La Riviera

𝑪𝒉𝒂𝒑𝒊𝒕𝒓𝒆 𝑰𝑽 - 𝑳𝒆 𝒑𝒐𝒊𝒅𝒔 𝒅𝒖 𝒔𝒂𝒏𝒈

𝓐𝓵𝓮𝔁𝓮𝓲 🦋

Saint-Tropez nageait dans la fête comme chaque soir d'été. Descendus du taxi, Nastia et moi arpentions le port à la recherche de nos amis. La blonde dans sa robe noire me calculait à peine ; marchant en avant comme si elle cherchait à me fuir parmi la foule effervescente.

Le soleil se couchait sur les façades colorées du village.

Je souhaitais rentrer à la villa en songeant au travail qui m'attendait. Cette soirée s'annonçait merdique avant même d'avoir commencé... Dotée d'une fade perspective, elle prenait du temps inutile sur mon planning et celui de la mafia.

Mais je souhaitais faire plaisir à Nastia après notre dispute matinale, quitte à retarder mon rendez-vous prévu avec mon lieutenant resté chez nous. Je jetais un œil au cadran argenté de ma montre : Vingt-heure à peine pointait le début de mon ennui futur.

Ma femme murmura discrètement dès lors qu'elle aperçut Irina et Dimitri dans la masse de touristes.

Faisons comme si tout allait bien...

La peau de son bras nu retrouvait le lin de ma chemise.

Le côté glacial de son caractère venait de fondre. Nouvelle femme, elle s'approchait du couple avec ce sourire subitement retrouvé. J'étais remonté dans son estime... Plus aucun retour en arrière n'était possible : Après de brèves salutations, notre groupe de quatre Russes en vacances pénétrait l'ambiance feutrée du restaurant camouflé dans un jardin.

Son nom brillait avec discrétion dans l'entrée faite de pins parasols.

La soirée s'annonçait longue...

💋

Irina et Dimitri incarnaient le mariage idéal et ça, ils le balançaient à la gueule de qui avait le malheur de les écouter...

La conversation du repas ne tournait qu'autour de leur complicité, de leurs gosses sages comme des images et d'autres interminables niaiseries jetées sur la nappe avec si peu d'humilité. Nastia, toujours dans les apparences, mimait leur comportement en s'agrippant à mon bras telle une jeune mariée.

Elle s'esclaffait ; envoyant sa tête en arrière dans un rire aussi juste que factice. Je me perdis parfois dans son jeu en croyant avoir retrouvée celle que j'avais épousée à dix-neuf ans. Cette fièvre de faux semblants l'ayant contaminée m'irritait autant qu'elle me rassurait.

Quelque part, j'avais l'impression que nous sortions la tête du trou... avant d'être rattrapé par la réalité. Tel un rêve se dissipant au réveil, je connaissais le futur de notre entente retrouvée. Les conflits revenaient inlassablement comme si la présence de l'un étouffait celle de l'autre.

Nastia et moi-même avions une image à tenir, mais à défaut de celle de nos amis, cette façade de bonheur mourait dans l'illusion. Pareille à l'or plaqué sur un vulgaire bijou de cuivre, elle cachait la misère sous le plus brillant des éclats.

La situation m'éreintait secrètement.

Je noyais mes tourments dans le vin blanc. Sa robe jaunâtre versée à profusion coulait dans ma gorge tel un antiseptique. Nastia continuait son rôle d'actrice en parallèle ; récoltant l'un de mes rares sourires dans l'invention de nos futurs plans.

La blonde parla d'un possible enfant : chose que nous souhaitions éviter en vue de la situation.

Irina et Dimitri burent ces mensonges sans les retenir. Nastia se fatiguait pour rien. Ces deux là étaient bien trop préoccupés par leur bonheur personnel. Comment leur en vouloir ? La joie se faisait denrée rare de nos jours, encore plus dans notre monde...