Deuxmois plus tard :
Nous sommes déjà en février. Les fêtes sont passées, accompagnées d'une tristesse infinie. Je passe désormais mon temps à me disputer avec maman. Elle n'est jamais là et, si au début je comprenais, aujourd'hui, je lui en veux terriblement. Je voudrais la réveiller, la secouer, mais rien n'y fait. Elle reste butée. Alors je la laisse faire ce qu'elle veut, s'enfermer dans ses espoirs. Moi je n'en ai plus. Surtout maintenant que je dois marcher avec des béquilles.
Suite à ma chute, je suis allée voir Jérôme. Il trouvait que marcher sans devenait trop dangereux. Une chute dans les escaliers, sur la route. Tout pourrait aller trop vite. Alors maintenant, je marche avec. Je les déteste. Je les fixe parfois quand je suis sur mon lit et je les maudis de rendre tout ça trop visible à mes yeux. Le psy, que je consulte depuis un mois maintenant, m'a demandé de les regarder comme une aide et non pas comme une punition. J'aime bien mon psy, il est gentil. Il a de bons conseils, mais, pour être honnête, je n'arrive pas à appliquer la plupart d'entre eux. Ils sont bien beaux, mais je n'en suis pas encore là.
Je soupire avec lassitude et regarde à présent ma fenêtre parsemée de gouttes d'eau. Il pleut encore. Il n'a presque pas arrêté depuis deux mois, depuis cette fameuse nuit.
J'ai tenté de joindre Seth pendant plus d'une semaine. Sans succès. Je suis allée jusqu'à me déplacer à ses bureaux. Blondie, toujours là, était fière de m'annoncer que j'avais interdiction de monter. Je suis restée assise dans le hall, des heures entières. Combien ? Je ne saurais dire.
Marie a fini par descendre. Elle semblait désolée quand elle m'a annoncé qu'il ne pouvait pas me recevoir. J'ai compris à sa grimace que je devais remplacer le verbe pouvoir, par vouloir. Ça m'a fait mal, mais, au moins, il est passé à autre chose. Dès lors, je l'ai laissé tranquille. J'ai loupé ma chance. Cette dernière entrevue était le signe que les choses devaient rester ainsi.
Hier, Lucas, Julia et moi étions dans ma chambre. Nous parlions de tout et de rien quand le téléphone de Julia s'est mis à sonner. Je l'ai vu blêmir et fuir mon regard. Je l'ai menacée quand elle a refusé de me montrer ce qui l'avait mise dans cet état. À contrecœur, elle m'a tendu son téléphone. Je crois que ce que j'y ai lu restera à jamais gravé dans ma mémoire... Un article titrant « Mariage presque princier chez les Wes-Lambert, demain. » J'ai ravalé mes larmes. Je ne pleure presque plus, je n'en ai plus ni l'envie ni la force.
Lucas m'a regardée, il semblait désolé. Je l'ai rassuré et leur ai confirmé à tous les deux que tout allait bien. C'était complètement faux. Mais qu'auraient-ils pu y faire ? Rien. Rien du tout.
Alors voilà, aujourd'hui j'ai besoin de partir. De quitter Paris, juste quelques heures. Juste le temps d'une journée. Je suis à la gare Austerlitz, sans destination en tête. Mon regard observe avec attention le panneau d'affichage à la recherche de la ville qui me permettra de respirer le temps de quelques heures.
J'ai pris quelques affaires de rechanges dans mon sac à dos, de quoi tenir une nuit ou deux. Au cas où je ne voudrais pas revenir. Mes yeux parcourent les horaires d'entrée en gare lorsque mon regard s'arrête sur « Étretat ». Je me souviens qu'avec papa et maman nous y allions souvent quand j'étais petite. Je m'approche de la borne et paye mon billet, puis me dirige vers les quais où j'attends patiemment que le train entre en gare.
Vingt minutes plus tard, je suis assise, destination Étretat. La Normandie me fera sans doute du bien. Je dois fuir de toute façon. Peu importe où. Je place mon casque sur les oreilles et lance ma playlist. Celle-ci a considérablement changé depuis quelques mois. Les titres pop ont laissé place aux titres plus sombres, plus tristes. J'observe le paysage défiler et changer. Les murs bétonnés disparaissent gentiment pour laisser place à la campagne et à ses étendues de verdure. Je ferme les yeux avec, pour la première fois depuis des semaines, une sensation de sérénité. Je m'imagine danser. Voler. Alors qu'il y a quelques semaines c'était une torture, aujourd'hui ça m'apaise. La maladie peut me prendre mes jambes, elle n'aura pas ma tête. Quand je ferme les yeux, j'enchaîne les figures, les sauts, mon corps accompagne la mélodie.
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Plutôt mourir
RomanceEn entrant au conservatoire de danse de Paris, Maxime réalise enfin son rêve d'enfant. Elle deviendra une danseuse renommée, c'est sûr. Mais très vite, rien ne se passe comme prévu. Le niveau est élevé et son corps peine à suivre. Et c'est sans comp...