Le Souffle de la mort

Chapitre 25

Il neigeait encore le lendemain matin, la cour était couverte de blanc. Tsuki était revenue avec Sanemi quelques heures après avoir vu le corps de Kanae allongé sur le lit. Elle avait tenté de son mieux de se montrer présente pour Shinobu, faisant également pour le première connaissance avec le maître des pourfendeurs, bien qu'elle n'avait pas pu - et qu'elle ne voulait pas - discuter avec lui. Elle avait également ignoré Tengen au maximum pour ne pas être trop tenté de le poignarder au coin d'un couloir.

Sanemi était directement parti se coucher, à la surprise de Tsuki qui croyait que son mentor allait s'entraîner dans la cour jusqu'à pas d'heure. Elle ne l'avait toujours pas vu depuis hier soir et ce n'était pas dans ses habitudes de faire la grâce matinée.
Elle prenait un petit déjeuner dans la cuisine, fixant anxieusement le couloir qui menait à la chambre du pilier : Il n'y avait pas un seul bruit en provenance de celle-ci.

-Tu crois qu'il va bien ? avait-elle murmuré à Éclipse qui était assis près d'elle, fixant le bol qu'elle tenait dans ses mains.

Celui-ci se contentait de battre de la queue, l'une de ses oreilles dressée vers le haut.

-Non, finissait-elle par admettre, le regard tourné vers ses lames qu'elle avait déposé près de la porte menant à la cour.

Posant son bol sur le comptoir, elle se dirigeait vers l'antre de Sanemi, ouvrant avec précaution la porte. Il lui tournait le dos, le visage enfouie dans son oreiller. À ses côtés, Écho était allongé en boule sur le futon.

-Tu dors encore... murmurait la jeune femme.

Elle avait quitté le portique pour revenir sur ses pas et aller dans la cour, attrapant au passage ses lames pour commencer son entraînement. Elle se tenait droite devant le pantin, brandissant sa lame dans une respiration calme, mais dont la pression trahissait tout de même sa posture. Elle n'avait jamais imaginé que mettre au point son propre souffle et tester ses mouvements pouvaient être aussi stressant. Et quand ce fut enfin le moment d'effectuer le premier mouvement, elle s'arrêtait dans son geste. Elle sentait son cœur de serrer face à la pression grandissante qu'elle n'avait pas sentie la veille : La douleur du deuil en était-elle la cause ?

Elle s'écartait du pantin, observant sa lame, essayant tant bien que mal de voir son reflet à travers la noirceur de l'acier. Non... Ce n'était pas la douleur d'avoir perdu Kanae qui provoquait en elle cette souffrance. C'était... C'était de... la faiblesse ? De la culpabilité ? Des remords ? Ou bien un mélange des trois  ?

S'assoyant sur le perron, elle observait sa lame dans un sentiment de confusion. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire pour l'aider ? Elle ne pouvait rien faire qui puisse apaiser l'esprit de son mentor, mais c'était dans la suite des choses de lui venir en aide, non ? Lui qui l'avait soutenu, encouragé, sauvé... Ne pouvait-elle pas faire quelque chose pour lui ?

-Vous m'avez l'air bien troublé, mon enfant.

Relevant la tête, elle fit face au maitre des pourfendeurs. Il se tenait sur le perron, un petit sourire rassurant sur les lèvres.

-Bonjour.

-Bonjour, soupirait l'adolescente. Si vous venez voir Sanemi, il dort pour encore.

-Je repasserai plus tard pour prendre de ses nouvelles dans ce cas, mais j'aimerais savoir comment vous allez.

-Comment je vais... Pourquoi ?

Il eut petit ricanement avant de prendre place près d'elle, observant le ciel d'un air apaisé.

-Il est dans mon intérêt d'aider tous les pourfendeurs traversant une mauvaise passe. Si je ne peux pas me battre comme vous, alors je dois me montrer utile ailleurs.