Another love - Terminé

18. La peinture réunit les corps et les esprits

Ashya

Le voile de larme qui couvre mes yeux m'empêche de reprendre mes esprits. J'essaie de toutes mes forces de garder la tête haute, mais l'image d'Amadeo revient comme un boomerang. Il ne m'a pas fait suffisamment confiance pour me révéler la vraie identité de Lokia. C'est forcément de ma faute, j'ai fait quelque chose qui le contrarie. Sans ça, je ne vois pas ce que j'ai pu faire pour mériter un mensonge.

Tout le monde me ment sous le nez. Je déteste tellement ça. Mes larmes déçues et larmoyant roulent sur mes joues. Je les chasse frénétiquement du revers de la main. Papa m'a menti pendant un an. Lucas le fait constamment, au point d'ignorer mes messages. Et maintenant, c'est au tour du lézard. Qui sera le prochain ? Kyle ? Lucrezia ? Je ne supporterai pas une nouvelle trahison de leur part. Si on aimait vraiment quelqu'un, les mensonges ne devraient pas exister.

J'asperge mon visage d'eau fraîche et me regarde dans le miroir. J'ai l'air pitoyable. La nuit que nous avons passée ici m'a ramollie, bien que j'ai dormi dans la journée d'hier. Contrairement à d'autres, certains ont eu le sommeil lourd et ne se sont pas réveillés avant ce matin. Bien sûr que je suis contente qu'Amadeo ait eu une nuit de sommeil. Mais à côté de ça, il m'a laissé avec une montagne de questions.

Est-ce qu'il ne m'a rien dit au sujet de sa fille pour se protéger, ou la protéger de moi ? Est-ce qu'il regrette l'existence de Lokia dans mon esprit ?

Amadeo me laisse dans le flou. C'est ce qu'il fait constamment. Il n'est jamais blanc ou noir - sauf lorsqu'il est en pleine phase de bipolarité. Amadeo agit en croyant faire le bon choix, mais il se trompe. La vérité vaut bien plus qu'une montagne de mensonges ensevelie sous une épaisse couche de neige. Je ne lui ai rien exigé à part l'honnêteté. Je me sens comme une idiote qui a cru que - cette fois-ci - ça allait être différent.

Une couche d'acier renforce mon cœur alors que je sors des toilettes pour femme. Le couloir illuminé par des blocs de lumière aveuglante est bondé d'infirmiers, de médecin, chirurgien en blouse bleu foncé et de visiteurs. Je parviens à me frayer un chemin parmi eux pour rejoindre la chambre destinée à Lokia. Je reste en retrait, derrière la vitre avec quelques traces de doigts.

Les doigts d'Amadeo sont au creux des côtes de sa fille pour la chatouiller. Lokia s'esclaffe la bouche grande ouverte, les larmes aux yeux. Elle supplie son père d'arrêter, complètement hilare. Amadeo ne se laisse pas vaincre et continue de l'amuser.

Le regard insistant de Sofia sur moi devient persistant, mes pupilles tombent dans les siennes. Elle m'offre un sourire de toutes ses dents. Elle incline la tête d'une moue attristée alors elle m'invite à entrer. Mon cœur se serre dans sa cage thoracique. J'ignore si elle veut seulement être gentille avec moi ou faire la garce et m'envoyer un retour d'assesseur pour montrer qu'elle a tout ce que je n'ai pas : une famille.

Ce qu'elle ignore à mon sujet, c'est que ma famille, je l'ai construite. Elle ne s'est pas constituée par le sang, mais par l'amour que je leur porte. Mon père, Lucrezia, Kyle et Amadeo. Je n'ai pas choisi d'avoir cette famille, ce sont eux qui l'ont fait. On s'est mutuellement choisi. Et si nous devons tomber, alors on le fera tous ensemble. Si l'un de nous réussit, on réussira ensemble. La famille est faite pour élever chacun des membres sans en oublier un.

J'espère que Sofia n'est pas comme ça. J'espère sincèrement qu'elle ne me regarde pas de haut. Entre femmes, on doit se serrer les coudes alors j'espère qu'elle en a conscience.

J'entre malgré moi dans la chambre. Le sourire de Lokia est ancré sur ses lèvres alors même l'arrêt des doigts de son père parcourant ses côtes. Elle est assise en tailleur et secoue le bras de son père pour qu'il lui raconte une histoire. Cette petite maligne lui fait les yeux de biche alors il cède rapidement. Amadeo rapproche sa chaise du lit d'hôpital et pose ses coudes sur celui-ci. Il glisse une mèche de cheveux blond vénitien derrière l'oreille de sa fille et se lance.