Chapitre 15

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La limousine me dépose devant chez moi. Je n'ai pas vu les kilomètres défiler ni le temps passer. J'agis comme une automate, je ne bouge pas, ne cille pas. Je suis lessivée, épuisée, je n'ai plus l'énergie de pleurer ou celle de m'énerver. Je suis cassée. Si Aaron m'avait fait du mal, ce que m'a fait Seth est bien pire.

Je n'étais pas sûre de mes sentiments, mais au vu de la douleur que je ressens, je peux à présent en être certaine. Mes yeux ne quittent pas mon reflet sur la vitre teintée. Je suis pathétique, le mascara a coulé sur mes joues et l'image que j'y vois est à l'opposé de celle que j'ai croisée quelques heures plus tôt. Je ne réagis que quand le chauffeur vient m'ouvrir la porte.

— Ça va aller, mademoiselle ? me demande-t-il concerné.

J'acquiesce. Mais, c'est faux.

Je le remercie après qu'il m'ait aidée à sortir du véhicule. Combien de filles avant moi a-t-il dû aider ? Mes mains poussent le portillon pour entrer dans le jardin et je remonte ma petite allée puis les marches menant jusque chez moi. Mes doigts tremblants peinent à sortir mes clés de ma pochette. J'enfonce la clé, ouvre la porte et la referme derrière moi. La maison est plongée dans le silence. Maman doit être à l'hôpital. J'aurais voulu me réfugier dans ses bras et en même temps, elle était tellement heureuse de me voir partir que je ne voudrais pas qu'elle sache ce qui s'est passé. Je m'adosse à la porte et soupire, lasse.

Je remonte lentement les escaliers pour me rendre dans ma chambre. Quand j'y entre, mon regard tombe sur ma coiffeuse en désordre. Mes affaires de cet après-midi sont encore éparpillées partout. Ma tête se relève et je croise mon regard dans le miroir. Je le fuis et toutes les émotions que j'essayais de contenir sortent. Je me mets à pleurer dans cette robe qui me rappelle le cauchemar que je viens de vivre.

J'ai l'impression qu'elle m'étouffe, qu'elle me serre, qu'elle m'oppresse. Je veux juste m'en débarrasser, l'enlever pour pouvoir oublier, pour pouvoir respirer. Prises d'un accès de colère, mes mains tirent sur les manches et en arrachent les coutures. La robe tombe en lambeaux et, à bout de souffle, je m'écroule à genoux, en sous-vêtements. Je me sens si pathétique, si stupide. Enragée, j'envoie la robe voler à l'autre bout de la pièce.

Je me rends dans ma salle de bain et allume le robinet. Je regarde, perdue, l'eau couler, sans s'arrêter. Quand je prends conscience que la baignoire va bientôt déborder, ma main coupe l'eau, par automatisme. Je me déshabille complètement et m'y plonge. C'est brûlant. Mes genoux me piquent et je me rends compte que je me suis éraflée en tombant. Comme si mon cœur n'était pas assez marqué. Fallait-il aussi que mon corps en garde des traces ?

Je m'enfonce plus profondément dans la baignoire, rejette l'air que je retenais et plonge ma tête sous l'eau. Je veux juste cesser de respirer quelques instants. J'ai juste besoin d'étouffer la douleur. Je tente de faire le vide, mais tout ce qui me vient ce sont nos moments ensemble. Tout n'était donc que mensonges ? Ses rendez-vous de dernières minutes et ses affaires à régler, était-ce pour la retrouver ? Je ne sais pas si je pleure encore, car l'eau brûlante engourdit ma peau.

J'émerge enfin et reprends une grande inspiration. Je reste dans l'eau, le regard dans le vide, les pensées à mille lieues d'ici. Je suis sortie de mes réflexions par la sonnerie de mon téléphone. Mon cœur se serre, il me fait mal, agonise. J'ai l'impression qu'une dague s'enfonce profondément, charcutant en minuscules morceaux mon cardiaque. Je ferme les yeux, tente de l'ignorer, mais la sonnerie ne cesse que pour reprendre. Mon cœur tambourine et voudrait sortir, mais pour aller où ?

Je repose ma tête en soupirant et ferme les yeux, douloureux d'avoir trop pleuré. Je ne vois plus rien, n'entends plus rien.

Je me suis endormie et me réveille en sursaut. L'eau est froide, ma peau est fripée d'être restée trop longtemps immergée. Je me relève doucement et en sors. Je suis gelée et mes genoux me tirent. Mes yeux viennent les analyser et constatent que je ne me suis pas ratée. Une fois sèche, je rejoins ma chambre nue et attrape un t-shirt dans mon placard. Je passe une culotte et me glisse sous la couette. Épuisée, je me rendors aussitôt.

Plutôt mourirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant