Chapitre 5

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L'intérieur de la résidence des Choi n'était pas un endroit qui lui était familier. Son travail lui demandait de ramener Soobin jusqu'à la porte, et les gardes assignés à la sécurité du domicile prenaient le relais. Depuis qu'il avait été embauché, il n'était retourné à l'intérieur qu'une seule fois, pour régler des technicalités de paiement avec la secrétaire. Et il était parfaitement content de ça, mais comme d'habitude, Soobin n'était pas satisfait.

« Tu pourrais juste venir boire un café, argumentait-il. Ce n'est pas contraire aux termes de ton contrat de faire une pause café après ton service.

– Boire, non, mais boire dans ton salon, si, répliqua Yeonjun, tournant le volant.

– Viens juste dans ma chambre alors !

– Ce serait tellement pire, soupira-t-il.

– Et puis, mon père est à une conférence jusqu'à ce soir, il ne sera même pas là.

– On doit passer par deux gardes pour rentrer, tu crois qu'ils vont tout à coup devenir aveugles ? Si tu veux me persuader de me mettre à dos mon patron, essaye au moins d'avoir des arguments qui se tiennent. »

Soobin marmonna quelque chose de couvert par le bruit du moteur. Depuis l'anniversaire de son ami, quelque chose dans son comportement avait subtilement changé. Les regards furtifs pendant les cours étaient devenus délibérés, ses conversations en voiture plus personnelles. Il savait qu'il essayait de se rapprocher, et Yeonjun ne trouvait pas comment y mettre un stop. Il ne savait même pas s'il le voulait vraiment.

« Arrête la voiture.

– Quoi ? fit Yeonjun, confus.

– Gare-toi. Il y a une place juste là. Arrête la voiture. »

Surpris par son ton autoritaire, il obéit, rangeant la voiture sur le côté et coupant le moteur. Soobin avait l'air frustré, bien plus que d'habitude, et c'était un peu inquiétant. Il attendit qu'il parle, de peur de dire quelque chose de travers.

« Je passe ma vie à travailler. Je sais que c'est ce que ça demande pour valider mes études, mais c'est en train de me rendre fou. Je travaille à l'université, je rentre, je travaille à la maison, je repars à l'université. Je sais que tu n'as pas le droit de venir. Je le sais, mais ça me rend malade. J'ai besoin de faire quelque chose d'autre, et tout ce qui semble possible, c'est prolonger ce moment avec toi, et je suis désolé d'insister autant et le mettre sur tes épaules, mais j'ai l'impression de me noyer, et je ne sais plus quoi faire. »

Il déversa ses mots comme un raz-de-marée après un barrage qui lâche, et finit avec le visage entre les mains, courbé sur lui-même. Choqué, Yeonjun tendit la main vers lui. Son stress n'était pas une surprise. Il l'avait vu pleurer discrètement après une épreuve ratée, et il lui avait passé un paquet de mouchoirs sans un mot. Soobin ne parlait plus beaucoup le matin malgré ses efforts évidents, embourbé de fatigue. Son groupe d'amis était maintenant rarement au complet le midi, les partiels approchant. Il voyait tout ça. Il n'était simplement pas sûr de comment aider.

Sa main gantée se posa sur son épaule, et Soobin remonta du regard le long de son bras, examina son visage, avant de laisser retomber sa tête et agripper ses cheveux à pleines mains.

« Je suis désolé », dit Yeonjun, et il le pensait. « Est-ce que tu veux un peu marcher pour te libérer l'esprit ? Il y a un parc juste à côté. »

Soobin hocha la tête, et se détacha immédiatement. Ils sortirent du véhicule ensemble, Yeonjun verrouillant derrière lui, et remontèrent en silence le grillage jusqu'à l'entrée. Ce n'était pas un parc très impressionnant. On pouvait en voir le grillage opposé, les arbres étaient épars et maigres, et quelques structures pour enfants étaient parsemées ici et là. Il faisait un peu frais, alors personne d'autre ne s'y trouvait. Soobin prit de grandes inspirations, l'air s'échappant de ses lèvres formant une brume pâle.

Let It All GoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant