Chapitre 9

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Bill revient donc avec la trousse de secours, se rassoit et commence à la vider.

"Laisse tomber, j'ai déjà cherché quelque chose d'utile tout à l'heure, il n'y a rien."

Il soupire et me dit qu'il revient avant de sortir.

Et effectivement, il revient même pas 5 minutes après, équipé d'une trousse de secours. Probablement la sienne.

Il en sort un bandage et une pommade.
"Passe ta cheville, je vais t'en mettre."

"Tu n'es pas obligé de-" il ne me laisse pas le temps de finir ma phrase et attrape ma jambe pour la poser sur les siennes.

Il commence à mettre la pommade puis le bandage. Une fois fini, il repose ma cheville sur le lit.

"Pour ton dos, je ne peux pas faire grand-chose par contre."

"C'est pas grave, c'est déjà gentil de m'avoir aidé pour ma cheville."

Mes yeux commencent à se fermer d'eux-mêmes, je sens la couverture remonter jusqu'à mon cou et la lumière s'éteindre. J'entends les pas de Bill s'éloigner de mon lit, mais avant qu'il ne s'éloigne trop j'attrape son bras et le fait se retourner.

"Tu es énervé ?"

"Pourquoi serais-je énervé ?" répondit-il.

"Je ne sais pas... mais quand tu parlais à cet homme tout à l'heure, tu avais l'air énervé alors..."

"Ce qui m'a énervé, c'est que tu aies ramené quelqu'un dont tu ne connaissais même pas le nom chez toi alors que tu es bourré !", sa voix devint de nouveau sèche.

"Je fais ce que je veux." mes yeux sont toujours fermés, mais je sens qu'il s'agite un peu.

"Bien sûr que tu fais ce que tu veux ! Mais cela ne signifie pas que ce n'est pas dangereux ! Il aurait pu arriver n'importe quoi, rien qu'en voyant comment il t'a jeté par terre, on sait qu'il ne comptait pas simplement te mettre dans ta chambre et partir ! Ne me dis pas que tu ne le vois pas ?"

Je rouvre les yeux et me redresse. "Bien sûr que oui, je le sais."

"Alors pourquoi lui as-tu donné l'opportunité de le faire ? Si je n'étais pas intervenu, qui sait ce qui aurait pu se passer !"

Je baisse les yeux et fixe les dessins de la couverture.

"C'est juste que... en fait, je n'en sais rien... je voulais juste me changer les idées, puis il est arrivé, on a bu, et... et moi je n'avais jamais bu autant de ma vie, donc je ne contrôlais rien du tout... et quand il a proposé de me ramener, j'ai juste vu un homme qui proposait son aide à une fille blessée et bourrée, rien d'autre." Je commence à pleurer un peu en comprenant ce qu'il m'aurait fait si Bill n'était pas arrivé.

"Pourquoi as-tu bu autant si tu ne l'avais jamais fait ? Avec un inconnu en plus ?"

"Je voulais juste penser à autre chose, c'est tout."

"À autre chose ? Qu'est-ce qui est si important à oublier au point de te mettre en danger ?"

Le fait-il exprès ?

"Peut-être parce que ma maison a brûlé ? Que je n'ai plus rien ? Que mes parents me détestent ? Que tous mes amis profitent de leurs meilleures vacances, tandis que je suis coincé dans cet hôtel de merde sans ascenseur fonctionnel ?"
Je suis vraiment à bout, ça me fait pleurer.

Le visage de Bill s'empare immédiatement d'une expression inquiète et il s'approche de moi pour me prendre dans ses bras.

"Hey... je suis désolé... je pensais que vu que tu es toujours joyeuse lorsque je te vois, ça ne t'affectait pas autant.."

"Je sais... Si j'essaie de rester joyeuse, c'est parce que je sais que si je commence à me dire que je n'ai vraiment, vraiment plus rien... Je ne pense pas que je le supporterais. Alors, j'essaie de voir le positif en me disant que j'ai quand même un endroit où dormir, de la nourriture et même un voisin super sympa..."

Il lâche un petit rire à ma dernière remarque.

"Tu veux que je t'avoue quelque chose ?" J'hoche légèrement la tête. "Je comprends ce que tu ressens."

Je me détache de ses bras et me place devant lui en attente de la suite.

"Moi aussi, j'avais tout... et j'ai tout perdu à cause de cette dispute ridicule avec mon frère et mes amis. Et... j'ai fait quelque chose... quelque chose que je ne pourrais pas me pardonner, mais je n'avais pas le choix. Sinon, j'aurais été à la rue."

"Qu'est-ce que tu as fait ?"

Il baisse les yeux.

"Quelque chose de mal... mais j'essaie de ne pas y penser non plus, sinon, comme toi, je ne pense pas que j'arriverai à passer à autre chose..."

Cette fois-ci, c'est moi qui pose mes mains sur ses joues pour capturer son regard.

"Je te pardonne."

Il fronce les sourcils.

"Quoi ?"

"Si tu as besoin que quelqu'un te pardonne pour ce que tu as fait, alors je veux bien le faire. Enfin... tant que tu n'as pas tuer une personne ou cambrioler une banque..."

Il sourit.

"Non, ne t'en fais pas... je n'ai tué personne et aucune banque n'a été cambriolée de mes mains. Promis." Il lève ses mains vers le ciel, ce qui me fait rire.

"Allez... je vais y aller et te laisser te reposer." Il commence à se lever, mais je lui attrape le bras une nouvelle fois.

"Tu peux rester...?"

"Tu es sûre ?"

"S'il te plaît ?"

Il accepte puis s'allonge derrière moi. Aucun de nous n'ose bouger.

Je m'énerve mentalement contre moi-même. Qu'est-ce qui m'a pris de demander ça ? Il n'y a rien de plus gênant comme situation.

"Tu as dit un gros mot tout à l'heure."

"Quoi ?"

"Depuis que je te connais, même si ça ne fait que 3 semaines, j'ai remarqué que tu ne disais jamais de gros mots. Alors que tout à l'heure, tu as dit merde. Ça m'a simplement surpris."

Je suppose qu'il dit ça pour essayer de détendre l'atmosphère. Mais je ne dis jamais de gros mots.

"N'importe quoi. Je n'ai jamais dit ça."

"Tu ne t'en es peut-être pas rendu compte, mais tu l'as dit."

Je me retourne vers lui et me redresse.
"Jamais Bill. Je ne dis jamais de gros mots."

Sur ce, je me recouche et lui tourne le dos.
Je suis sûr de moi. Je n'en ai jamais dit. Je n'ai jamais eu le droit.

Le dernier truc que j'ai entendu, c'est Bill qui se moquait de moi et disait que je l'avais bien dit, juste avant que je m'endorme.

De tout a Bill, de tout à rien.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant