Chapitre 3

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La colère avait pris le dessus sur la peur. Agrippant le manche du sabre de son fils, la figure maternelle avait brandi à son tour la lame, adoptant la même posture que son fils et son mari avait employé.

L'aînée saisie son petit frère par les épaules et le conduisit plus loin dans la cour, à l'abri de ce monstre, lui demandant de rester cacher à tout prix et de ne sortir sur aucun prétexte. Avec précaution, celui-ci entra dans la petite faille du tronc du chêne de la cour, où une cavité s'était créée à l'intérieur.

Lorsqu'elle revenait pour prêter main forte à sa mère, elle retrouvait celle-ci au sol, se tenant péniblement le ventre pour éviter que ses boyaux ne s'échappent. Le monstre tenait la plaie de son bras gauche manquant, grognant de rage en jurant qu'il allait la tuer dans d'horribles souffrances.

Tsuki attrapait le manche de son instrument à corde avant de bondir sur le monstre, l'attaquant d'un sévère coup à la tête qui fit éclater le bois du shamisen en plusieurs morceaux. Pourtant, le coup ne semblait pas l'avoir ébranlé d'un iota.

Elle glissait sur le sol pour esquiver de peu l'une des pinces du monstre et se saisir du katana sur le sol.

Le monstre l'observait d'un air cette fois-ci agacé, comme s'il en avait marre de se battre contre des êtres qu'il voyait comme des insectes.





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Le sang s'était répandu sur le parquet du salon alors que dans la cour, le corps du monstre se volatilisait sous les rayons du soleil pour se transformer en tas de cendre. Elle n'y était pas pour grand chose, elle avait simplement esquivé une attaque après avoir retenu qu'il allait exécuter une attaque latérale, détruisant la porte et une partie du mur. Son cri d'horreur résonnait encore dans sa tête, il souffrait enfin. Elle l'avait prise par derrière pour le sortir de la maison. Il se débattait férocement, mais ce n'était rien comparé au soulagement lorsqu'il disparut.

Sous le choc, la jeune fille regardait le sol de dalle de pierre sans vraiment regarder ce qui se présentait devant elle. Le bruit étouffé des pleurs de son petit frère la ramena à la réalité et elle se levait pour le retrouver.

-Viens, Amon. Attrape ma main.

Elle l'aidait à sortir avant de s'arrêter dans la maison. Les corps sans vie de son frère aîné et de sa mère, ceux des domestiques... Il n'y avait plus personne. Elle sentait la main de son petit frère se resserrer sur la sienne.

-Qu'est-ce qu'on fait ? lui demandait-il d'une petite voix.

-On va attendre que l'oncle Taro arrive. Maman nous avait dit qu'il était en route pour venir nous chercher, il y a deux jours. On va l'attendre.

Ensemble, ils ont ramassé les corps et les ont enterré dans le jardin. À la fin de la journée, ils avaient mal au dos, leurs doigts leurs brûlaient et la crasse et l'odeur du sang leur donnaient envie de vomir. Ils n'avaient rien avalé cette journée-là, ils ne s'en sentaient pas capable.

Les criquets chantaient dans le jardin lorsque quelqu'un était venu frapper à la porte. La jeune femme avait hésité à aller ouvrir, mais la voix de son oncle retentissant la rassurait. Elle reconnaissait sa posture d'épéiste sur le seuil de porte, sa main prête à dégainer au besoin le katana autour de sa taille. Ce n'était pas un samouraï, mais il savait manier le sabre comme personne. Leur mère l'avait même déjà appelé pourfendeur, mais à cet âge là, Tsuki ne savait pas ce que cela voulait dire ou représenter.

Il les avait aidé à faire leurs sacs et à ne prendre avec eux que le nécessaire, avant de les amener avec lui jusqu'à sa résidence, son domaine. Sur le chemin, il les questionnait, il cherchait à déterminer ce qui était arrivé.

-Et c'est toi qui l'a tué ? demandait-il à sa nièce.

-Non, il est mort au soleil.

-C'était quoi ce monstre ? avait demandé le plus petit.

-On appel ça un démon. Les pourfendeurs sont des hommes et des femmes qui les traquent pour protéger les gens, expliquait-il. Si j'étais arrivé quelques jours plus tôt, rien de tout ça ne serait arrivé.

-Comment faire pour les tuer ? demanda Tsuki.

-Les rayons du soleil est l'un des rares moyens d'y parvenir. Il existe sinon les sabres du soleil que les pourfendeurs utilisent pour tuer en leur tranchant la tête. Il existe aussi la fleur de glycine, qui est un poison pour ces créature.

Elle l'écoutait parler avec une grande attention. Bien sûr, il ne donnait qu'un minimum de détails, refusant de les traumatiser davantage, bien qu'il voyait briller dans les yeux de sa nièce une lueur particulière : Celle de la vengeance et de la soif de sang cachée derrière un nouvel intérêt qu'est la meilleure méthode pour achever ces monstres. Il le devinait dans son regard : Elle voulait et allait devenir un grand pourfendeur de démon.

Le Souffle de la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant