Le Souffle de la mort

Chapitre 19

La jeune femme agrippait l'avant-bras du jeune homme, tentant désespérément de retrouver son souffle malgré la douleur de sa gorge comprimée. Sa trachée lui faisait un mal d'enfer, elle craignait qu'il la casse en serrant davantage sa prise.

-Ry... Ryuk... peinait-elle à articuler.

-C'est moi qui décide de mon avenir !

Relevant difficilement le bras, elle lui tranchait l'avant-bras. Elle l'entendit crier, plus de rage que de douleur, avant d'être projeté au loin après avoir reçu un coup de pied au ventre. Roulant sur le sol après avoir effectuée quelques tonneaux, elle laissait échapper un cri en se heurtant à la racine d'un arbre qui était émergée du sol.

-Rends-moi mon sabre ! 

Titubant en se relevant, elle grimaçait en sentant quelque chose de chaud couler sur son front et s'écraser dans son œil droit, la faisant se crisper. Elle jurait mentalement, se surprenant rapidement face à ce comportement qui n'était pas le sien.

-Tu vas me le payer Sanemi... Tu as déteint sur moi.

Plusieurs gouttes de sang s'écrasèrent sur le coin de sa lèvre dans leur descente, lui apportant le goût ferreux du sang qu'elle n'appréciait pas et qu'elle ne voulait pas apprécier.

Adoptant maladroitement la posture de défense du pourfendeur, témoignant de sa décision de faire au démon qui se tenait devant elle.

-Je vais te libérer de ton fardeau, Ryuk, murmurait-elle.

Elle esquivait de peu le poing du jeune homme, celui-ci ayant repoussé instantanément après qu'elle lui ait tranché.

-Laisse-moi te sauver de ce fardeau, Ryuk...

-Je n'ai pas besoin que tu me sauves, pauvre idiote ! Je n'ai pas besoin de ton aide !  

-Souffle du vent, sixième mouvement : Ouragan noir sur un pic embrumé !

Il esquivait de peu l'attaque horizontal, sentant le tranchant de la lame lui effleurer la joue. Quelques mèches de ses cheveux sombres s'écrasaient sur le sol avant de se soulever sous une bourrasque de vent. Le craquement des branches qui lui tombaient devant les yeux l'empêchaient d'approcher le démon qui s'était écarté de plusieurs mètres.

-C'est pas vrai... chuchotait-elle.

Elle fut projetée de nouveau, cette fois-ci à cause d'une bourrasque de vent puissante. Elle perçut un élément briller lui passer près des yeux durant sa chute, y distinguant dans la nuit le pétale de la fleur que lui avait montré Ryuk quelque minutes plus tôt à peine.

Elle se posait dans une flaque de boue alors que Tsuki s'écrasait sur le sol dur et rude, le sabre lui échappant des mains. Quand elle l'entendit crier bruyamment dans sa direction, elle tendait désespérément le bras vers le manche, la pointe de la lame ayant disparut dans la flaque de boue sombre. Dans une tentative précipitée de survie, elle portait un coup à la vertical, sentant le tranchant du sabre rompre la chair du monstre, le menton de celui-ci giclant de plus belle.

Il titubait à son tour. Le vent s'élevait de nouveau, lui donnant cette fois l'impression qu'elle volait quand elle se sentit quitter le sol. Elle se demandait où était passée Shinobu et si elle ne l'avait pas abandonné à son sort en combattant son ancien collègue devenu complètement fou.

Elle n'arrivait pas à expliquer pourquoi, mais son attention fut redirigé vers le sol, à l'endroit même où s'était écrasé le pétale de lune. Il n'y était plus, sauf si dans la précipitation, il se soit engouffré dans la glaise et la boue.

Le cri qu'elle perçut lui retournait l'estomac, son attention redirigée vers le démon qui se tenait à présent le menton dans une agitation étrange.

-Pas encore ! Pas encore ! Pas maintenant !

Elle atterrit sur le sol. Mais elle l'avait vu : le pétale était tenu serré entre les doigts de Ryuk quand celui-ci s'était agrippée la mâchoire pour faire taire les infusions de sang, la pointe de la lame figée dans l'os. Elle déviait son attention sur son sabre dans l'espoir que ce ne soit qu'un mauvais rêve, mais non : le katana était brisé.

Elle reculait de plus bel en croisant le regard fou de colère du jeune homme. Celui-ci se tenait à présent la tête, hurlant à ne plus pouvoir s'arrêter. Quand son regard croisait celui apeuré de la jeune femme, il se figeait : Elle n'était plus la même.

Les hallucinations l'empêchaient de distinguer qui étaient la vrai, car devant se trouvaient trois femme, chacune allongées sur le sol. Leurs longs cheveux noirs descendant sur leurs épaules, rejoignant les couleurs sombres du kimono qu'elles portaient.

L'ombre du papillon du haori de Shinobu s'élevait dans les airs. Dans un geste fluide, elle portait une attaque puissante, faisant transpercer le cœur du garçon de la pointe de sa lame. Elle ne percevait pas ses mots, trop concentrée à regarder le jeune se tordre de douleur sur le sol.

-Tu n'as rien Tsuki ? lui avait-elle demandé.

Elle n'arrivait pas à lui répondre.

-Tu as brisé ton sabre ! s'étonnait gentiment la jeune femme.

-C'était le sien, murmurait Tsuki. J'ai brisé son sabre...

-Ce n'était plus le sien. Un démon ne peu pas porter de sabre. Il était à toi.

-Pas du tout. Comment l'as-tu tué ?

Elle lui glissait la pointe de son katana sous les yeux, un liquide brillait sous le clair de lune.

-Poison à base de fleur de glycine.

-Pourquoi un poison ?

-Je suis incapable de décapiter un démon, alors j'ai mis au point un poison.

Tsuki l'avait demandé pour la forme, mais une idée germait dans sa tête après qu'elle ait vue son ancien collègue crier à en perdre haleine.

-Que lui est-il arrivé d'après toi ? lui avait-elle demandé en examinant le pétale couvert de sang.

-Je l'ai tué par empoisonnement. Tu n'as pas écouté...

-Non, avant.

-Oh ! Je dirais qu'il était pris d'hallucinations ?

-Hmm... Tu crois que c'est à cause du pétale de fleur de lune ?

-Je ne sais pas, peut-être... Pour l'instant, le mieux que l'on puisse faire est de te trouver un nouveau sabre et de trouver ce champ de fleur en vitesse.

-Trouver un sabre... Où ?

-On en trouvera sûrement un sur le corps d'un pourfendeur mort. Viens, allons-nous en.

Elle hochait la tête, mais rangeait le sabre brisé de Ryuk dans son fourreau qu'elle gardait à sa taille.

-Tu sais qu'un sabre brisé ne te servira à rien ?

-Pour l'instant, je n'ai que ça. Mais j'ai eu une idée et j'aimerais le garder.

-Comme tu veux.