LETTRE VIII

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CHOI SOOBIN A HUENING KAI, BOÎTE AUX LETTRES BLEUE D'ASTERIA


J'espère que cette petite histoire sur la vie parfaitement normale de Choi Soobin te divertira. J'attends avec impatience ta prochaine lettre.


Une journée tout à fait banale dans l'existence de Choi Soobin

Par Choi Soobin, 30 mars


Il serait simple de décrire la personnalité de Choi Soobin par une succession d'adjectifs piochés au hasard dans un dictionnaire épais, mais aucun ne décrirait à la perfection son état d'esprit dès que la sonnerie de son réveil résonne dans un logement de quinze mètres carrés dans un quartier relativement calme de Séoul. La nuit se lève à peine sur la capitale du pays du matin frais lorsque le bip strident du maléfique appareil parvient aux oreilles de la personne encore emmitouflée sous deux couettes épaisses. Des touffes de cheveux bruns dépassent des édredons et un geignement plaintif s'échappe des lèvres du jeune endormi. Un bras s'extirpe alors des couettes, rencontre le froid de la pièce et tombe avec lourdeur sur le bouton snooze de son réveil. Parce que s'il y a une chose à savoir sur Choi Soobin, c'est qu'il donnerait tout pour avoir cinq minutes de sommeil supplémentaire.

Son esprit s'éloigne lentement du monde des rêves et ses muscles se dégourdissent durant ces quelques minutes. Choi Soobin se redresse rapidement lorsque le réveil retentit une seconde fois. Ses yeux sombres et voilés par le sommeil jettent un regard mauvais à cet instrument de torture pour étudiant : 6 h 45. La journée commence à peine et il se sent déjà lourd. Il se souvient que ses parents lui répétaient qu'il n'était pas du matin lorsqu'il n'était encore qu'un enfant. Il ne l'est toujours pas ; du matin ; et il doute de l'être un jour. Il abandonne une couette sur son matelas. La seconde l'accompagne alors qu'il traverse son appartement en deux enjambées. Son poids sur ses épaules le protège de la réalité et elle le garde dans une bulle rassurante.

Choi Soobin se prépare un long café bouillant et une tartine de confiture. Il ne tardera pas à les manger, mais il veut récupérer son téléphone pour s'assurer qu'il n'a manqué aucun événement intéressant au cours de la nuit. Il vérifie tous les jours alors qu'il a conscience que les réseaux sociaux parlent des mêmes sujets en boucle. Il ne manquerait pourtant pas ce petit rituel matinal. Alors il scrolle sur son téléphone tout en prenant son petit-déjeuner. La tartine remplit son estomac et le café réveille son esprit encore engourdi. Lorsque la dernière goutte de boisson chaude a disparu de sa tasse préférée, il pose son téléphone et abandonne la vaisselle dans son évier plein. Il se dit qu'il faut nettoyer toutes ces assiettes. Il s'attellera à la tâche dans la soirée s'il n'est pas fatigué. Il sait qu'il n'en aura pas le courage. Choi Soobin trouve enfin le courage d'abandonner sa couette sur son lit et il la remplace par des vêtements chauds.

Environ trente minutes s'écoulent entre le réveil désastreux de Choi Soobin et son départ de l'appartement. Son manteau épais et sa large écharpe camouflent la majeure partie de son corps. Il salue ses voisins de vagues signes de la main et il trottine en direction de l'abri bus. Il pleut. Il pourrait tourner les talons pour récupérer son parapluie dans l'entrée du logement. Il n'en a pas le temps. Son bus approche et Choi Soobin prendrait un retard conséquent en pénétrant dans le suivant. S'engouffrant dans l'habitacle du véhicule, il laisse ses yeux fatigués glisser sur les fauteuils en toile dans l'espoir d'en trouver un libre. Il n'a pas de chance ce matin-là. Comme tous les autres jours de la semaine. Peut-être en trouverait-il s'il se réveillait quelques minutes plus tôt. Peut-être que tout le monde aurait la même idée que lui et le bus précédent se retrouverait surchargé. Puis il n'est pas du matin. Il se sait incapable de se lever quelques minutes plus tôt. Il passe sa manche de manteau sur ses paupières lourdes et enroule ses mains autour d'une barre métallique. Son sac à dos pèse sur ses épaules, mais il n'a pas le courage de s'en débarrasser. Il sait que les prochaines minutes seront longues. Il sait qu'il devra lutter contre le sommeil.

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