CHAPITRE SIX : MARCHER SUR SES PIEDS, QUELLE EPREUVE

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Gabrielle

Mardi 03 Janvier

Je déteste la partie de moi qui est véritablement en train de réfléchir à sa proposition. Vient-il réellement de me proposer un contrat ? Du chantage plutôt. Puis il a bien mentionné le fait que tout se payait. Je paye, je suis bien d'accord là-dessus. Mais qu'a-t-il à gagner ?

- Pourquoi ? Je demande d'une voix que je veux irrévocable.

- Pourquoi quoi ?

Bien que je m'étais redressé, je repose mon dos contre le dossier de la chaise. J'ai beau retourner sa proposition dans tous les sens. Je ne parviens pas à comprendre le but, la finalité. Dans n'importe quel protocole scientifique plus farfelu et complexe les uns que les autres. La suite de manipulation et de calculs a une suite logique. Ici, je n'arrive pas à en saisir le but. Sauf si, bien entendu, c'est de divertir l'idiot du village pendant un certain temps. Je serais quoi ? La bouffonne du roi en CDD ? J'ai le droit à des jours de congés, vous pensez ?

- Qu'est-ce que tu y gagnes ?

Son sourire s'élargit. Dévoilant ses dents blanches et creusant sa joue.

Je me maudis de lui donner satisfaction. Il sait que mon envie de savoir peut surpasser...

Surpasser quoi déjà ? Ma logique qui trouve ce contrat complètement débile ? La terreur de devoir répondre à ses exigences une fois par jour pendant 4 mois ? Soit cent dix-huit jours si on compte à partir d'aujourd'hui. Ma terrible envie de lui écraser le crâne jusqu'à ce qu'il craque et me dévoile la vidéo ? Mon besoin viscéral de m'éloigner de tout ce qui pourrait se rapprocher de près ou de loin à de l'intimidation ?

J'ai bien trop de raison de ne pas accepter son contrat, en dehors de celles que je me crée moi-même. Le simple fait que ce soit lui, celui qui a hanté mes cauchemars pendant plusieurs années, qui me le propose. Il est cruel, vindicatif, moqueur, mesquin, et il a vraiment un goût très prononcé pour les humiliations publiques. Il me connaît, du moins, il me connaissait. Il sait très bien comment me faire atteindre ma limite. Il sait comment me sortir de mes gonds. Et par-dessus tout il sait comment toucher mes points sensibles et me détruire de l'intérieur.

Il n'y a absolument rien qui me dit qu'accepter ce contrat serait une bonne idée. Excepté cette envie de savoir. Comme un sentiment puissant d'avidité. Comme si j'avais besoin de combler une fissure en moi dont j'ignore l'existence. C'est à cause de ce sentiment que j'adore la science et les réponses qu'elle donne.

- Peut-être qu'un jour, je te dirais ce que j'y gagne. En attendant, concentre-toi plutôt sur ce que toi, tu y gagnes.

- Je dois attendre quatre mois pour obtenir cette vidéo. Je ne sais même pas ce que c'est. Ça se trouve, c'est juste une séquence de moi chantant faux sur du Adèle.

- Je suis sûr que ta ténacité ne s'est pas émoussée.

- Cent dix-sept actions, c'est cher payé pour une simple vidéo.

- Cent dix-huit, corrigea-t-il

Je vais pour le contredire. Mais il me coupe.

- Avoir mangé le pain au chocolat ne constitue pas une action. Pour que ce soit plus clair...Il joint ses mains et me scrute comme un professeur expliquant la consigne d'un exercice. Chaque fois que je te ferai ma demande du jour, je te serrerai la main et je te lâcherai une fois que je te l'aurai complètement exposé.

J'ai envie de rire tellement sa requête est ridicule. Transformer ses caprices putrides en demande solennelle est tout bonnement absurde. Peut-être se croit-il dans une série populaire ou dans un livre tordu. Mais s'il pense que je vais accepter ça, il se fourre complètement le doigt dans l'œil.

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