LETTRE VI

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HUENING KAI A CHOI SOOBIN, BOÎTE AUX LETTRES BLEUE DE SEOUL


Il est souvent d'un ennui mortel de rester seul dans une maison si grande qu'une vie entière ne permettrait pas d'en découvrir tous les recoins et secrets. Un enfant s'élancerait dans une aventure épique dans les interminables couloirs et déambulerait dans les appartements du personnel comme une souris discrète. Il vagabonderait à travers les pièces pleines de vieilleries excentriques que les propriétaires collectionnent depuis plusieurs générations. Il existe une version plus candide de Huening Kai qui rêve de profiter de l'absence de ses semblables pour se perdre dans les corridors labyrinthiques. Il me paraît cependant plus intéressant et ludique de te rédiger une lettre dans laquelle je ne conterais rien de passionnant.

Pour me montrer transparent avec toi, mes dernières heures se sont entièrement résumées à arpenter le jardin de la propriété et à me perdre dans une roseraie que je trouvais dédaléenne lorsque je n'étais encore qu'un jeune garçon. Un mal de tête s'est étendu dans ma boîte crânienne après l'inspiration de tant de parfums floraux et je me suis réfugié dans ma chambre. Mon bureau ordonné se dressait sous mes yeux dans toute sa stature. Des feuilles vierges reposaient sur la desserte et elles m'intimaient de glisser la pointe de mon stylo sur leur surface pour te rédiger ces quelques mots.

La sublime lumière du début de la journée me plongeait dans mes pensées et mon corps s'enfonçait dans le dossier confortable de ma chaise. Mes pensées se tournent naturellement vers ta présence vaporeuse. J'entrevois la silhouette d'un être humain dont j'ignore tout. Mon cerveau s'imagine ta présence dès que les paroles ennuyantes de Maleko se tarissent. Son absence inattendue m'a pris par surprise et je me suis retrouvé à vagabonder accompagné de ton spectre. N'est-il pas étrange de parler de toi comme si tu n'étais rien de plus qu'un fantôme ? Ta silhouette virevoltait dans la roseraie et entraînait les pétales colorés dans une danse volatile. L'image est saisissante et elle ne quitte pas mon esprit. Je la chéris déjà plus que tout.

Tu m'accompagnais dans les couloirs qui menaient à ma chambre alors que mes yeux dévoraient les formes abstraites des nuages. Le bleu profond du soleil leur apporte cette palette magique qui oscille entre le vert et le violet. Leur vision apaise mon esprit et calme les battements frénétiques de mon cœur. Cela me fait penser à toi. Tu as cet effet étrange sur moi, Choi Soobin. Et c'est pourquoi je me retrouve à te dédier une lettre sans même avoir obtenu de réponse de ta part.

Est-ce étrange de penser ce genre de chose alors que nous nous connaissons à peine ? Je ne parviens cependant pas à réprimer cet apaisement que je ressens lorsque je serre une de tes lettres entre mes mains. Tout me paraît bien futile lorsque tu m'adresses des mots que personne d'autre n'aura jamais l'occasion de lire. Nous nous connaissons à peine, mais je n'ai jamais été autant moi-même. Je me sens proche de toi, Choi Soobin. Nos échanges sont une évidence. Ils sont cette étincelle qui manquait dans ma vie. Ils sont cet imprévu vivifiant dans une vie monotone. Nous nous connaissons à peine et j'ai pourtant l'impression de marcher à tes côtés depuis toujours.

Ma lettre me paraît bien mièvre. Je me perds dans tes phrases si sentimentales qu'elles en donneraient presque mal au cœur. Je ne parviens cependant pas à restreindre mes mots. Mon stylo glisse sur le papier sans que ma raison ne puisse rien y faire. Et j'ai déjà jeté trop d'exemplaires de cette lettre à travers la pièce pour en recommencer une. J'écris ces mots comme si une impulsion guidait mes membres. J'ignore même si mes mots sont lisibles. Mes mains tremblent tant que mon écriture en devient une bouillie de lettres se mélangeant dans des phrases à peine compréhensibles pour un œil non entraîné.

De quoi ai-je l'air maintenant que mes mains ralentissent ? Je divague certainement à te raconter du vide, mais j'en ressentais un tel besoin que je me sente plus léger maintenant que mes mots sont posés sur du papier.

La prochaine fois, je me ferai un plaisir de répondre à une de tes lettres.


Boîte aux lettres bleue d'Astéria

15 mars


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la mise en page des chapitres est un enfer. je ne sais jamais si je vais devoir recentrer la première ligne ou non. c'est toujours la surprise. mais on aime quand même wattpad malgré ses bugs. je n'ai pas beaucoup de choses à dire sur le chapitre pour tout vous avouer.

j'espère que vous avez apprécié votre lecture. on se retrouve dans deux semaines !

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