Remember me

46.

Romy

Perturbée, je quitte le centre commercial en compagnie de Lenny qui me raccompagne chez moi.
A peine passer la porte de l'appartement je m'affale dans le canapé en soufflant.

- Quelle journée! Je ne m'attendais pas à ça !

- à signer des livres ? C'était le thème pourtant!

- ce que tu es drôle, vraiment! Je parlais plutôt du questions/ réponses.

- Il est doué, tres doué, tu ne peux pas lui enlever!

- Je te deteste! Tout ça C'est de ta faute! Pourquoi tu lui as dit que j'étais là?! Je croyais que tu étais mon amie!

- Chaton, c'est justement parce que je le suis que je lui ai dit, si je pensais que Sully était quelqu'un de mauvais je me serai abstenue.

- Il l'est pour moi!

- Qui essaies Tu de convaincre là? Toi ou moi? Pourquoi est ce que tu te persuades de ça alors que ce mec tu me bassines les oreilles avec depuis plus d'une décennie?! Sérieux Rom! Sully est celui que tu as toujours voulu pourquoi est ce que tu lui tournes le dos? Il a merdé certes, pour des sujets importants, je te l'accorde. Mais il n'est pas parfait, il a le droit d'être en colère et de te le montrer, même s'il se plante, à toi de lui montrer qu'il se plante quand c'est le cas d'ailleurs. Il est comme toi! Pour l'avoir tu as juste à claquer des doigts, tu es tellement certaine qu'il ne pourra jamais t'aimer autant que tu l'aimes que tu ne vois même pas que c'est le cas en réalité. Et il a raison, tu as choisi une fin heureuse à ton histoire, avant même de connaître la suite, c'est que tu gardais espoir, tu gardes toujours espoir. Mais ça ne dépend que de toi, à toi d'agir pour l'avoir ta fin heureuse, ou pas de fin en l'occurrence.

Je l'examine, elle a raison la morue, je la déteste encore plus.

- Tu as fini?

Elle soupire.

- Tu m'exaspères Rom, fais ce que tu veux après tout, mais pour le coup ça sera de ta faute si ça ne se fait plus, pas la sienne, tu seras l'unique responsable de ton chagrin.

Je soupire en me levant pour fouiller mon sac et y sort la lettre qu'il m'a destinée.

- C'est quoi?

- Une lettre, une lettre d'Andrew.

- ah ben tu vois !

- Ferme la morue!

Je lui lance un coussin à la figure et me rassois. Je contemple la lettre, hésitante.

- Tu veux que je le fasse peut être ? Je connais vos parties de jambes en l'air, je ne suis plus à ça près dans votre intimité!

Je lui lance un regard en coin avant de décacheter l'enveloppe.

- tu as intérêt à lire à voix haute du coup!

« Rom,

Je n'ai pas ta plume, que j'ai eu l'agréable surprise de découvrir au fil de tes pages. Je voulais d'abord te remercier, ce livre m'a beaucoup touché, il m'a fallu le relire pour comprendre, te comprendre. J'étais à des années lumières d'imaginer ta détresse et pourtant je vivais la meme de mon côté. Je te l'accorde, pas au début, mais j'étais jeune et immature, je ne me suis rendu compte de la vraie teneur de mes sentiments que la nuit où je me suis retrouvé blotti dans tes bras l'été avant notre dernière année de lycée. Je t'aimais, je t'ai toujours aimé, dès le premier instant.  Je parcourais ta peaux, respirais ton odeur, savourais ta chaleur et je me disais que je voulais rester là indéfiniment. Je te l'ai dit ce soir là, mais tu dormais, je t'ai dit les 3 mots que j'ai mis des années à te dire à nouveau et qui sont restés dans l'intimité de ta chambre, dans notre bulle que tu avais créé.
Je regrette, je regrette tellement de ne pas avoir vu.
Je regrette ne pas avoir entendu non plus quand tu les as prononcé à la porte d'embarquement parce que je peux te promettre que j'aurai annulé ce voyage pour rester près de toi. Je partais pensant devoir t'oublier et te laisser derrière moi, comme une page que l'on tourne pour changer de chapitre. Moi aussi j'ai essayé de t'oublier avec un autre, je pensais que c'est ce qu'il fallait que je fasse: me marier, avoir des enfants.
Et même si j'aime Anna du plus profond de mon cœur, je sais aussi qu'elle n'est pas le fruit d'amour, mais de confort. La preuve étant, mon mariage n'a pas tenu, il ne le pouvait, il n'était pas avec la bonne .
J'ai fait bonne figure lorsque, venant pour être le témoin du mariage de ce que je pensais être le mariage entre un copain de lycée et une inconnue, j'ai été blessé en plein cœur lorsque je t'ai vu apparaître au restaurant. Apparition magnifique, souriante envoûtante de ce parfum que je n'ai jamais oublié.
Alors oui, tu as été un défi. Quand ta langue a fourché lors de cette partie de billard, je n'avais plus qu'une chose en tête : toi. Je te voulais comme je t'ai toujours voulu. La différence? Je savais que mes sentiments étaient partagés, sans certitude aucune qu'ils le soient toujours, il l'avaient été un jour, et s'il n'en restait qu'une braise, je ferai tout pour raviver le feu.
Mais, ça a été facile, le feu brûlait toujours de façon incandescente, je n'ai quasi rien eu à faire, à part peut être mettre un pain à l'enfoire qui se jouait de toi, mais que je reconnais avoir béni d'avoir commis l'impardonnable, oui je m'en excuse, j'y ai vu mon occasion, je l'ai saisi. »

Je m'interromps pour reprendre mon souffle, je crois que mon corps s'assèche tant de larmes coulent de mes paupières. Ma voix et mes mains tremblent. Lenny me tend un verre d'eau.

- Continue ou je le fais moi!

Je lache un rire entre deux sanglots et reprends mon souffle pour poursuivre.

« Et j'ai goûté au bonheur, à toi, à toi entièrement... et je t'assure qu'on est fait pour être ensemble, dans n'importe quelle pièce! »

- Veinarde va! Et toi tu veux renoncer à ça ?!

Je relève à peine ne pouvant m'empêcher de sourire en revoyant la table de billard de son garage me passer en tête, et que je ne verrai plus jamais de la même façon.

« Pour redevenir sérieux, m'unir a toi était une évidence, mon vieux fou a voulu accélérer les choses, on ne s'y est pas opposé. Parce que s'il y a bien une chose dont je suis sûr dans ma vie Rom, c'est toi et moi. Je suis ton oiseau coloré et tu es le mien. Alors pardonne mes coups de colère, je n'ai jamais voulu t'évincer de ma vie, de toute façon je ne le pourrai jamais parce que c'est toi ma vie. Je t'attendrais, aussi longtemps qu'il le faudra, parce que toi et moi, oui c'est inévitable et si je dois encore attendre 10 ans pour que tu me choisisses à nouveau, je le ferai. Je ne veux que toi, je n'ai toujours voulu que toi. Un jour tu m'épouseras Romy Paxton, je le sais, et tu le sais aussi puisque c'est comme ça que tu termines ton livre, c'est que tu l'espères encore. C'est d'ailleurs pour ça qu'il n'y a jamais eu de question, parce qu'il n'y a jamais eu de doute la dessus.
Je t'aime...
« Parce Que Je t'aimerai toujours plus que tu m'aimeras jamais » ce sont tes mots, tes mots qui m'ont ébranlés.
Je t'aime au delà de toute mesure, et mon nouveau défi est de te le prouver, chaque jour, pour que tu y crois.
Tu es mienne Rom, parce que j'ai toujours été à toi...
Je t'aime »

Je reste sans voix au-dessus de la feuille de papier. Je relève les yeux vers Lenny, qui a fini par lâcher ses larmes aussi malgré son coeur de pierre.

- Rom? Tu attends quoi la?!

Elle a raison, c'est la plus belle déclaration d'amour qui puisse exister, et c'est Sully qui me l'a écrite, à moi!

Je me lève précipitamment mais mon téléphone sonne.  Je regarde de qui vient l'appel.
Maggie?! Qu'est ce qu'elle me veut? Je n'ai pas eu de nouvelles d'elle depuis... l'enterrement de Will. Je décroche, hésitante, ne sachant pas ce qui m'attend.

- oui allô?

- Romy ma chérie !

- Bonjour Maggie. Comment allez vous? Je suis désolée de ne pas avoir pris de nouvelles avant mais...

- Je ne t'appelle pas pour ca! Tu es sur New-York?

Sa voix est étrange... qu'est ce qu'il se passe?!

- euh oui oui

- Tu peux me rendre un service, je n'ai pas de voiture et le temps que j'arrive...

- Dites moi Maggie.

- Sully a eu un accident, il est a l'hôpital et...

C'est une blague?! Une mauvaise blague?! Je plaque ma main sur ma bouche, paniquée, n'écoutant plus mon interlocutrice.

- Romy? Tu m'entends?

- euh oui pardon...

- Tu peux y aller pour moi?

- Oui bien sûr! Je vous rappelle!

Je raccroche rapidement et repasse mes chaussures avant de prendre mon sac et mes clés.

- Bouge toi Lenny! Sully a eu un accident!

Sans protester elle se lève et court à ma suite. Pitié, faites que mon oiseau reste avec moi... je n'y survivrai pas...