CHOI SOOBIN A HUENING KAI, BOÎTE AUX LETTRES BLEUE D'ASTERIA
Je ne sais pas quoi penser de cette lettre étrange que je reçois d'une personne qui affirme ignorer tout de la personne à laquelle elle l'envoie. J'ai beaucoup de difficulté à croire en l'existence d'une boîte aux lettres qui choisit parfaitement le destinataire du courrier. Ça reviendrait à admettre une forme de magie que je ne comprends pas et je ne suis pas certain de vouloir admettre l'existence de la magie. Et pourtant je te réponds.
Je réponds à une lettre bizarre qu'un illustre inconnu m'envoie. Ma curiosité me pousse à faire glisser mon stylo sur le papier comme elle m'a poussée à m'approcher de cette boîte aux lettres colorée sur mon chemin. Tu affirmes ignorer tout de moi. Rien ne me dit que tu n'es pas un stalker. Rien ne me dit que tu ne m'observes pas tous les jours dans l'ombre d'un bâtiment. Rien ne me dit que tu n'attends pas la dernière seconde pour m'assassiner avec une violence rare. Pourquoi devrais-je croire un seul de tes mots ?
Chaque mot que tu écris me paraît plus dingue que le précédent. La vie que tu me décris comme étant la tienne me paraît si insensée qu'elle en devient impossible pour mon esprit. Mon quartier de Séoul ne connaît pas d'existence comme la tienne. Les étudiants triment entre plusieurs travails, les cours et les soirées entre amis. Les personnes âgées nous regardent avec cette compassion d'un autre temps lorsqu'ils ne se plaignent pas d'une époque fantasmée. On ne leur dit rien. Ça reviendrait à briser leurs idéaux et on les aime trop pour faire ça. Je ne sais pas pourquoi je te raconte toutes ces choses. Tout ça me paraît irréaliste. J'entre dans ton jeu et je réponds à ta lettre alors que je ne sais même pas si tu me veux du bien. Je te partage une partie de mes pensées sur toutes ces petites choses qui animent mon quotidien.
Tout ça pour quoi ? Pour une boîte aux lettres étrange qui n'aurait jamais dû se trouver sur mon chemin ? Pour une enveloppe avec mon nom écrit dessus ? Tout ça me paraît si bête. Je risque peut-être ma vie en dévoilant une partie de ma vie à un tueur en série. Ceux qui parsèment la pop culture naissent bien quelque part. Je ne veux pas devenir une de ces victimes dont on parle dans les podcasts de true crime.
Choi Soobin ou l'histoire du garçon assez stupide pour répondre à une lettre d'un inconnu qui lui arrachera les entrailles à la petite cuillère.
J'ai encore de nombreuses années à vivre. Je veux aussi pouvoir fantasmer sur une époque qui n'a jamais vraiment existé comme le font les grands-mères qui se déplacent à la supérette dans laquelle je travaille un soir sur deux.
Mais disons que je veuille bien te croire. Disons que je veuille bien croire à ton envie de tisser une amitié à travers une lettre. Je ne sais absolument rien de toi, Huening Kai. Je ne peux pas devenir ami avec une personne dont je ne sais rien. Je ne connais que l'ennui qui habite tes journées. Ça s'arrête là. Je compatis avec ton ennui. Tu me décris une vie bien triste. Ta prison dorée me paraît aussi confortable qu'aliénante. Une partie de moi rêve cependant de passer une seule journée à ta place. Le temps passe trop vite chez moi et j'ai l'impression que toutes mes secondes sont occupées. Je n'ai pas le temps de respirer entre des cours que je ne sais s'ils m'intéressent et un travail qui me permet de ne pas mourir de faim. Mes amis se moquent parfois de ma gestion du temps et je les comprends un peu. Je suis loin d'être malheureux, mais il m'arrive de rêver de cet ennui salvateur ; de cet ennui qui affirmerait que je n'ai rien de prévu pour les prochaines heures.
Je ne sais pas encore si nous serons de grands amis. Je ne sais même pas si tu souhaites vraiment mon bonheur ou si tu espères secrètement disperser mes boyaux dans des bocaux. Je peux simplement te dire que ma vie ressemble au monde qui m'entoure chaque jour : elle n'est pas toujours incroyable, mais elle pourrait toujours être pire.
J'essaie de me présenter comme un garçon prudent, mais je n'arrive pas à taire ma curiosité. Je me pose tant de questions. Tes parents te surprotègent-ils au point de refuser à ce que tu quittes ta propre maison ? Pourquoi ne peux-tu pas échapper à cette pression ? Je reste quand même méfiant. Tu me décris une vie digne des plus grands films d'émancipation. Tout ressemble à un fantasme. Plus je m'arrête d'écrire pour penser, plus je me dis que tu es vraiment un tueur en série. Je suis donc certainement imprudent d'entrer dans ton jeu et de te répondre.
Je te laisse le loisir de changer mon avis et de me prouver que tu ne cherches pas à détacher mes côtes pour te faire un collier glauque. Peut-être que tu seras celui qui s'inquiétera d'une réponse comme la mienne. Je consomme sûrement trop de contenu un peu morbide. Ça me rassure toujours un peu de regarder ces choses-là. Ça me conforte dans le fait qu'il y a toujours pire ailleurs.
C'est donc à toi de jouer, Huening Kai.
Change mon avis et prouve-moi que tu n'es pas un tueur en série.
Boîte aux lettres bleue de Séoul
25 janvier
dire que je ne sais pas quoi penser de cette histoire est un euphémisme. mais je suis quand même contente de vous la partager. et j'aime beaucoup les gifs que j'utilise pour illustrer la fin de mes chapitres.
j'espère que vous avez apprécié votre lecture.
on se retrouve dans deux semaines !
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letterbox romance
FanfictionEntre les lignes raturées de sa lettre s'écrivait sa relation avec Huening Kai. Rien ne les prédisposait à échanger le moindre mot. Ils ne partageaient rien en dehors de sentiments figés sur papier. ☆ début : janvier 2024 ☆ fin : xxx