CHAPITRE ONZE : LA VÉRITÉ SORT DE LA BOUCHE DES ENFANTS

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Gabrielle

Jeudi 05 Janvier

J'arrive au laboratoire tout pile à l'heure. Moi qui étais habituée à arriver en avance depuis le début de la semaine, j'ai l'impression d'être en retard alors que je suis dans les temps. Je n'ai pas eu à accompagner Raphaël aujourd'hui, et j'étais plus que ravi. Je n'avais aucune envie de confronter Mendoza de si bonheur. J'ai quand même dû partir plus tôt, étant donné que je n'ai toujours pas récupéré mon vélo depuis lundi, toujours accroché devant le laboratoire.

Ça m'a fait du bien de faire le chemin seule. Avec pour seule compagnie un concerto de Vivaldi, celui que je vais devoir travailler ce soir avec le professeur Viretti.

L'optique de revoir mon professeur après la séance de boxe me taraude un peu. Je ne sais pas quelle réaction avoir avec lui désormais. Je sais que notre relation a évolué après cette soirée. Je l'ai trouvé beaucoup plus accessible, plus humain. Mais je sais que ce soir il sera de nouveau mon professeur, tiré à quatre épingles. Et non plus le jeune homme décontracté et surprenant avec qui j'ai transpiré sur un ring. Et encore une fois, la perte de maîtrise m'angoisse.

Mais bien moins que la perspective de ma journée avec Mendoza.

Celui-ci est d'ailleurs déjà là lorsque j'arrive dans le bureau. Il est confortablement installé. Son ordinateur est ouvert devant lui. Un pied ballant dans le vide posé sur le coin de son bureau. Et ce que je suppose être un café, vue l'odeur, près de sa bouche.

- Je t'ai attendu à l'école. Quand j'ai vu ton frère sortir de la voiture de ton père je savais que tu ne serais pas.

- L'école n'est pas notre rendez-vous journalier.

- Ça pourrait le devenir.

- Certainement pas.

J'accroche ma veste et m'installe derrière mon ordinateur sans lui décrocher un regard.

Dans ma vision périphérique, je peux apercevoir voir son pied se balancer dans le vide. Ce qui évidemment m'agace. Je l'entends également chantonner gaiement. Je ne m'attendais pas à le trouver de si bonne humeur après notre altercation de la vieille, bien au contraire. Je m'attendais à trouver un Mendoza froid et aigri. Prêt à tout pour répondre à mes attaques de la veille. Mais au contraire, il a l'air jovial et de bonne humeur. Ça me fait presque plus peur de le voir comme ça, que de devoir confronter son état taciturne habituel.

- Je t'ai apporté quelque chose.

- En quel honneur ?

Son sourire fend ses lèvres. Et il se redresse sur sa chaise. Il fouille dans son sac et en sort un paquet multicolore. Il le lance sur mon propre bureau.

J'observe le paquet, et reconnais une célèbre marque de friandise. A l'intérieur, des bonbons acidulés en forme d'arc en ciel sont emballés.

Je n'ai aucune idée de pourquoi il me donne ça.

- Merci, mais je ne mange pas de bonbons.

Son rire résonne dans la pièce. Il se lève de son siège et se poste devant moi. Bien que je ne lui fasse pas face, trouvant un soudain intérêt pour mon ordinateur même pas encore allumé.

- Ce n'est pas pour toi.

Je tourne mon visage vers lui. Interloquée. Il a l'air amusé de la situation. Qu'est-ce qu'il ne l'amuse pas à vrai dire ?

- C'est pourquoi alors ? Je doute que les cellules apprécient une telle quantité de sucre.

Il s'esclaffe, encore une fois, en rejetant sa tête en arrière. Comme si ce que j'avais dit était tordant. Est-ce tordant ? Je n'en ai pas l'impression. Je n'ai jamais été quelqu'un de drôle. Du moins pas volontairement.

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