne vie, à cause d'un simple contact.

Je dois devenir amnésique et avancer.

J'ai le droit à une visite improvisée. Alex ne cesse de parler, il me montre les lieux de rendez- vous importants, les principales salles et le gymnase. C'est un complexe sportif tout en longueur, la façade est grise avec des poutres rouges. Il y a une partie de la devanture qui est recouverte d'une pancarte avec le nom de l'équipe de gym qui est semblable à celui de l'équipe masculine de hockey.

On remercie l'imagination les gars.

Les Eagles de Boston. Si je prends en compte les compétitions passées en Californie, ou au niveau national, cette équipe est loin d'être la meilleure et me retrouver ici aujourd'hui me donne des frissons d'effroi.

J'ai les mains moites, les jambes qui tremblent et un nœud à l'estomac. Je ne me sens pas à ma place. Voilà deux mois que je n'ai pas pratiqué ce sport. Des semaines que j'essaye tant bien que mal de réussir mes routines avec des figures simples mais je retombe sur les fesses à chaque fois. J'ai envie de repartir dans mon lit, de m'enfermer à double tour et d'abandonner.

Peureuse, me crie ma conscience et elle a surement raison. Ma tentative pour cette sélection s'avère périlleuse voire impossible. Je cours à la catastrophe.

Je reste face au bâtiment alors qu'Alex fonce vers l'entrée, il se retourne et son regard se veut interrogateur. Je respire un bon coup avant d'avancer et de rejoindre mon jumeau.

— Alors souris tu es prête? m'interroge-t-il tout en sortant une pomme de sa poche.

— Si on te demandait de participer à un match de la NFL, tu serais prêt?

— Question conne, réponse qui l'est tout autant. soupire-t-il. Ève tu es prête, ne panique pas.

— Ça fait deux mois que je n'ai pas fait de routine complète et dès que je fais mon yurchenko je me vautre en beauté sur le praticable.

Il sourit bêtement avant de me donner une légère tape sur le dos et de me pousser à entrer.

Je vous en supplie je veux un autre frère, celui là me tape sur le système.

C'est avec les mains moites que je pénètre dans le vestiaire. Je décide de me mettre à l'écart du reste des participantes. J'ai besoin de respirer, de me concentrer sinon je vais flancher. Mon sac de sport est là devant moi, sa couleur bleue ne me procure que de la haine et le justaucorps qui est à l'intérieur me donne la nausée. J'ai envie d'abandonner.

Respire Ève, tu es forte, tu peux oublier et avancer. La mémoire à court terme, elle t'aide à être en phase avec l'instant présent.

Une fois prête, j'ai toujours cette étrange sensation qui brûle dans ma poitrine et qui m'empêche de respirer, c'est comme un ouragan qui prend cet essor dans chaque cellule de mon corps et cette sensation est désagréable. Ce sentiment étranger persiste alors qu'on m'attribue un numéro pour la sélection. Le 21, il est associé à l'optimisme, la créativité et l'expression. J'espère que c'est vrai et qu'il ne va pas me porter préjudice.

L'entraînement est plutôt simple, on doit chauffer nos muscles, faire des figures simples comme la roue ou une traversée sur les mains, le corps tendu. Seul problème, la dynamique n'existe pas. La capitaine est léthargique, elle ne s'applique pas et préfère rigoler comme une cruche au lieu de diriger l'entraînement. Cela part donc rapidement en une lente cacophonie. Comment tu peux prétendre diriger une équipe si tu ne sais pas recruter de nouvelles têtes?

AmnésieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant