L'Héritière [ en pause ]

Chapitre 11 - Voix diabolique

J'observe le paysage défilé à travers la vitre de la voiture tout en restant silencieuse, et pour une fois j'apprécie le jeu du silence avec Andrea. Après ce tout ce qu'il vient de se passer, je n'ai aucune envie de parler, et encore moins avec lui.

La beauté du paysage rend le moment plus supportable, les petites maisonnettes aux couleurs orangées apportent un ton chaleureux à la ville de Naples. Cette ville si belle en apparence, les petits commerces où les habitués se retrouvent renvoient un sentiment de convivialité, l'architecture antique illumine la ville et rappelle son histoire. Sans parler de la douce mer qui apaise mes pensées meurtrières envers le monstre qui conduit la voiture.

On pourrait croire en apparence qu'il s'agit d'une merveilleuse ville où les habitants vivent paisiblement dans un cadre somptueux. Mais si on s'attarde sur les détails on comprend rapidement que le décor n'est qu'illusion, le petit café au coin de la rue où les vieux hommes prennent un verre est en réalité un lieu d'échange de drogue et autres pour la Camorra.

L'épicerie en face a des accords avec Roberto, même s'ils ont été signés sous la contrainte ceux-ci permettent au commerce de poursuivre son activité. L'épicier accepte de concéder une partie de la chambre froide, et en échange il peut continuer son travail.

Mais pour comprendre cela il faut tendre l'oreille et écouter les discussions entre les habitants, il y a une manière beaucoup plus évidente de réaliser l'influence de la Camorra. Il suffit de regarder la réaction des gens quand nous arrivons dans la ville avec le 4x4 d'Andrea, pour les personnes qui n'habitent pas ici ce n'est qu'une voiture comme une autre.

Pourtant les habitants ici reconnaissent très vite qu'il s'agit d'une voiture de la Camorra. Les jeunes femmes marchent plus rapidement en baissant la tête, les familles se dépêchent de prendre leurs enfants dans leurs bras et se cacher pour se protéger, les volets des maisons se ferment à une vitesse affolante. Puis il y a les personnes qui se cachent, non pas parce que ce sont de simples innocents qui veulent éviter les problèmes, mais parce que ce sont des ennemis de la Camorra.

La peine vient percer mon coeur lorsque mon regard croisa celui d'une petite fille apeurée qui ne comprenait même pas ce qu'il se passait. La Camorra contrôle la ville entière qui est soumise à l'omerta depuis des années. Tant de souffrance à cause de mon père, un être aussi minable que lui qui n'a pas seulement brisé sa fille, mais une ville entière.

Plus j'apprends des choses sur les activités de mon père, plus ma peine se transforme en colère. Une rage qui me prend aux tripes de vouloir lui infliger ce qu'il fait endurer aux autres, j'ai ce besoin insatiable de prendre ma vengeance et venger chaque vie qu'il a brisé, en commençant par la mienne.

Mais il n'est pas le seul sur la liste des personnes qui m'enrage, son fils est également en top du classement. J'ai qu'une envie c'est de lui faire fermer son gosier à ce vampire, tuer son ego sur-dimensionné.

Puis viens ce monstre d'Andrea qui ne mérité que de se faire humilier comme il vient de me le faire. Me forcer à demander de retourner à la résidence, que je cherche à fuir depuis des mois, jamais je ne pourrais oublier ça. Jamais je ne pourrais oublier la sensation de mes entrailles qui se tordaient sous la peur de me faire renverser par une voiture.

Mettre ma vie en danger uniquement parce qu'il n'a pas supporté que je lui tienne tête, parce que monsieur le consigliere ne peut pas tolérer qu'une femme puisse ne pas le craindre. Ce n'est pas en me balançant en plein milieu d'une autoroute qu'il va me faire peur, les voitures me faisaient peur, mais pas lui.

Tout ce qu'il a fait c'est me mettre encore plus en colère, me motivant d'autant plus à partir de ce lieu maudit. Dans l'instant T je me tais parce que si j'ouvre la bouche je sais que je ne maitriserais plus ma colère, et cela me portera préjudice pour réussir à m'enfuir. Mais s'il pense que son acte m'a effrayé bien au contraire, il m'a prouvé que je me rapproche de plus en plus de mon objectif, il n'est même plus capable de me faire peur lui-même, et en plus il ne peut pas me tuer.