9. Livre-toi

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Amadeo

— Vous me parlez souvent de cette fille, mais pas de vos parents. Vos séances sont de leurs fautes.

Mon sang ne fait qu'un tour pour surchauffer. J'ai toujours détesté quand ma psychologue dit « vos parents », alors que tout ce cirque est dû à mon paternel. C'est de sa faute si je dois me payer des séances. Étant enfant, il n'a jamais voulu me payer les séances, alors maman le faisait en secret. Elle a eu du mal à garder le secret, mais elle a tout de même réussi.

— Tout ça est à cause de mon père. Non de ma mère. Et je vous interdis de prétendre qu'elle m'a fait du mal.

Maman n'est pas méchante. C'est elle qui a tout fait pour que j'ai une bonne enfance. Elle est seulement tombée amoureuse de la mauvaise personne.

Je l'avais suppliée de partir, à seulement huit ans. J'étais tellement terrifié que j'avais la nausée à chaque fois que je devais rentrer à la maison. Je ne devais pas dire un mot de travers, et même si je le faisais, ce n'est pas à moi qu'il s'en prenait. C'est impossible, parce qu'il y avait de gros risques et il ne pouvait pas se le permettre. Alors il a trouvé un autre souffre-douleur.

Maman. Je n'ai toujours pas réussi à la sortir de cet enfer. Et j'ignore si j'en serai un jour capable. Si j'ai le malheur de me prendre un coup perdu, le risque de perdre la vie est énorme.

— D'accord. Parlez-moi de votre mère... ou de votre père.

L'appréhension dans sa voix s'entend. Tout comme le fait qu'elle titube son carnet dans lequel elle prend des notes. Ça fait plusieurs années que c'est ma psychologue, alors elle sait parfaitement que je réagis au quart de tour.

— Mon père est un connard qui garde ma merveilleuse mère sous son aile, réponds-je tandis que je me sens perdre le contrôle.

Mon père est un sujet sensible. Tout ça a commencé à cause de lui. J'allais parfaitement bien étant bébé, mais tout s'est aggravé quand j'ai grandi et que j'ai compris que les apparences étaient trompeuses.

Mon sommeil était gâché. J'avais constamment cette impression que quelque chose de mal allait se passer. À cause de ça, je restais assis à ma porte pour entendre tout ce qu'il se passait dans la maison. Maman m'ordonnait de m'enfermer à clé parce qu'elle avait peur qu'il me blesse, mais les murs n'ont jamais été assez épais pour camoufler la vérité qu'elle a essayé de me cacher.

Je n'étais pas un enfant stupide. En partie parce que j'ai grandi plus vite que la moyenne. Pas physiquement, mais mentalement. Je voyais et entendais des choses qu'un enfant de huit ans ne devrait pas savoir. Et se sentir faible et impuissant vous détruit mentalement.

Si je n'avais pas peur de mourir, j'aurais déjà sorti maman de ses griffes. Elle serait avec moi, en sécurité, et bien traitée. Après tant d'années de souffrances, maman mérite de vivre dans une maison qui ne l'effraie pas à chaque fois qu'elle passe la porte, elle mérite de trouver l'homme de ses rêves.

— J'ai écouté vos conseils, dis-je soudainement. À chaque fois que je ressens ces impulsions de colère, je m'enferme ou quitte l'appartement pour ne pas la blesser.

Ma psychologue prend des notes sur son carnet et j'aimerai les lire. Elle ne me prend pas pour un fou, hein ? Je ne veux pas qu'une autre personne me traite de la sorte.

— Ça arrive régulièrement ?

— Moins.

La réalité, c'est qu'elle m'apaise malgré elle. Ses tentatives d'énervement ne me donnent qu'une seule envie, c'est de sauter sur elle et de l'embrasser pour la faire taire. La détester me fait l'apprécier.

Another love - TerminéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant