Chapitre 27 - Tout feu, tout flamme

14 1 2
                                    

PEARL

Nous nous étions assoupi peu de temps après la réalisation de mon œuvre sur le bras de Ghost, il n'avait plus rien dit après mon explication sur le phœnix et s'était contenté de m'adresser un sourire. J'avais attendu qu'il s'endorme avant de répondre enfin à Yoan, et de dissiper ses peurs. Je lui avais raconté qu'il y avait eu un souci dans la soirée et que je n'avais pas pu faire la transaction, mais que j'avais toujours la marchandise avec moi et que nous pourrions faire l'échange un autre jour. J'en profitai pour lui dire que je ne serais pas disponible dans les prochains jours, problème de famille. J'étais maintenant habitué à raconter toutes sorte de mensonges pour m'en sortir, et le point positif avec Yoan, c'est qu'il ne posait jamais de questions. Ce soir-là quand il m'avait trouvé complétement ivre au bar, il avait bien compris que je n'avais pas une vie comme celle du commun des mortels. Apparemment, cela avait l'air de lui convenir autant qu'à moi. Il y a peu de gens sains avec une vie bien rangée qui décident du jour au lendemain de tout foutre en l'air pour un frisson passager. Ma vie à moi était un frisson dans son intégralité. Je ne savais plus quoi faire de ma vie, puisque chaque endroit où j'allais, les démons me suivaient. Et je mettais tout autant Nate et Ghost dans ce lot. Finalement, je m'étais habitué à son absence et c'était mieux comme ça. Plus il était à mes côtés, plus il nourrissait en moi l'envie de me venger de toutes ces personnes qui pensaient avoir un droit sur ma vie et sur ma tête. Je n'appartenais à personne, et j'étais loin d'être un trophée. Il était hors de question que les batifolages passés de ma mère me collent jusqu'à la fin de mes jours.

Tout ça était terriblement injuste. Et depuis bientôt un an maintenant, je passais mon temps à m'inquiéter. Toute ma vie se résumait à une angoisse si puissante que je perdais du poids à vue d'œil, je rongeais mes ongles, et je m'arrachais la peau des mains et des doigts. Il m'arrivait de repenser à la fille lumineuse que j'étais à mon entrée à l'université. J'étais enfin loin de ma mère et de sa névrose, je pouvais enfin découvrir le monde et ses bienfaits. Malheureusement, je comprenais à présent d'où venait son inquiétude permanente, et j'étais à des années lumières de la personne que j'étais. Mais finalement, je ne savais plus quelle version je préférais. La jeune adulte peu confiante, naïve et qui aimait puissamment - ou l'autre qui était devenue forte ? Avant que je ne puisse me répondre à moi-même, il ouvra les yeux. Il clignait frénétiquement ses paupières, comme s'il essayait de remettre les choses en place dans sa tête. Je devinais donc qu'il venait très certainement de dissocier.

- Nate, c'est toi ? Demandais-je.

- Ou-oui, c'est moi. Bordel j'ai un mal de crâne...puis mon bras, j'ai l'impression qu'on me l'a arraché.

- Désolé, ça c'est moi.

Il me considéra un instant, sans rien dire. Puis, en prenant appui sur le canapé, il se mit en position assise.

- Je me souviens de quasiment tout, si tu savais comme je suis désolé Pearl. Je me suis battu avec l'autre tellement de fois que je ne les compte même plus, quand il a osé te faire du mal. J'ai tout fait pour prendre le contrôle, je te le jure. Mais il devient de plus en plus fort, et je n'arrive plus du tout à avoir la moindre emprise sur lui. J'étais semi-conscient pendant trois mois, il a décidé de tout encaisser sans rien dire. Les coups, les tortures, les milliards de questions qu'on nous a posés sur toi... C'était un bordel pas possible. Puis j'ai tout compris, je viens de réaliser que j'avais vraiment les réponses à toutes nos questions. Ta disparition, ta mère, ce qui s'est passé entre les gangs. Tout. Et puis Max... Oh mon dieu...Souffla-t-il, la voix brisée.

Je n'arrivais pas à éprouver de la peine pour cette nana, mais même si elle était terriblement mauvaise, j'étais resté complétement stupéfaite de savoir que c'était Nate qui l'avait mise dans un sale état. Bien qu'il ne l'eût pas réellement tué, Ghost s'en était chargé. Je le regardais en silence, pendant qu'il essayait de camoufler les centaines de larmes qui lui coulaient le long des joues. Je ne savais pas quoi lui dire, ni quoi faire. La colère était toujours bien présente, et pesait sur les deux personnes qui vivaient à l'intérieur de cette caboche. Je savais que Nate n'avait aucun contrôle sur les dissociations, ni sur ses souvenirs. Mais je ne pouvais m'empêcher de me dire que ces deux-là ne me disaient peut-être pas toute la vérité. Je ne connaissais rien aux troubles mentaux, et celui-ci en particulier était bien trop complexe pour moi.

Système LimbiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant